Je souhaitais rédiger une critique succincte, mais je me rends compte que c’est impossible, tant il y a de choses à dire sur ce film.
Pour pouvoir en parler avec mon ressenti le plus juste, je vais donc commencer par parler de ses points forts évidents.
Le tout premier : Vaiana. Je comprends que le film porte son nom, car sa qualité repose entièrement sur son héroïne.
C’est un personnage féminin fort, courageux et spirituel, qui se relève lorsqu’elle échoue, et réessaie malgré ses peurs. Elle est également très proche de sa famille, et c’est son amour pour eux et pour son peuple qui la guidera dans son périple. Elle est aussi dotée d’un sacré sens de l’humour, ce qui ne manquera pas d’apporter un bon nombre de scènes comiques.
Pour toutes ces raisons, elle est devenue mon personnage préféré de Disney.
D’une manière globale, tous les personnages sont attachants – petit clin d’œil à Tala, qui n’apparaît que très peu, mais qui nous offre deux des plus belles scènes du film. Sa relation avec Vaiana me rappelle celle que j’avais avec ma grand-mère, il m’a donc été plus facile d’aimer ce personnage.
Petit bémol sur Maui : il faut attendre vraiment très longtemps avant de pouvoir le trouver sympathique. Lorsqu’on nous le présente, il est arrogant et égoïste. À cause de lui, Vaiana manque de se faire tuer et ça ne le dérange pas. Heureusement que son personnage prend une toute autre dimension vers la fin du film.
Ensuite, l'animation et les décors sont tout simplement sublimes. J’ai été immédiatement transportée dans l’univers du film, et ce, dès les premières minutes.
Depuis
Raiponce, la fluidité de l'animation des personnages (mouvements, expressions) a fait un bond en avant remarquable.
Enfin, la musique. Je n’avais plus aimé une B.O. Disney comme ça depuis
Le Bossu de Notre-Dame.
J’aime beaucoup Cerise Calixte en voix française de Vaiana, qui est pour moi un excellent choix - bien qu’elle semble diviser les avis sur le forum. Je l’avais vue en doublure de Belle, dans
La Belle et la Bête au théâtre du Mogador quelques années plus tôt, et je l’avais trouvée superbe en live : jolie voix puissante et timbre chaleureux, très broadwayiens.
Toutefois, le défaut majeur de
Vaiana, la Légende du bout du Monde est selon moi, son rythme très inégal. En le visionnant, j'ai eu l'impression qu'il était divisé en trois parties distinctes.
Attention, tout ce qui va suivre contient d’énormes spoilers. Même s’il s’agit d’un topic dédié, je préfère tout de même vous avertir étant donné que je développe chacun de mes propos.• Dans la première (qui est à mon avis une vraie réussite), on nous présente Vaiana : sa personnalité pétillante, sa culture, le mode de vie de son peuple sur leur île, tout en ayant au préalable pris soin de nous teaser d’une scène de notre héroïne (alors enfant) rencontrant la Mer ; scène qui nous laisse imaginer l’importance que celle-ci aura dans la suite du récit.
On nous expose également de suite l’obstacle qu’elle va rencontrer dans la quête de son destin : son père. Celui-ci qui attend de sa fille qu’elle reprenne le flambeau et pose sa propre pierre comme leurs ancêtres et lui-même l’avaient fait avant elle. Sentant également l’attrait irrésistible que Vaiana ressent pour l’océan, il s’efforcera de l’en éloigner par tous les moyens. Et on finit par le comprendre en tant que père protecteur, qui refuse de perdre son unique enfant comme il avait perdu son meilleur ami par le passé.
Toutefois, un personnage clé va permettre à Vaiana de se lancer à la conquête de son destin, et pas n’importe lequel : sa grand-mère, Tala. C’est elle qui lève le voile sur leur histoire passée et permet à notre héroïne de comprendre que l’appel de la mer est dans ses gènes. Et quelle magnifique scène que le départ de Vaiana sur la reprise du
« Bleu Lumière », à la fois puissante et très émotionnelle.
À partir de cet instant, on s’attend à ce que l’histoire maintenant bien installée, prenne littéralement son envol. Mais c’est le moment où le film révèle toutes ses faiblesses.
• La deuxième partie tire en longueurs dans une succession de scènes totalement décousues, en enchaînant gags, chansons et situations rocambolesques qui déroutent totalement le spectateur et font perdre le fil de l’histoire.
La scène avec les Kakamora était inutilement longue. Elle ne dure pas plus de cinq minutes à l’écran, mais semble interminable.
Je comprends l’idée de montrer que Vaiana rencontre sur sa route des méchants qui convoitent le cœur de Te Fiti. Il fallait bien aussi une scène d’action - et qui s’adresse à un public plus jeune - mais au final, celle-ci dessert la dynamique du film plus qu’autre chose.
Le rythme est déjà bien cassé à ce stade. Je me dis alors qu’après une attaque de pirates-coco, on ne pourra pas avoir pire. Mais je ne suis pas encore au bout de ma peine, puisqu’arrive bientôt le numéro de Tamatoa, qui finit de me faire décrocher.
La chanson
« Bling-Bling » (bien que très sympathique après réécoute hors-film) me donne l’impression d’atterrir soudainement dans un spectacle musical burlesque.
C’est long, horriblement long, et je me surprends à regarder ma montre en espérant que le calvaire s’achève bientôt. J’avoue avoir été très frustrée à ce moment-là, parce qu’au fond, je savais que je voulais vraiment aimer le film, mais que la direction qu’il prenait le rendait trop illisible.
Dès lors, je n’attends plus rien de
Vaiana, la Légende du bout du Monde, et me dis qu’il ne s’agira que d’une déception de plus, malgré un début très prometteur.
C’est alors que le film prend la tournure spectaculaire que je ne voyais même plus venir.
• Car la troisième partie est un pur chef-d’œuvre sur tous les points.
Tout d’abord, la première confrontation avec Te Ka qui s’avère être un véritable échec pour nos héros. Maui retombe alors dans ses travers et abandonne Vaiana, désespérée.
S’ensuit la sublime séquence
« Je suis Vaiana (le chant des Ancêtres) ». Tout ce qui faisait la réussite de la première partie du film, fonctionne ici comme une piqûre de rappel (comme si Disney œuvrait pour réveiller le spectateur volontairement assommé par un deuxième acte inconsistant).
Je retrouve le fil de l’histoire et me dis que le dénouement sera peut-être bon finalement.
Et plus il approche, plus j’ai peur pour l’héroïne, et plus je sens que je ne vais pas être déçue.
Et en effet, quel climax ! La manière dont il est amené, juste après le combat final épique entre Te Ka et Maui (prêt à se sacrifier pour permettre à Vaiana de réparer l'erreur qu'il a commise mille ans plus tôt), j’en ai eu la chair de poule tout le long.
Déjà à son apogée, il est difficile d’imaginer le film repousser encore plus loin ses limites, et on espère au moins que Vaiana réussisse à replacer le cœur de Te Fiti avant que Maui ne soit tué par Te Ka. Car oui, à ce moment-là, j’ai fini par apprécier Maui et espéré voir sa rédemption sans qu’il n’ait à mourir.
Mais le tournant du film est probablement le moment où Vaiana réalise que Te Fiti n’est autre que Te Ka depuis toujours (belle métaphore de la Nature transformée en cendres par la main de l’Homme).
Dès lors, le film change littéralement de ligue à mes yeux, et passe du dernier né de Disney à un nouveau Grand Classique intemporel.
La séquence qui suit
« Te Fiti / Know Who You Are », est tout simplement parfaite : l’animation, les couleurs, le rythme-ralenti, la musique/les chœurs ; Vaiana demandant à la Mer de laisser Te Ka venir à elle, La Mer s’ouvrant en deux, laissant le champ libre à Te Ka qui se jette à corps perdu dans la fosse pour ramper de rage vers Vaiana, qui elle, marche avec foi vers cette force incontrôlable qui risque pourtant de la tuer.
Jamais encore Disney n’était parvenu à atteindre un tel niveau d’allégorie sur une seule scène. J’en ai pleuré par sa beauté et sa symbolique.
- Spoiler:
Un de mes plans préférés du film.
Le film se conclut par un épilogue digne des plus grands classiques Disney, et fait honneur aux thèmes annoncés et espérés dans la première partie du film.
Au final,
Vaiana, la Légende du bout du Monde fait désormais partie de mes Disney préférés pour toutes les raisons énoncées dans ma critique, aussi bien pour ses forces que pour ses faiblesses.
Malgré une intrigue convenue sur le fond, le film surprend énormément par la forme et propose son lot de séquences cultes, magnifiées par une B.O. qui vaut vraiment son pesant d’or.
Un beau chef-d’œuvre que nous ont offert les studios à côté duquel il ne faut surtout pas passer.