J'avais beaucoup aimé la saison 1 qui introduisait de nouveaux personnages intéressants et une toile de fond très prometteuse et cette saison 2 a été un pur régal à suivre du début à la fin. L'univers continue de s'enrichir, le fan-service est bien géré, l'émotion fait mouche et certains épisodes m'ont offert parmi les plus gros frissons que la licence a pu m'apporter ces 10-15 dernières années.
Une fois n'est pas coutume, j'ai eu envie d'écrire un avis personnel sur cette nouvelle saison.
CRITIQUE (SPOILERS) :
Telle est la voie. La phrase à laquelle s'accroche Din Djarin pour tracer son chemin dans la galaxie et que
Jon Favreau s'est promis de déconstruire dans cette deuxième saison pour que son héros puisse se libérer de ses entraves. Depuis qu'il a décidé de son plein gré de renoncer à ses engagements en sauvant l'enfant des mains des impériaux, le Mandalorien a sans le savoir franchi un pas décisif. De nature obéissante et impassible, il se découvre un libre arbitre qui lui était jusqu'alors refusé par son crédo et va se lancer dans un long questionnement intérieur. Tout comme le bébé qu'il a sous sa garde, rien ne détermine à l'avance son destin. En partant à la recherche d'un Jedi à qui il doit remettre son petit protégé, c'est une nouvelle conscience qui émerge chez lui ainsi qu'une meilleure compréhension du monde. Les clés lui sont données progressivement pour qu'il élargisse sa vision de l'univers
Star Wars en même temps que le spectateur qui, lui, en apprend davantage sur cette période encore nébuleuse.
Sous la caméra de
Favreau lui-même, Mando revient au sommet de sa forme, dans un premier épisode spectaculaire, aux prises avec un Dragon Krayt. Réintroduit en beauté, c'est par la suite que le personnage va s'humaniser de plus en plus grâce à ses nombreuses rencontres. Tandis que la saison 1 explorait sa personnalité en fonction des individus avec qui il s'alliait (son dévouement avec les villageois, son expérience avec les assassins), la saison 2 va éclaircir les zones d'ombres sur la Tribu qui l'a recueillie et sur sa moralité. Un premier twist très malin nous révèle sa véritable affiliation, apportant à la fois un autre point de vue sur sa façon de penser radicale (les dogmes établis dans la série dont la provenance restait inconnue) et plusieurs possibilités quant à la manière dont il devra s'émanciper dans le futur. Mais c'est sa relation avec son minuscule compagnon de route qui va constituer le coeur de l'histoire.
Alors qu'il le transportait à ses débuts comme un poids mort, le Mandalorien cesse lentement d'étiqueter le bébé pour accepter le lien qui l'unie à lui. Il n'est plus un colis ou un objectif de mission mais bien son enfant et ce grâce à un seul mot : Grogu. Dès l'instant où son vrai nom est enfin prononcé, cela a l'effet d'un réveil pour son protecteur qui répond à son instinct paternel. Les éléments présentés prennent tout leur sens (le running gag de la boule du levier, le vaisseau qui sert de maison, la communication entre les deux souvent difficile, l'absence de distinction entre le bien et le mal qui peut pousser ce petit être inoffensif à étrangler un quidam) et Din Djarin gagne fortement en épaisseur, n'hésitant pas à enfreindre les règles pour sauver ce qu'il considère comme étant son fils et à oublier son éducation d'extrémiste. Ses deux retraits du casque sont par ailleurs l'occasion pour
Pedro Pascal de montrer l'étendue de son talent même pour seulement quelques minutes, dévoilant la réelle fragilité de Mando qui se ressent au-delà de sa voix.
La saison 2 de
The Mandalorian est également un moyen pour
Lucasfilm d'entrer dans une phase capitale et non moins risquée pour les années à venir, celle du cross-média. Là où la première saison restait modérée, la nouvelle crée une infinité de ponts en voyant Mando côtoyer les plus grandes légendes de
Star Wars, des plus anciennes aux plus récentes. Si le démarrage se fait en douceur avec le marshal Cobb Vanth, joué par un sympathique
Timothy Olyphant et issu des romans
Aftermath; les choses sérieuses commencent avec l'arrivée de Bo-Katan Kryze qui vient affirmer la continuité directe avec
The Clone Wars et
Star Wars Rebels. Après lui avoir prêté sa voix dans les deux séries animées,
Katee Sackhoff joue la leader des Nite Owls en chair et en os et retranscrit tout naturellement l'orgueil et l'assurance du personnage, toujours résolu à reconquérir Mandalore. Sa venue installe des pistes d'ores et déjà prometteuses concernant les tensions entre les clans, dues au nouveau détenteur du sabre noir.
Mais c'est le treizième chapitre qui renoue définitivement avec la magie originelle de
Star Wars puisque le fils spirituel de
George Lucas y baptise la création dont il est le plus fier, Ahsoka Tano. Plus endurcie que jamais, la Togruta est interprétée pour la première fois en live action par une
Rosario Dawson habitée et méconnaissable qui resplendit à chacune de ses apparitions. Sa présence solaire correspond à l'idéal que la saga a longtemps fait des Jedi,
Dave Filoni la filmant telle une chevalière errante coupée de son peuple et de la politique, désintéressée et consacrant sa vie à aider les opprimés. Tout en subtilité, l'actrice parvient à montrer le visage désabusé de cette survivante qui ne partage ses blessures avec personne tandis que le réalisateur la met dans une position où elle retrouve les mérites de son enseignement.
Filoni l'utilise avec énormément d'ingéniosité autant pour lever le voile sur les origines de Grogu que pour faire évoluer Din Djarin, total étranger à la Force et à ceux qui la ressentent. Une rencontre qui nous ramène aux premiers pas dans
La Guerre des Étoiles entre Luke et Obi-Wan.
Dans un genre plus empoté, la grosse gâterie est le retour de Boba Fett, second couteau sous-exploité dans les films mais élevé au rang de personnage culte dans l'
UE. Si
Robert Rodriguez signe l'épisode le plus moche esthétiquement parlant, le tournage s'étant déroulé dans la précipitation, le cinéaste se rattrape néanmoins sur la représentation de Fett durant ce chapitre très musclé. Descendu de son piédestal, le chasseur de primes doit littéralement se battre pour reprendre son statut et justifier sa popularité.
Rodriguez fait le choix de s'éloigner de l'image de l'exécutant silencieux pour en faire un prédateur enragé et le résultat est payant. Avec ou sans armure, les combats l'impliquant sont d'une violence rarement vue dans la franchise et la sauvagerie des coups ne manque pas de faire sursauter.
Temuera Morrison hérite légitimement du rôle, ayant campé Jango Fett et les clones dans la
Prélogie, et son idée de mélanger sa culture maorie aux techniques martiales renforce la bestialité de ce revenant de l'ancienne trilogie.
Favreau et
Filoni embrassent l'héritage de l'
Univers Étendu mais ne se limitent pas à des allusions faciles pour le faire vivre. Le clou du spectacle a beau être bien évidemment l'intervention héroïque de Luke Skywalker durant une séquence de sauvetage iconique, son caméo est une fausse surprise puisqu'il n'est que la conséquence logique du teasing préparé depuis la saison 1. Tout en connectant fermement les dérivés de la licence entre eux, son moment de bravoure pose un douloureux contrecoup en séparant un père de son fils car telle est la philosophie de l'Ordre que suit le maître Jedi. Les adieux, même s'ils ne sont probablement que temporaires, sont déchirants et prouvent que l'attachement du public n'est pas faussé par des échos nostalgiques mais qu'il est bien dû à ces passages de pure humanité qui ont toujours cimenté les récits de
Star Wars. Assurément un bon coordinateur,
Favreau arrive à tirer du bon de ses collaborateurs, y compris
Peyton Reed qui a la charge du finale season.
Revenus de la première saison,
Bryce Dallas Howard et
Rick Famuyiwa livrent des épisodes carrés et bien construits tout comme
Carl Weathers, chacun parvenant à s'axer sur des thèmes qui étoffent le contexte (les retrouvailles d'un couple ordinaire, le rétablissement d'une ville, les traumatismes causés par la guerre). Des arcs sont prolongés pour suivre les répercussions des actions du Mandalorien (la Nouvelle République qui reste aux aguets, la survie de Fennec Shand, la rédemption de Mayfeld) et d'autres annoncent des événements de grande ampleur (Thrawn toujours en activité, les expériences de clonage). Sans que ça soit novateur et toute proportion gardée,
Favreau et
Filoni savent faire preuve d'audace au sein de la série quand cela vient aider la narration (la transition au 16/9 pour l'attaque du Dragon, la destruction du Razor Crest, Grogu absent de tout le Chapitre 15) et les petites déceptions sont pardonnables (le duel avec Moff Gideon conduisant à relancer le suspense jusqu'à la prochaine saison) car soit minimes soit rattrapables.
Avec ces 8 nouveaux épisodes,
The Mandalorian monte de plusieurs crans en émotion et en grand spectacle, s'inscrivant comme le successeur de
The Clone Wars et de
Star Wars Rebels tout en ne perdant pas son identité et son âme propre. En dépit de ses petits couacs, la série sait être généreuse, honnête, accessible et il y a fort à parier que Din Djarin et Grogu deviendront un duo emblématique de l'univers
Star Wars, s'ils ne le sont pas déjà devenus.