Et le chapitre 3
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~ Chapitre 3 : Au chevet de la reine ~
Tandis que la nuit tombait sur les flots, le silence gagnait peu à peu le palais. Seule une lumière brillait encore, provenant de la chambre de la pauvre Reine Athéna, dont l'état s'aggravait de jour en jour. Triton lui tenait la main et la regardait dans les yeux en essayant péniblement cacher sa tristesse. Le teint de la jeune femme était devenu si pâle qu'on l'aurait cru fait de porcelaine. Ses longs cheveux roux et bouclés, retombant sur ses épaules, commençaient à se ternir. La vie de la souveraine semblait peu à peu s'éteindre. Malgré tout, une lueur d'espoir et de courage persistait dans ses yeux.
-Mon bébé... Mon bébé... murmura-t-elle. Je veux survivre pour mon bébé. Tant qu'il lui restera une chance de survivre, je continuerai à me battre.
Son tendre époux mit sa main sur sa joue et lui chuchota doucement :
-Je te promet que quelqu'en soit le prix à payer, je trouverai une solution pour vous sauver, toi et le bébé. Je te le promet.
Athéna esquissa alors un sourire, puis ôta la main de son époux de son visage.
-Tu ne devrais pas faire ça, pense au risque de contagion...
-Oh, peu m'importe de tomber malade tant que je reste près de toi. C'est tout ce qui compte.
La reine finit par s'endormir lentement. Triton s'en alla alors sans un bruit de la pièce. La chambre était située au plus haut de la plus haute tour du palais. En effet les médecins préconisaient que les rayons du soleil seraient bénéfiques pour Athéna. Ainsi, chaque matin, la jeune femme était éclairée par un soleil éclatant qui lui caressait la peau et dont la lumière se reflétait sur ses écailles. À la vue de ce spectacle la souveraine paraissait se rétablir et retrouver des couleurs. Malheureusement ce n'était qu'illusion, et dès que le ciel s'assombrissait, la sirène redevenait pâle comme la mort. Le soleil n'est pas guérisseur. Il n'efface pas le malheur. C'est un trompeur...
Le roi des océans se dirigeait vers les sous-sols du château, où travaillaient jour et nuit les sages et médecins, espérant trouver un remède efficace à administrer à la malade.
Certains revenaient tout juste d'une expédition sur les plages tropicales où ils avaient prélevé du sable blanc pour en faire une poudre guérisseuse.
-Est-ce que ça la sauvera ?, demanda le souverain.
-Impossible de se prononcer pour l'instant, Votre Altesse, fit l'un des médecins. Nos tests ne sont pas terminés et les premiers n'ont pas été très concluants.
-Et qu'en est-il des mixtures faites d'algues et d'écailles de poisson-lune ?
-Au mieux, ça pourra la soulager, mais rien de bien efficace, j'en ai peur...
Le roi était effondré. Malgré tous ses pouvoirs, il lui était impossible d'aider la femme qu'il aimait ni l'enfant qu'elle portait. Rester là sans rien faire le rendait fou de rage.
-Je ne veux rien entendre de ce genre !, hurla-t-il alors. J'exige que vous trouviez une solution ! Remuez ciel et terre s'il le faut, que personne ne dorme avant que la reine ne soit complètement rétablie, est-ce clair ?
-Bien, Votre Majesté, mais... mes hommes sont épuisés, ils travaillent très dur et ne dorment pas assez, et...
-Et bien dites-leur que s'ils venaient à échouer ils ne dormiront plus jamais, c'est compris ??
Réalisant qu'il se montrait trop sévère, il se radoucit alors puis ajouta :
-... Je vous enverrai un cuisinier pour vous préparer à manger. On travaille mieux le ventre plein.
-Merci Votre Altesse.
Tandis que Triton s'exécutait, de nombreux étages plus haut, une silhouette s'approchait de la reine endormie.
-Oooh, quelle tristesse de te voir dans cet état, fit Ursula. Pauvre petite créature dont le cruel destin s'apprête à emporter... Je n'ai rien à te reprocher ma chère, mais... s'il y a une chose que je ne supporte pas c'est qu'on se mette en travers de mon chemin ! À cause de toi je suis devenue une moins que rien, Triton m'a réduite à l'état de servante misérable et pathétique ! Mais... ce n'est plus le cas maintenant. N'est-ce pas ? Grâce à toi -comble d'ironie - je suis revenue à la place qui m'est dûe. Grâce à la petite potion que je t'ai administré, Triton ne se préoccupe plus que de toi et me laisse le champ libre !
Elle laissa échapper un rire diabolique, puis s'adressa à nouveau à l'impuissante sirène qui ne pouvait pas l'entendre.
-Oh non, rassure-toi, ma petite mixture ne te tueras pas. Elle te gardera simplement à l'état de légume pour toujours ! Hahaha ! Ainsi Triton n'aura plus goût à régner sur le royaume et j'aurais définitivement le plein pouvoir ! Mouahahaha !
Elle caressa le ventre de la belle endormie.
-Bien sûr, ton bébé risque de ne pas survivre... Quel dommage... Enfin, il t'en reste six autres en réserve hein ! Un de plus un de moins ! Hahaha !!!
La monstrueuse femme-pieuvre fit avaler de force un infâme breuvage à la sirène qui semblait s'affaiblir davantage encore.
-Avec ça, ça devrait suffir pour un bon bout de temps, souffla-t-elle. Suffisamment peut-être pour que le bon roi Triton se laisse mourir de chagrin !! Hahaha !
Lorsqu'il retourna dans la chambre de sa bien-aimée, Triton la découvra inerte. Son cœur battait à peine et ses yeux fixaient le vide.
Devant cette épouvantable vision, le roi s'effondra en sanglots.
-Athéna, non ! Réponds-moi, parle-moi je t'en supplie ! Tu ne peux pas me laisser. Penses à notre bébé, penses à notre émerveillement lorsqu'il ouvrira les yeux pour la première fois ! Tu ne peux pas me quitter.
Mais la sirène resta muette à son appel. Sur sa joue perlait une larme de désespoir.