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Quelques éléments de réponse pour ma part :
Je pense que les exclusivités doivent coexister avec les copies et que plusieurs critères entrent en ligne de compte (que je vais tenter d'exposer pour aborder de l'eau au moulin du débat). Je dirai que chez Disney, c'est encore assez bien équilibré.
1. Le Coût
Pour une entreprise qui possède 12 parcs dans le monde qui s'adressent à 4 marchés, la quantité de personnes qui sont présentes dans les 4 marchés est insignifiante (peut-être moins insignifiant entre les deux marchés américains). La partie conception d'un land ou d'une attraction coûte très cher et peut prendre parfois des années voir une décennie. D'ailleurs, quand on parle d'exclusivité, on oublie parfois que WDI c'est une grosse base de blue sky concept dont certains sont très vieux et qui peuvent revenir sur le tapis sous une autre forme. Cela est le cas pour les idées comme pour les ride systems. Comme cela coûte cher, il devient indispensable pour une société de cette taille de créer de la synergie dans les coûts pour faire des économies (mettre en commun la phase de conception).
On remarquera qu'il y a un double tranchant à cela. Le fait de mettre en commun la matière grise/la créativité fait que nécessairement, un même groupe (ici la WDI) doit s'occuper de tous les parcs du groupe et plus y'en a (des parcs), plus la structure est grosse et plus la structure est grosse, plus elle perd en efficacité et devient chère à entretenir. C'est pourquoi certains groupes qui possèdent de nombreux parcs, ne fusionnent pas nécessairement la R&D de tous leurs parcs et préfèrent garder les projets exclusifs, indépendants en les sous-traitant localement plutôt que de créer une mega-structure qui aura tout en charge et pourra capitaliser sur un patrimoine. Mais chez Disney, la sous-traitance des idées a toujours été exclus car Disney doit rester maître de la qualité de ce qui est produit (pour son image). Donc même OLC doit commander ses attractions à la WDC.
Du coup, ce département coûte très très cher et les coûts de conception des attractions s'envolent et on se retrouve souvent à comparer le coût d'une attraction de la WDI avec celui d'un autre parc plus petit comme par exemple Efteling qui n'a que lui-même à gérer, en oubliant que la WDI fait face à une complexité plus importante. En tous cas, plus une attraction est dupliquée, plus un même investissement de conception générera des bénéfices le rendant ainsi plus rentable. La copie est donc d'abord une nécessité de coût.
2. L'exclusivité comme projet pilote
Mais dupliquer c'est bien joli, il faut bien qu'il y est quelque chose à dupliquer à la base. Depuis récemment, on commence à créer des "copies" ou des projets jumeaux dès la naissance (comme Star Wars: Galaxy's Edge, Avengers Campus ou Frozen), un peu comme les navires de croisières qui ont souvent un "sistership" pour rentabiliser la conception.
Mais cette méthode représente forcément un risque : le double échec. Si un land ou attraction n'est pas réussi, c'est trop tard, il sera fait en deux fois. D'où le fait que Disney ne prend se risque que sur des licences fortes pour limiter ce risque. Mais historiquement, les duplications se sont souvent faites à posteriori (notamment la duplication des royaumes enchantés et des grands classiques de Disney). Pour pouvoir dupliquer, il est nécessaire, de temps en temps, de produire des exclusivités (qui ne le seront plus à terme) comme pilote sur le marché, pour "tester" le produit dans un parc. Puis si cela fonctionne du tonnerre, on peut le dupliquer en prenant peu de risque. En gros, on copie les "valeurs sûres" (aussi bien terme de succès auprès du grand public que comme réussite en terme d'exploitation puisqu'on a déjà vu Disney rechigner à dupliquer une attraction car elle posait des problèmes de maintenances dans sa première version).
Copier les valeurs sûres, c'est un peu jouer la carte de la sécurité comme quand les studios décident de faire une suite à une licence à succès plutôt que de sortir une oeuvre originale. Quand on y pense, le même sujet peut se poser entre le fait de faire des suites/remakes VS faire du neuf. C'est un peu le même sujet qu'on a mais transposé aux parcs
3. Localisation
Parfois, l'exclusivité est plus une affaire de coutume locale. HK Disneyland a eu le droit à Mystic Manor car les fantômes ne sont pas vus de la même manière dans la culture chinoise par rapport à la culture occidentale. Cela aurait été vu comme irrespectueux. Il y a aussi la question des droits (par exemple, Disney ne peut pas faire d'attractions Marvel du côté est du Mississipi (?)). Et les pirates à Hong-Kong, apparemment, c'était trop sensible comme sujet.
Un bon cas d'école : à l'époque, un ride "Western Adventure" avait été imaginé pour remplacer Pirates des Caraïbes au Magic Kingdom. On estimait que les pirates, ce n'était pas assez exotique pour la côte est. Finalement, il a été dupliqué, car tout le monde demandait "où est le rides des pirates ?".
Donc parfois, faire une exclusivité, c'est juste une histoire de localisation : parce que le parc est là à cet endroit, alors il faut s'adapter au public local et se poser la question si ce ride peut y être dupliqué ou inversement, si une franchise qui a du succès localement n'aurait pas plus de sens.
A mon avis, c'est ce qui a motivé le choix du Roi Lion. Gros gros succès ici en Europe. Aux US aussi, mais ils ont l'air carrément plus à fond dans Moana par exemple, donc pour eux ça sera Moana.
4. Ecologie
Un argument en faveur de la duplication des rides est l'écologie. On y pense peu et je serai mal placé pour faire la leçon vu que je prends souvent l'avion et fais des croisières. L'exclusivité a une connotation forcément positive car cela permet au parc qui la possède d'avoir une identité qui lui est propre (ce qui s'éloigne un peu de la tendance de la mondialisation à tout uniformiser) et c'est encore plus vrai quand c'est lié à de la localisation (c'est-à-dire que l'exclusivité s'adapte à la culture locale, lui rend hommage). Mais d'un autre côté, l'exclusivité incite au voyage, le justifie. A l'inverse, la duplication permet de le limiter. En gros, si on veut polluer moins, il faut voyager moins loin et donc mettre à disposition des Européens les gros hits qui donnent envie comme Pandora, Avatar ou Harry Potter chez Universal sur leur territoire (en particulier ceux de la culture populaire qui elle, n'est pas le fait de la localisation), va forcément diminuer l'attractivité d'un resort étranger et limiter le nombre de personnes qui sautent le pas de réserver un voyage intercontinental. Donc ça va aussi dans le bon sens écologiquement parlant.
Bien sûr cela est à mettre en relation avec le premier point sur la quantité de personne à l'intersection de plusieurs marchés. S'il est insignifiant, alors l'impact écologique de l'exclusivité est insignifiant. Par contre, s'il est significatif (je peux très bien me tromper), cela peut être un vrai sujet.
Mais si dans ce cas la copie est un avantage pour la planète, pour l'entreprise en revanche, cela signifie que l'autre resort qui reçoit la duplication risque de cannibaliser les attendances de celui qui est copié. Si le groupe décide quand même de faire la copie, c'est qu'il estime sûrement que cette cannibalisation est minime au regard d'une bénéfice de la synergie des coûts.
Je n'ai pas mentionné dans mes points (ou brièvement), les copies avec modifications (les variantes) : oui on a un château différent, mais on a un château comme tous les royaumes enchantés qui est donc un concept dupliqué. Les Manoirs hantés sont tous différents mais en même temps dupliqués. Les Tours de la Terreur aussi (depuis que Disney California Adventure a transformé la sienne en Gotg). Donc il faut aussi dire à quel point de différence estime-t-on qu'un ride est une exclusivité.
Voilà, je pensais pas disserter aussi longtemps mais finalement ça m'a pris une bonne heure je pense !