- Kiwii a écrit:
Oh mais je suis entièrement d'accord avec toi. DLRP tent à devenir quelquonque. Mais que veux-tu ? Je me dis qu'après tout, c'est dans l'air du temps, devenir banal. Pourquoi Disneyland changerait la donne ?
Réponse: je reposte le
développement de Discoveryland (1985-1995), partie de mon dernier post sur le sujet "
Hommage à Space Mountain: de la Terre à la Lune".
Beaucoup de gens parlent de la magie qui enveloppe le
visiteur de Discoveryland sans chercher plus loin les raisons
et les secrets de ce Land, aussi réussi et abouti que Frontierland
en fait du point de vue de la conception, mais chose souvent ignorée.
Lors de la conception d'Euro Disneyland dans les années quatre-vingt, vous le savez, le parc a été entièrement repensé pour surpasser en
touspoints les autres royaumes enchantés. Tim Delaney, chargé
de la conception du Tomorrowland français, et Tony Baxter,
chef du projet Euro Disneyland, eurent l'idée de renover le
concept Tomorrowland en proposant vous le savez aussi
un rétro-futur, ou le futur vu par le passé
(en l'occurence le XIXème siècle).
Le constat en 1986, au tout début du projet, était alors le suivant:
dès qu'un
Tomorrowand ouvrait, ou sortait d'un placemaking
de remise à jour (le problème avec le futur, c'est qu'il se démode
très vite), les modes changeant, le Land se trouvait alors
tout de suite dépassé et perdait en crédibilité, puisque
basé sur une vision de l'avenir elle aussi dépassée.
Discoveryland proposerait donc au visiteur un futur indémodable, un
"lieu hors du temps", puisque élément d'une vision passée du
futur, donc utopique et dénuée de réalisme pour les générations
actuelles.
DISCOVERYLAND: 1er coup de génie de DelaneyLe choix fut donc fait. L'architecture du Land devrait donc suivre
celle d'une ville du futur vue par le siècle des visionnaires (en réalité
une exposition universelle, vous comprendrez pourquoi à la fin de ce post), à qui il rendrait hommage. Un style architecural qu'on pourrait qualifier de
style "wagnero-victo-vernien romantique" donnerait l'apparence de ce lieu fou, un style hors du temps pour un lieu mi-passé mi avenir fantastique.
Wagnerien, tout d'abord, car cette architecture iréaliste est très fluide, plus ou moins chargée selon le mouvement des lignes définissant les formes des bâtiments, telle un partition de musique: douce et
agréable à la fois. Des inspirations wagnériennes vont d'ailleurs
servir pour les bandes musicales audibles autour de
Space Mountain,
et contriburont au caractère romantique du Land (j'en
reparle dans peu de temps).
Victorien, car Discoveryland ne rompt pas avec Main Street
du point de vue encore une fois de l'esthétisme (et construit
une suite logique, Main Street version futur).
Surtout, on utilisera de grosses poutrelles métalliques,
des bâtiments particulièrement hauts ou larges, dans
plus pur style industriel du XIXème siècle.
Vernien, car en hommage à Jules Vernes, les constructions
proposent des formes improbables, foles, une utopie
architecturale qui célèbre l'Impossible avec un grand "I",
le rêve de l'incroyable et des "voyages extraordinaires".
Romantique, élément très important, car nous sommes au
XIXème siècle,du moins dans son futur utopique, et tout
est à la fois doux et agité, l'homme n'est plus seul face
à la nature, mais face au rêve, et à la
réalisation de l'impossible. Les bandes sons de
SpaceMountain (1995-2005) ou du Visionarium vont dans ce
sens, donnent une dimension irréaliste au Land (perseption
des sens, travail sur l'inconscient collectif et émotionel),
comme dans un véritable film, où l'aventure n'est jamais
totale sans une musique magistrale. Quoi de plus
romantique que Wagner?
Introduction thématiqueDans la
Discovery Arcade,
vous trouvez ainsi des dessins repésentant des grandes villes
américaines à la fin du XXème siècle vues par le XIXème siècle,
et présentant cette fameuse architecture composée de poutrelles metalliques et de constructions gigantesques. Un invitation au visiteur:
"
ce que vous voyez là, vous allez pouvoir le vivre, en vrai!". La transition se fait en douceur, le visiteur sort de l'allée couverte et trouve alors devant lui des éléments tout droit sortis des concepts qu'il a pu admirer.
Discoveryland répondant encore une fois esthétiquement comme une suite
logique à Main Street, "version futur façon XIXème siècle", il pas de
choque le visiteur comme on il peut le faire pour les Tomorrowland, ces derniers tranchant radicalement avec l'avenue principale du parc au point de perdre toute valeur architecturale durable (d'où les placemakings successifs).
Un Pays: deux attractions pharesL'exposition universelle de Paris, 1900. Rappelons que le XXème commençant le 1er Janvier 1901, nous sommes donc la dernière année du XIXème siècle. Une des bases de l'histoire du Visonarium. Discoveryland est en réalité le futur utopique de cette exposition, présentant des attractions impossible à réaliser à l'époque, faute de technologie adéquate, répondant aux mêmes caractéristiques architecurales qui ont toute fois évolué: le futur est plus fou, et se permet tout. Mais pourtant là: créant ainsi une désorientation du visiteur, amené à se poser cette question: suis-je dans le futur ou dans le passé? Ni l'un, ni l'autre.
La thématique du pays, l'esprit de la conquête de l'impossible, chère aux
visonnaires, s'enroule autour de deux attractions de cette
exposition universelle du futur passé. Une proposant un voyage à
travers le temps, s'inspirant de l'oeuvre de l'écrivain britanque Herbert
G Wells (
le Visonarium) et une autre proposant un voyage de la Terre à
la Lune (
Space Mountain bien sûr), tout droit sortie du roman de Jules Vernes. Voyager vers la Lune?
C'est désormais possible. Quand l'impossible devient possible: la
fantaisie devient réalité: Discoveryland. Georges Méliès semble avoir
contribué à la création du Land, ce pionnier du cinéma, dont la Lune
visible dans un de ses films est présente dans
Space Mountain, ultime
touche de fantaisie et de rêve. Les expositions célèbraient jusqu'aux
limites du possibles l'intelligence humaine et l'industrie, celle-ci
brave tout simplement le vraisemblable: on rêve, on nage
dans l'invraisemblable.
Pour créer la magie, les imagineers vont appronfondir le travail sur l'inconscient du visiteur, en élargissant son champs de vision comme au cinéma (Disneyland étant constuit comme un plateau de cinéma), où le visiteur devient acteur d'un film: ce qu'il voit à l'écran d'habitude, il va le vivre à Discoveryland.
Prenons un exemple: Sur
Main Street, la
Flower Street et la
market Streetcoupent la rue principale du parc. La profondeur créée par ces deux
petites impasses va accentuer l'illusion selon laquelle Main Street est
une véritable rue américaine du début du XIXème siècle: le visiteur
voit de ses yeux ce qu'il il ne peut que croire par conséquant: c'est
réel.
Et bien ici, la profondeur thématique va vivre grâce à
un jeu entre
Space Mountain et le Visionarium, communicant une même architecture, une musique très proche (sur des bases wagnériennes encore une fois, comme les extraits de la Bande son originale de Krull par exemple), se complètent aussi au niveau de l'état d'esprit qu'elles développent, toujours le même: la conquête de l'impossible.
Cette phrase de Jules Vernes, que vous connaissez tous, l'illustre bien,
et sera d'ailleurs pronocée lors du discours de présentation du Land: "
Ce qu'un homme peut rêver, un autre peut l'accomplir". Le leitmotiv thématique du Land.
Une phrase dans le film du Visionarium accentuait cette profondeur:
rappelez-vous cette réplique d'Herbert Wells à Jules Vernes: "Je n'ai pas
plus voyagé à travers le temps que vous de la Terre à la Lune". Ces deux
aventures sont possibles à l'exposition universelle de Discoveryland,
et combien de visiteurs s'écriaient alors, émerveillés, "On en vient de
la Lune!".
Vous me direz alors: en 92,
Space n'existait pas.
Justement, en 1992, le gros du travail sur Discovery
Mountain Paris,
destiné à devenir
Space Mountain: de la Terre à la Lune, était
fait. Tout avait été pensé: des concepts arts furent présentés aux
télévisions du monde entier, seuls manquaient les budgets nécessaires,
on reporta donc l'ouverture de "l'attaction visonnaires N°2". Le pays ne
fut donc complet qu'en 1995, à l'ouverture de "l'attraction la plus
sensationnelle de l'univers".