Voici un article indiquant la colaboration d un dessinateur prêté par disney studios trouvez sur devildead.com
PLANETE INTERDITE
A Hollywood, les années 50 sont celles de la maturation et de l'explosion du cinéma de science-fiction. Logiquement, les grands studios, attirés par les succès de productions indépendantes telles que DESTINATION LUNE ou LA CHOSE D'UN AUTRE MONDE, veulent se lancer sur le créneau. Paramount s'allie avec George Pal, lequel produit pour eux LA GUERRE DES MONDES, LE CHOC DES MONDES, puis LA CONQUETE DE L'ESPACE. Warner, surpris par le succès de LE MONSTRE DES TEMPS PERDUS, toute petite production aux effets spéciaux signés Ray Harryhausen, s'empresse de produire DES MONSTRES ATTAQUENT LA VILLE. La Fox, de son côté, propose l'ambitieux LE JOUR OU LA TERRE S'ARRETA de Robert Wise. Quant à Universal, le studio du fantastique, il trouve en Jack Arnold son spécialiste du genre, lequel signe LE METEORE DE LA NUIT, L'ETRANGE CREATURE DU LAC NOIR et TARANTULA.
Pendant ce temps-là, la Metro-Goldwyn-Mayer reste en retrait. Deux scénaristes, Irving Block et Allen Adler, proposent néanmoins une histoire de Space Opera à Nicholas Nayfack, producteur à la MGM depuis 1949. Il se montre séduit, mais la direction du studio s’avère plus réticente. Elle n'accepte de le financer qu'à condition de lui allouer un budget relativement réduit. En fin de compte, PLANETE INTERDITE se fera pour 1,9 millions de dollars : une somme très importante si on la compare à ce qu'Universal investissait dans ses films d'anticipation, mais néanmoins dans la petite moyenne pour un film MGM.
Toujours selon les standards de la MGM, la distribution s’avère modeste. Walter Pidgeon, qui joue le Dr. Morbius, est un acteur expérimenté et talentueux, mais sa renommée n’équivaut pas celle d'une grande star. Quant aux jeunes premiers Anne Francis et Leslie Nielsen (bien avant ses interprétations parodiques dans les films Zucker-Abraham-Zucker), ce ne sont pas non plus de grandes vedettes. Un film de science-fiction appelle aussi de frais particuliers pour la conception de ses effets spéciaux. En l'occurrence, les techniciens de
la MGM reçoivent l'aide de spécialistes prêtés par le studio Disney, studio ayant déjà beaucoup expérimenté dans des longs métrages mêlant animation et acteurs (MELODIE DU SUD en 1946), voire les oeuvres recourant à des trucages de toutes sortes (20 000 LIEUES SOUS LES MERS). Pour la mise en scène, le studio choisit dans ses rangs Fred M. Wilcox, un réalisateur qui ne fit guère d'éclats particuliers, avant tout connu pour avoir signer trois volets de la saga cinématographique mettant en scène le chien Lassie...
2200... La soucoupe C 57D, dirigée par le commandant Adams, se rend sur la planète Altair IV pour y prendre des nouvelles d'une expédition terrienne. Ils ne découvrent que deux seuls survivants : le docteur Morbius, sa fille Altaira et leur robot de compagnie. Morbius leur apprend que les autres colons ont été décimés par des puissances insondables hantant Altair IV, planète autrefois peuplée par les Krells. Une civilisation ayant atteint un degré d'intelligence extrêmement élevée avant de disparaître mystérieusement...
PLANETE INTERDITE est très souvent considéré comme une date-clé de la science-fiction au cinéma, et plus particulièrement du space opera. Pour cause, il s'agit sans doute du titre le plus ambitieux créé dans ce genre au cours des années 50. Si l'on peut faire remonter les débuts de ce style de films à Méliès, il ne commence réellement à prendre forme dans le cinéma hollywoodien que dans les années 30-40, grâce aux serial FLASH GORDON et BUCK ROGERS, serial inspirés par les bandes dessinées de l'époque et produits par Universal. Ces mélanges d'aventures, de science-fiction et de fantasy connaissent d'importants succès, mais, petit à petit, ces productions tombent en désuétude. Le genre rebondit en 1950, avec DESTINATION LUNE, space opera "réaliste" en Technicolor, narrant un voyage habité vers la Lune. Un pas décisif est franchi en 1955 avec LES SURVIVANTS DE L'INFINI du studio Universal, film en couleur dont la dernière partie consiste en une expédition sur Metaluna, planète aux décors baroques habitée par des extraterrestres.
Ce n'est pas un secret, les créateurs de PLANETE INTERDITE ont porté un oeil plus que vigilant sur LES SURVIVANTS DE L'INFINI, ne serait-ce que pour décrire l'univers interstellaire, fantastique et coloré d'Altair IV. Pourtant, la première influence nettement revendiquée par les scénaristes de PLANETE INTERDITE est "La tempête" de Shakespeare, pièce racontant l'histoire de Prospero, Duc de Milan, exilé avec sa fille sur une île où règne la magie. Magie permettant au duc de contrôler des esprits maléfiques ou bénéfiques. Ici, Prospero devient tout simplement Morbius, et l'île magique se transforme en une planète lointaine, encore imprégnée des découvertes scientifiques d'une civilisation disparue...
Le décor et l'ambiance de PLANETE INTERDITE relèvent pourtant de la science-fiction la plus moderne. Le commandant Adams et son équipage arrivent à bord d'une soucoupe volante et sont armés de pistolets lançant des décharges d'énergie. Altair IV est une planète à la surface aride, plongée dans des éclairages d'un autre monde. Morbius habite dans une superbe villa du futur, villa dans laquelle le service est assuré par un robot dénommé Robby.
Car, il faut le bien dire, les qualités les plus révolutionnaires de PLANETE INTERDITE sont avant tout visuelles et techniques. Robby le robot est sans doute un des plus beaux et des plus célèbres accessoires conçus dans l'histoire du cinéma que nous aimons et défendons sur DeVil Dead ! Alors que ce genre de machine était, à de rares exceptions près, représenté comme d'aimables assemblages de tôles ondulés, Robby s'avère un superbe objet de design, un assemblage de verre et d'acier d'une totale élégance. Qui plus est, le récit lui donne une personnalité bienveillante et serviable, ce qui le rend immédiatement sympathique auprès du spectateur.
MGM comprend qu'un tel robot peut-être la vedette du film, vedette mise en avant au cours de la promotion de PLANETE INTERDITE, exhibée sur l'affiche en lieu et place des acteurs, et même réutilisée dans divers films et séries télévisées (LE CERVEAU INVISIBLE...). A la sortie de PLANETE INTERDITE, le studio tente même de faire croire qu'il s'agit d'un véritable robot, alors qu'en fait il y a bel et bien un comédien placé dans sa carapace d'acier !
PLANETE INTERDITE, c'est aussi d'autres trouvailles visuelles extrêmement réussies, comme l’approche de la soucoupe C 57 B vers Altair IV, dès le début du métrage. Ou encore l'exploration des immenses souterrains constituant la surpuissante machine des Krells... Toutes ces qualités techniques voient leur munificence valorisée par un fastueux format scope, allié à la couleur. Une combinaison visuellement impressionnante qui, jusqu'alors, n'avait pas été utilisée dans le domaine du Space Opera !
Il faut encore souligner la qualité remarquable des effets spéciaux visuels, obtenus pour la plupart au moyen d'animations dessinées et incrustées dans une image classique. Parasites traversant le cerveau électronique de Robby, rayons, monstrueuse créature apparaissant dans un champs d'énergie... : on ne compte plus les magnifiques trucages émaillant cette aventure galactique. Des trucages qui, il est important de le préciser, n'ont pas pris une ride avec les années. Ce qui démontre qu’en la matière, un travail réellement bien fait supporte parfaitement le poids des ans !
Enfin, il n'est pas possible de parler de PLANETE INTERDITE sans évoquer son élément le plus révolutionnaire : sa formidable bande originale composée de bruitages électroniques. Bourdonnements spatiaux, bruits galactiques et crépitements futuristes posent une ambiance abstraite inimitable, provoquant, dès le générique, un véritable dépaysement sonore. Le spectateur a l'impression de se retrouver propulsé dans un autre monde, totalement exotique et nouveau ! Il y a fort à parier que si PLANETE INTERDITE s'était vu accompagné d'une partition orchestrale plus classique, le film pourrait sembler un peu plus désuet. Or, grâce aux compositions signées par Bebe et Louis Barron, il paraît, aujourd'hui encore, extrêmement avant-gardiste !
Pourtant, PLANETE INTERDITE n'est pas dénuée de faiblesses. Malgré tout le respect que nous inspire son influence prestigieuse, il faut relever quelques fautes de goût. Les gags avec le cuistot, qui utilise Robby pour fabriquer des bouteilles d'alcool, sont d'une puérilité embarrassante. Tout comme les séquences de romance entre Altaira et les divers membres de l'équipage, séquences flirtant trop avec le kitsch. Heureusement, tout ce qui tourne autour des Krells et de leur civilisation, ainsi qu'autour des expériences menées par Morbius dans les laboratoires de ce peuple extraterrestre, relève d'une science-fiction nettement plus mature et ambitieuse...
Avec quelques films comme LA GUERRE DES MONDES, DES MONSTRES ATTAQUENT LA VILLE ou L'HOMME QUI RETRECIT, PLANETE INTERDITE incarne la quintessence de l'âge d'or de la science-fiction américaine. Mêlant ambition et innovation, ils posèrent les bases du genre pour les années à venir. De tous ces titres, PLANETE INTERDITE sera sans doute le plus influent. Robby est devenu une icône de la science-fiction, invitée encore récemment à faire des apparitions dans des films fantastiques. L'affiche, nous montrant ce robot portant dans ses bras Altaira, s’avère une des plus célèbres du genre... Bref, PLANETE INTERDITE est devenu un titre-pivot. Dans l’histoire du cinéma de science-fiction, il y a clairement un avant et un après PLANETE INTERDITE. Tout passionné d'anticipation se doit donc de l’avoir visionné au moins une fois dans sa vie !
Emmanuel Denis
voici l animation en question
quelques affiches du film