Je suis donc allé voir
Alice de l'Autre Côté du Miroir vendredi dernier. J'ai vu le film en VO, sous-titré français, en digital (pas en 3D quoi). J'ai donc aimé le film mais sans plus. Je suis resté sur ma faim et j'ai trouvé que le film développait des aspects intéressant mais ne les a pas assez exploré en profondeur, comme un sentiment de pas assez aboutit.
Alors d'abord, j'avais vu le précédent film en VF, j'ai donc été très supris de la voix de Johnny Depp. Je ne sais pas à quoi ressemble sa vraie voix n'ayant vu aucun des films où il apparait en VO, je pense qu'il a quand même modulé un peu sa voix et son accent pour le rôle du Chapelier et ça m'a un peu dérouté au début.
Donc le film commence dans le monde réel d'Alice. J'ai vraiment beaucoup aimé tous les passages dans le monde réel, le début est extra et permet d'entrer dans l'histoire directement. On se rend compte que Alice a grandit, qu'elle est devenue une femme forte, intelligente et pleine de ressources.
Et ensuite, on entre au Pays des Merveilles. La transition par le miroir est bien trouvée, la pièce est disposée de la même façon que l'endroit où se trouvait Alice dans le monde réel mais on s'apperçoit vite que l'on est au Pays des Merveilles. Cependant, c'est le seul moment où je me suis vraiment senti au Pays des Merveilles. Passé cette chambre, l'univers m'a déçu car j'ai trouvé que ce nouveau Pays des Merveilles, débarassé de l'emprise de la Reine de Coeur, manquait de fantaisie (encore plus que dans le premier film). Là où le livre, le film d'animation de 1951 et le film de 2010 avaient réussi à nous montrer un Pays des Merveilles complètement loufoque, avec des créatures imaginaires à foison, ici on se contente de se balader dans un univers coloré, aux décors certes très beau mais c'est tout. Ce que j'aime dans le Pays des Merveilles c'est d'être étonné de tout, d'une fleur qui parle, de papillons à l'aspect de tartines, de boissons aux effets imprévisibles, d'animaux que l'on ne trouve pas ailleurs. Ici il n'y a pas d'étonnement, les maisons du village sont banales, les pièces du chateau aussi, la forêt est colorée mais pas très vivante,... Dans le même ordre d'idée, on perd aussi l'idée de désorientation spaciale, les changements de taille, les passages d'un univers à un autre,... je dirais que l'univers montré est donc un peu plat.
Je trouve que de façon générale, les idées auraient pu être plus poussées. Je ne sais pas, le film s'apelle "Alice through the looking glass", elle aurait pu traverser plusieurs fois le miroir et exploiter cette idée de transition d'un monde à l'autre. J'ai d'ailleurs apprécié le passage où elle échape au Temps lorsqu'elle retourne brièvement dans son monde. Ceci étant, en y repenssant, ce passage est bref et ne sert pas vraiment l'intrigue d'un monde comme de l'autre. Pour moi il permet juste à Alice de se rendre compte que peu importe la situation, sa mère lui fera confiance.
Je me suis d'ailleurs demandé si au moment où elle avait traversé le miroir, elle serait arrivé dans son monde mais dans le passé (étant donné qu'elle était dans le passé au Pays des Merveilles). Preuve en est que le temps dans les deux mondes sont déconnectés et pas du tout dépendants l'un de l'autre. Mais je pense qu'il aurait pu être intéressant de lier la notion de temps et peut être nous montrer Alice petite, poursuivant le Lapin Blanc pour la première fois. Enfin je ne sais pas, j'aurais apprécié de voir, tel un clin d'oeil, un peu plus du passé d'Alice, en complément du passé du Chapelier et de la Reine de Coeur/Reine Blanche.
J'ai par contre apprécié que les voyages dans le passé d'Alice servent l'intrigue et son dénouement, c'était plutôt bien construit dans l'ensemble. Moi qui adore les film avec des voyages dans le temps, ici c'était bien mené mais peut être pas assez approfondi dans le sens où j'aurais aimé plus d'intéractions entre les différentes époques. La notion de "on ne peut pas changer le passé, juste apprendre de lui", c'était quelque chose d'intéressant, qui a été bien exploité, tant par Alice et sa découverte de l'enfance du Chapelier, qu'avec les deux soeurs et cette rédemption de la Reine de Coeur et le fait que la Reine Blanche avoue sa faute, à la fin. Mais au final, ça a surtout permit d'avoir une facilité dans le scénario car rien ne peut avoir d'impact. Je pense que j'aurais préféré voir que les actions d'Alice dans le passé aient un impact sur le futur (autre qu'un apprentissage), ça aurait rendu le scénarion un peu plus complexe et profond, surtout sur un film basé sur les voyages dans le temps. J'ai donc surtout apprécié de retourner dans le passé des deux soeurs afin de les comprendre un peu mieux.
C'était aussi un peu facile de faire d'Alice une pro de la Chronosphère en deux secondes, juste parce que c'est "comme un navire". L'idée du temps tel un océan, complètement sans dessus-dessous (littéralement) était intéressante également en terme de visuel.
J'ai été beaucoup moins convaincu par la cristallisation finale du Pays des Merveilles. Au niveau de l'action, c'était très bien mené, dynamique, cristalisant à souhait. Mais alors visuellement, c'était un peu étrange, comme une sorte de rouille qui envahit et fige le tout. Peut-être est-ce un clin d'oeil à de la rouille qui puisse figer un engrenage d'une horloge mais je ne sais pas, j'aurais aimé quelque chose de moins terre à terre. Je veux dire, le temps s'arrête, une anomalie temporelle est crée à cause de la Reine de Coeur, ça aurait mérité un effondrement du Pays des Merveilles un peu plus absurde, plus de déconstruction. Là, on se croirait à Pompéi, que tout est juste recouvert d'une couche d'on ne sait quoi, sans pour autant que ça évoque un sérieux problème du temps, dans le passé, le présent et l'avenir... Et puis elle sort d'où cette énergie qui permet le happy ending?...
Mais le problème que j'évoque juste au dessus est aussi lié à cette personnification du temps, ça le rend matériel, limite commun. Un sentiment qui est reforcé par cette relation qu'il entretient avec la Reine de Coeur, avec ce "je t'aime, moi non plus". Sa personnalité d'ailleurs est très définie, que ce soit avec son accent, son costume. Il a un petit côté ridicule aussi et à aucun moment je ne l'ai senti menaçant envers Alice qui définitivement apparait comme plus forte que jamais, elle tient les cordes, ça se voit, ça se ressent, elle maîtrise tout, résolue tout.
La Reine de Coeur est encore une fois au coeur de l'intrigue du film, c'est au final elle qui est la cause de tout le scénario. A l'instar d'Alice qui est incontestablement pour moi l'héroine, la Reine de Coeur en est l'antagoniste. Mais c'était quand même agréable de retrouver cette Reine de Coeur au meilleur de sa folie, je ne m'y attendais pas.
Ceci étant, j'ai trouvé que ni Alice, ni la Reine de Coeur ne se rendent réellement compte de l'impact qu'elles ont eu de vouloir dérober la chronosphère. On voit bien que le fait de la voler détruit le Temps/temps, qu'elle est nécessaire au bon fonctionnement du Temps/temps (et dans ce sens, j'aurais peut être aimé voir des anomalies temporelles plus souvent dans le film, témoignant de la dégradation du temps en lui-même... d'où pour moi un film qui n'est pas totalement abouti dans ses idées).
Une scène que j'ai particulièrement aimé est justement le moment où le Temps fige le Chapelier et ses acolytes au moment du Thé. C'était vraiment bien trouvé par rapport au premier film et au fait qu'ils sont coincés dans une partie de thé à "l'infini".
A propos de ce passage, bien qu'écoulés, les jeux de mots autour du temps sont bien trouvés, je ne sais pas ce que ça donnera en VF...
Globalement, le film est très beau visuellement, les décors sont somptueux, l'animation est très belle. Je pense que ce film vaut vraiment le coup d'être vu en 3D (dommage qu'ils ne l'ont pas diffusé en 3D dans mon cinéma :/). Le palais du Temps est génial, j'ai beaucoup aimé l'arrivée d'Alice, depuis l'horloge jusqu'à sa traversée des aiguilles. L'idée des secondes qui se compilent en minutes puis en heures était aussi intéressante. Il faut dire que c'est compliqué de rendre concret quelque chose d'aussi abstrait qu'est le temps. Je ne sais pas si ça a été développé de la meilleure manière qui soit mais pourquoi pas. Au final ces secondes/minutes/heures forment plus des robots sans pour autant qu'une notion temporelle soit dévelopée dans leur métamorphose (bien qu'on comprend que plus ils s'assemblent, plus ils peuvent maîtriser la rotation des aiguilles de la Grande Horloge).
La meilleure trouvaille pour moi est l'idée de vie/mort qui est symbolisée par le fonctionnement/l'arrêt des horloges dont le Temps est le gardien.
Les autres personnages, le Chat de Cheschire, le Lièvre de Mars, Absolem, etc sont tous égaux à eux même. Leur rôle est par contre anecdotique dans cet opus, cela m'a un peu attristé, notamment sur le Chat de Cheschire que j'aurais aimé voir plus car il est juste excellent
Quant à la musique, elle est en parfaite continuité avec celle du premier film, c'était donc un réel plaisir pour moi de la retrouver ici.
Au final, et c'est là où j'aimerai moduler mon avis, je pense qu'il faut voir ce film en se disant qu'il ne s'agit pas d'une adaptation des livres de Lewis Carroll mais plutôt un point de départ à une histoire complètement inédite. Et de ce point de vue, le film en devient plus intéressant et souffre moins de la déception de retrouver le monde du Pays des Merveilles auquel je m'attendais. Disney nous offre donc une histoire nouvelle autour de ces personnages emblématiques, c'est de l'inédit et ça fait vraiment du bien. De ce point de vue là, du fait qu'il y ait donc de la nouveauté, de la prise d'audace d'avoir personnifié le temps (même si la réalisation peut paraitre maladroite), j'ai bien aimé le film.