|
|
| [Fan-fiction] - La Dernière Alliance | |
| Auteur | Message |
---|
Lexias
Âge : 31 Messages : 11 Inscription : 27/08/2013
| Sujet: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Mar 27 Aoû 2013 - 22:35 | |
| Voici une fiction qui provient d'une idée que j'ai eu il y a longtemps et que j'ai finalement concrétisé sur le papier (ou via le clavier, question de point de vue).
Il s'agit d'une fiction regroupant plusieurs univers et héros des films Disney. Ces univers ne correspondent surement pas en terme de chronologie mais essayons de passer outre cela. ^^ Je ne peux pas faire intervenir tous les personnages issus des films Disney (de plus, je compte faire intervenir quelques personnages mémorables issues de films animés qu'on pourrait qualifier de concurrents.
La base reste les Disney, néanmoins. Même si je compte bidouiller certains aspects et notamment l'affiliation de certains personnages.
Mais trêve de bavardages ! Je vous laisse lire ce premier chapitre en espérant qu'il vous plaira et que vous n'hésiterez pas à donner vos avis. Ils sont tous bon à prendre. Les remarques sur l'orthographe, la grammaire et d’éventuels erreurs sont les bienvenues.
Bonne lecture !! =)
_____________________________________________ Synopsis
Alors qu'un ancien mal foule la Terre, des héros sont amenés à coopérer ensemble pour éliminer cette menace une bonne fois pour toute. Les événements qu'ils vont déclencher vont profondément changer le monde._____________________________________________ - Chapitre 1- L'épreuve de l'apprenti:
Chapitre 1 – L’épreuve de l’apprenti
Depuis des mois, il faisait toujours le même rêve. Il courait dans des plaines brulées, grises et désolés. Autour de lui, tout n’était que cendres et ruines. A l’horizon, se dessinait alors une immense ligne sombre. Plus sa course se poursuivait, plus la ligne au loin devenait plus nette. Un gigantesque mur de pierres de plusieurs mètres qui s’étendait sur tout ce qui pouvait englober sa vision. Il n’avait aucune porte. Le haut de la muraille était désert et le silence régnait autour de lui. Arrivé au pied du gigantesque mur, il se passait exactement la même chose. Il voulait grimper, aller au-delà de la muraille de pierre. Il sentait le danger dans son dos alors que la terre grondait sous ses pieds. Derrière lui, une vague enflammée rasait les zones désolées. Les flammes avaient des allures d’étalons sauvages et frappaient le sol de leurs sabots projetant de la lave à chaque impact. La vague de feu se rapprochait peu à peu et il se trouvait toujours au pied du mur. Les chevaux de flammes le chargeaient hennissant et crachant l’enfer. A chaque fois qu’il tentait de grimper le mur, chaque tentative le ramenait au sol. La mer de feu l’engloutissait finalement, le brûlait et le consumait. Aladdin se réveilla en sursaut. Des perles de sueurs coulaient sur ses tempes. Il se frotta les yeux et souffla un bon coup. Le même rêve depuis des mois et chaque nuit il semblait le revivre pour la première fois. Ses nuits avaient été tourmentées à cause de ses sombres rêves. Il bailla longuement. Ses paupières étaient lourdes et sa fatigue était grande. Le même mécanisme diabolique s’enclenchait chaque nuit, ses cauchemars l’empêchaient de dormir et une fois réveillé, il ne pouvait plus trouver le sommeil. Un rayon de soleil traversa les rideaux de la chambre. Cela rassura Aladdin quelque peu, il s’était réveillé avec le soleil et non au beau milieu de la nuit. Il baissa le regard sur son épouse, la Princesse Jasmine, qui était toujours quant à elle dans les bras de Morphée et dormait paisiblement enveloppée dans ses draps de soie. Aladdin la regarda tendrement en espérant que ses rêves soient plus doux que les siens. Il se leva du lit sans faire de bruit et se dirigea vers le balcon. Le soleil émergeait des dunes de sable à l’horizon et sa lumière s’étendait sur tout Agrabah. L’ancien malfrat des rues s’appuya sur la balustrade en pierre du balcon qui dominait toute la ville. Il posa ses yeux sur la ville et ses habitations. Il apercevait des silhouettes au loin entre les allées et les rues de la cité : des marchands, des mendiants, des familles, des soldats, des voleurs. Tant de choses avaient changé pour lui, le voleur, le crève-la-faim, le vaurien. Aladdin avait passé toute sa vie à contempler le palais du sultan depuis son foyer délabré, rêvant de meilleurs jours pour lui et Abu. Les deux démunis qu’ils étaient ne pouvaient se nourrir que de rêves, de serviles domestiques, de prodigieux festins et d’innombrables montagnes d’or. Aujourd’hui, Aladdin vivait au palais, avait pour épouse la fille du sultan et il avait tout ce qu’il avait désiré depuis son enfance. Pourtant ses nuits étaient pleines de cauchemars et une certaine angoisse le rongeait le jour. En épousant Jasmine, il avait également accepté une destinée encore plus grande. Un jour viendra où il devra devenir sultan d’Agrabah. Depuis qu’il était revenu de son voyage de noces, la vie d’Aladdin se résumait à l’apprentissage du pouvoir. Jasmine et le Sultan avaient tout fait pour l’initier à la politique, à l’économie et aux mœurs des Sept Déserts. Mais ses devoirs l’épuisaient et l’ennuyaient. Au fur et à mesure que ses leçons avançaient, il craignait de ne pas être à la hauteur de cette tâche. Parfois, il regrettait presque sa vie de malfrat tant les responsabilités de sultan lui semblaient lourdes. Au loin, il voyait son ancienne maison, un endroit sombre et triste en ruines, traversé par les vents froids du désert. C’était là où il avait grandi, elle lui rappelait de bons et de mauvais moments. Il aimait revenir dans son ancien foyer entre deux leçons en espérant que cela le rassurerait et l’encouragerait dans son apprentissage. Mais il revenait encore plus troublé et déprimé qu’auparavant. Il partageait sa peine avec Jasmine, et celle-ci l’aidait autant qu’elle le pouvait, le consolant et l’encourageant dans tous ses travaux. La vie au palais était moins animée depuis quelques temps. Iago, le perroquet braillard, était parti avec Cassim, son père peu de temps après son mariage avec Jasmine. Après le retour de leur voyage de noces, le Génie et le Tapis partirent pour un long voyage autour du monde. Le palais paraissait plus triste depuis leur départ. Abu était resté avec Aladdin mais avec le jeune homme passait plus de temps avec de vieux érudits et de sombres professeurs qu’avec son compère simien. Ce dernier passait ses journées à gambader dans les jardins du palais en compagnie du tigre de compagnie de la princesse, Rajah ou bien il se rendait au marché pour chaparder quelques fruits savoureux à des marchands de passage. La vie était bien différente depuis ces six derniers mois et Aladdin avait la nostalgie de ces jours où lui et sa bande partaient à l’aventure dans des contrées lointaines bravant le danger et l’inconnu. Il ne devait pas penser à ça. Pas aujourd’hui. Ce jour était spécial. Les dirigeants des Sept Déserts se réunissaient à Agrabah pour traiter d’affaires urgentes et en tant que futur souverain, il se devait de participer à la rencontre. Cet évènement important allait être sa première épreuve en tant que futur sultan. Il devait faire bonne impression et son cœur balançait entre la peur et la confiance. Il inspira et expira longuement profitant de la brise matinale porté par le vent quand une voix l’interpella dans son dos : -Toujours aussi matinal. Aladdin se retourna pour voir Jasmine s’avancer sur le balcon, un fin sourire aux lèvres. -Je suis désolé, dit-il embarrassé. J’espère que je ne t’ai pas réveillé. -Non, ne t’inquiètes pas, j’ai suffisamment dormi. Aladdin reporta son attention sur la cité d’Agrabah alors que la Princesse arriva à ses côtés et posa sa tête sur l’épaule de son époux. D’un simple regard, Jasmine vit la détresse du jeune homme. Elle lisait en lui comme dans un livre ouvert. Jasmine prit la main de son mari et la serra tendrement en murmurant doucement : -Tout va bien se passer. Aladdin étouffa un petit rire gêné. -J’ai beau me le répéter sans cesse. Dit-il. Je suis toujours aussi angoissé. J’ai tellement envie de bien faire, Jasmine. -Tu y arriveras, répondit-elle en posant sa main sur la joue du brun. Je suis là avec toi. Ce n’est qu’une simple réunion. Tout qu’il faudra faire, c’est accueillir les dignitaires et rester attentif pendant la réunion. Tu dois utiliser ce que tu as appris. Aladdin se creusa la mémoire en essayant de rassembler tout ce qu’il avait pu retenir de ses leçons durant ces six derniers mois. Il en résulta un bourbier d’informations qui lui donna presque le mal de tête. -En espérant que tu aies raison que tout se passe bien et sans imprévu. Jasmine lui sourit. Aladdin ne pouvait résister aux yeux noisette et pétillants de la Princesse. Il l’embrassa et ils s’enlacèrent. Toutes les heures passées à étudier la géopolitique de l’Arabie, c’était également pour elle. Jasmine était elle aussi appelée à détenir les rênes du pouvoir à Agrabah. Si Aladdin devait régner alors ils règneraient à deux. A cette pensée, son cœur fut alors un peu plus léger. ***
Cela faisait six jours qu’il errait dans le désert. Mais il avait plus ou moins perdu la notion du temps. Cela paraissait une éternité pour lui. Les journées passaient sous un soleil de plomb et dès la tombée de la nuit, un vent glacial glissait sur les dunes ensablées. Son seul objectif était de traverser l’immense mer de sable et il devait s’y tenir. Cela faisait partie de son entrainement. Il avait vidé sa dernière gourde ce matin et terminé ce qui lui restait de nourriture. Il marchait, piétinait le sable avec ses sandales regardant toujours devant lui. Il ne déviait point de sa route, poursuivant en ligne droit depuis son réveil. La veille, il avait trouvé un rocher qui émergeait d’une dune et avait pu prendre un peu de repos à l’ombre de la pierre. Il avait passé la nuit sous le roc et avait repris la route à l’aurore. Quatre heures s’étaient écoulés depuis son réveil. Ou peut-être cinq. Il avait perdu la notion du temps. Sa bouche était sèche, aride alors que la sueur ruisselait sur son front et son torse. Elle lui piquait les yeux. Il essuya son visage avec ses mains et accéléra le pas. Son corps ne répondit pas, ses jambes et lourdes et ses bras relâchés se balançaient de chaque côté de son torse. Il regarda autour de lui. Aucune oasis en vue, aucune silhouette ou caravane qui serpenterait au loin entre les dunes. Il chercha désespérément quelque chose entre les vagues de sable pour l’aiguiller. Aucune ville ou village à l’horizon. Il espérait trouver un puits derrière chaque dune qu’il escaladait. La soif le harassait et sa faim le tenaillait. Cela faisait cinq jours qu’il n’avait vu que du sable et le ciel bleu privé de nuage. Finalement c’était peut-être six jours. Ou sept … Il avait perdu la notion du temps. Il leva les yeux au ciel et vit une ombre ailée voler en cercle au-dessus de lui. Ils veillaient toujours sur lui. Il ne devait pas les décevoir. Cela le poussa à continuer, il reprit sa course, surmontant la soif, la faim et la douleur alors que l’ombre ailée le suivait dans son périple. Il poursuivit sa traversée du désert pendant deux bonnes heures. Ou peut-être trois … Il avait perdu tout notion du temps. Alors que le soleil avait atteint son zénith et que ses rayons faisaient bouillir le sol, il succomba à la chaleur et s’écroula sur le sable brûlant. Sa respiration était saccadée, l’air qu’il inspirait était lourd, chaud et étouffant. Sa vision se troublait et ses membres s’engourdissaient. Il resta quelques instants allongé les yeux à semi-ouverts pour ne pas perdre connaissance alors que l’ombre ailée qui l’accompagnait descendit en cercle vers le sol. Il entendit alors une voix : -Allez petit ! Relève-toi !! Il leva les yeux et vit un cheval blanc ailé à la crinière et queue bleue qui battait le sable avec ses sabots. Sur la monture ailée, un satyre nain grassouillet aux petits yeux le regardait avec un air sévère. Affaibli par la chaleur, n’importe qui aurait cru à une hallucination mais il connaissait parfaitement la monture ailée et son petit cavalier. -M’oblige pas à descendre du canasson !! -Phil … dit-il. Je … je … ne pourrais … pas aller plus loin … Il entendit de petits sabots s’enfoncer dans le sable et s’approcher rapidement de lui. -Baisse pas les bras !! s’écria Phil. Tu crois qu’Achille aurait abandonné pour un petit coup de chaud ?! Non !! Et Jason !! Il aurait rassemblé … -Je ne suis pas … eux … Phil. Le cheval ailé hennit pour approuver le jeune homme tandis que le satyre fit une grimace. -Règle 258 : Un héros doit pouvoir survivre dans des conditions extrêmes ! Déclara le satyre. Cela fait partie de ton entrainement, Herc. Tu dois accomplir la traversée du désert sans aide ! Le jeune homme reprit lentement sa respiration et prit appui sur ses coudes pour se relever. Il avait l’impression que le sol tanguait sous ses pieds. Pégase, son cheval ailé, se plaça à ses côtés et le soutint pour l’empêcher de chuter de nouveau ce qui lui valut un regard désapprobateur de Phil. -Ce n’est pas comme ça que ça marche ! s’écria le satyre. Je suis ton entraineur et je te le dis, ce n’est pas comme cela que tu pourras espérer devenir un héros. Hercule posa sa tête contre le dos de Pégase et ferma les yeux alors que son torse se bombait à chacune de ses inspirations. L’animal plaça ses ailes immaculées au-dessus du jeune élevé de Philoctète pour lui accorder un peu d’ombre. Pégase souffla par ses nasaux en direction de Philoctète pour le provoquer. Cela le fit enrager : -Je suis ton entraineur !! Et qu’importe ce que pourra dire ton canasson à plumes, tu finiras cette épreuve seul !! -Je suis … d’accord avec toi, Phil … souffla Hercule. -Tu ne m’écoutes jamais de toute façon !! Et puis … Ah … oui ? Tu es d’accord ? Hercule rouvrit les yeux et essuya les gouttes de sueur sur son front. -Je dois finir cet entrainement mais j’aimerais que tu me fasses une faveur. Dit-il. Une seule faveur, Phil. L’entraineur des héros lui porta un regard plein de soupçons et demanda : -Laquelle ? Hercule se remit sur ses jambes et s’approcha du satyre. -Dans quelle direction se trouve le prochain point d’eau ? Philoctète soupira, signe qu’il avait cédé devant son nouvel apprenti, et montra du doigt un rang de dunes éloignées derrière lequel s’élevait un mur rouge et orangé de roc. Aussitôt, rassemblant toutes ses forces et surmontant sa douleur, Hercule partit en courant dans la direction indiquée par Phil. Il hurlait, soit pour se donner du courage, de la force soit pour cacher la souffrance qui l’envahissait. Il courait entre les dunes de sable comme un damné, gardant en tête l’eau qu’il trouverait au-delà de l’horizon. Phil remonta sur Pégase et ils suivirent la trace de l’apprenti héros. Derrière le rang de dunes désigné par Philoctète, se trouvait un fin canyon de roches dans lequel coulait un étroit mais rapide cours d’eau. Hercule atteint et grimpa sur les dunes de sable en un temps record utilisant le reste de ses forces et escala la falaise abrupte. Il arriva au sommet et s’avança jusqu’au précipice, il entendit les remous presque silencieux du cours d’eau qui se mouvait au fond du canyon. Sans hésiter, il sauta dans le gouffre et tomba dans l’eau agitée sous l’œil désabusé de Phil. -Ce petit me tuera un jour … Hercule fut porté par le cours d’eau sur quelques kilomètres. Reposant à la surface de la rivière, soulagé par la fraicheur de l’eau, il ferma les yeux et oublia les rayons assassins du soleil et perdit connaissance. Lorsqu’il revint à lui, il entendit un enchevêtrement de petites voix dont il ne pouvait distinguer les paroles exactes. Il ouvrit les yeux et le soleil l’aveugla. Il vit des silhouettes qui l’observaient et qui murmuraient entre elles. Il cacha le soleil avec sa main et tenta de se relever. -Il est vivant ! -C’est un étranger, je te dis. Il est pas d’ici. Regarde sa tenue. -Ecartez-vous les enfants ! Laissez-le respirer ! Les petites silhouettes s’écartèrent pour laisser place à une forme plus grande qui aida Hercule à se relever. Le jeune homme put enfin distinguer ses sauveurs, il s’agissait d’une femme brune à la peau mât portant une voile bleue délavée et une tunique de la même couleur. Elle regardait l’apprenti héros avec des yeux attentionnés alors que de jeunes enfants s’attroupaient autour d’elle pour observer le rescapé des eaux. -Vous êtes sauf, jeune homme. Hercule regarda autour de lui et vit la rivière qui défilait non loin des enfants qui portaient des seaux en bois à bout de bras. Quelques arbres poussaient le long de la rivière dont le flux s’était adouci. Hercule se frotta les yeux, il était trempé et affamé mais son plongeon dans la rivière l’avait permis de surmonter la chaleur. Il devait maintenant se remettre les idées en place. -Vous m’avez sorti de la rivière ? demanda-t-il. -Oui, répondit la jeune femme avec un sourire. Nous nous y sommes pris à plusieurs pour vous extraire des eaux. Hercule vit alors deux autres femmes qui remplissaient des amphores avec l’eau de la rivière et qui l’observaient en riant. Gêné, le jeune apprenti soutint sa tête et se remémora les évènements qu’il l’avait mené à se jeter dans la rivière. -Je marchais dans le désert … commença le héros. Phil, Pégase … La rivière … -Vous avez été chanceux, les étrangers ne survivent pas longtemps dans le désert. Il était facile de deviner que le jeune gringalet devant eux ne provenait point des Sept Déserts tant ses cheveux roux, sa peau pâle et ses yeux bleus se faisaient rares dans ces régions arides. Il essora sa tunique blanche et alla se rincer le visage à l’eau de la rivière. -Comment tu t’appelles ? demanda naïvement une fillette qui se mouillait les pieds sur la berge. Hercule but une rasade d’eau pour soulager sa soif. Son esprit restait néanmoins embrumé et il répondit : -Herc … Hercule … -C’est bizarre comme nom. Déclara un garçon. -D’où venez-vous, Hercule ? Questionna la femme au voile bleu. Hercule se retourna pour voir où il se trouvait. Il était au pied des murailles d’une cité. La rivière serpentait le long des murs avant de disparaitre à l’horizon. De l’autre côté de l’eau, des falaises rouges s’élevaient pour former un étau dans lequel émergeait la cité du désert. Les murs étaient hauts et Hercule ne pouvait voir aucune habitation. Tout ce qu’il pouvait distinguer était une gigantesque coupole brune qui dominait ce qui lui semblait un palais aux murs d’ivoire. Des rotondes de plus petite taille entouraient la coupole centrale et rendait l’édifice plus superbe et magnifique. -Vous avez perdu votre langue dans le désert ? Plaisanta la femme devant le silence d’Hercule. Hercule reporta son attention sur la femme voilée et vit que les enfants l’entouraient et l’examinaient sur toutes les coutures. L’apprenti héros rougit de gêne et répondit : -Je viens de loin. De loin à l’ouest. De Grèce … -Jamais entendu parler de cette contrée. Répliqua une autre femme au voile brun qui portait une amphore d’eau. -C’est très loin d’ici ? demanda à mi-voix une fillette dissimulée derrière sa mère tant le rescapé des eaux l’intimidait. Si seulement il savait ce qu’était cet « ici ». C’était la seule ville qu’il croisait depuis son périple à travers le désert. Il voulut savoir où était Phil et Pégase. Peut-être étaient-ils à sa recherche. Ils l’avaient surement vu tomber dans la rivière et inspectaient les rivages. Hercule s’assit sur un rocher alors que les enfants et leurs mères l’entouraient. -Qu’est-ce que vous faisiez dans le désert ? demanda une femme. -Je tentais de rejoindre la mer. Dit-il simplement. Ça fait partie de mon entrainement. -Ton entrainement ?! S’étonna un garçon. -Oui, je suis parti de la mer à l’Ouest et je devais traverser le désert et rejoindre la mer à l’Est. Un cri de surprise s’échappa de l’assistance qui regarda le jeune apprenti héros avec des yeux ronds. -Vous avez tenté de traverser le désert d’une seule traite ?! s’écria une mère. -Tout seul ?! s’écria une autre. -C’est de la folie ?! Dit une troisième. -Je te l’avais dit que c’était un fou, murmura un garçon dans l’oreille de son petit frère. Hercule n’avait pas questionné Phil lorsqu’il lui avait fait part de son prochain entrainement. Traverser le désert d’Arabie lui semblait un bon test pour éprouver sa force et repousser ses limites. Mais avec ce qui venait de se passer, Hercule comprit qu’il avait grandement sous-estimé la difficulté de cette tâche. -C’était une folie, concéda la femme au voile bleu. Mais vous n’êtes pas loin de votre but (Elle montra l’aval de la rivière.) Continuer à suivre l’eau sur quelques lieues et elle vous mènera jusqu’à la mer. Hercule regarda par-dessus son épaule le flux tranquille de la rivière qui dépassait les murs de la cité pour poursuivre sa route entre le désert et les falaises rouges. -Tu t’entraines pour quoi ? Osa demander un garçon aux cheveux noirs. Hercule croisa le regard du garçon et lui sourit. -Je m’entraine pour devenir un héros. Les enfants laissèrent échapper un « Oh » admiratif lorsqu’une fillette ajouta immédiatement : -Un héros comme Aladdin ? Hercule regarda la petite, intrigué. Parmi tous les noms des héros grecs et ceux que Phil avaient entrainé, il n’avait jamais entendu parler d’un certain Aladdin. -Qui … qui est Aladdin ? demanda Hercule. Alors que la fillette allait répondre, un autre enfant la coupa : -Tu connais pas Aladdin ?! Hercule fit non de la tête avec un sourire gêné. -T’es vraiment un étranger, alors ! Rit un garçon. -Il est connu dans tous les Sept Déserts ! -C’est le héros d’Agrabah ! Il a affronté toute sorte de monstres et de bandits ! Les enfants poursuivirent leur éloge sur le mystérieux Aladdin pendant quelques minutes et à mesure qu’ils continuaient à parler de lui, l’intérêt d’Hercule pour ce héros du désert était totalement éveillé. -Cela doit être un grand héros pour que vous le teniez en si grande estime, fit le demi-dieu. Ce fut la femme au voile bleu qui lui répondit : -Aladdin était autrefois un vaurien des rues, un homme qui volait pour vivre. Il a sauvé notre ville de maints dangers et ce au péril de sa propre vie. Aujourd’hui, il vit au palais et a épousé la Princesse mais il n’a pas oublié les pauvres gens d’Agrabah. Il est généreux et bon et un jour, il sera Sultan. Hercule repensa à tous les récits sur les grands héros grecs que lui racontaient ses parents adoptifs et son entraineur. Aladdin semblait ressembler à ces héros : Achilles, Thésée, Ulysse, Jason, Hector. Il aurait aisément sa place dans le panthéon des grands héros grecs. Phil, Pégase et son entrainement lui sortirent de la tête et il n’avait plus qu’une seule envie : rencontrer ce héros des sables. -Où est-ce que je pourrais trouver cet Aladdin ? J’aimerais beaucoup le rencontrer. Demanda vivement l’apprenti héros. Un garçon montra les tours qui émergeaient de derrière les murailles. -Il doit-être au Palais. Dit-il. -Je ne pense pas que vous arriverez à le voir. Ajouta la femme au voile bleu. Les dirigeants et dignitaires des contrées du désert sont déjà arrivés. La grande réunion a surement déjà commencé. Hercule prit appui sur ses genoux et, déterminé, il les remercia avant de déclarer en souriant. -Je vais aller tenter ma chance. Merci encore pour tout. Suivi par les mères et leurs enfants, il longea les murailles de la cité jusqu’à une lourde porte en bois sculpté creusé dans la pierre où passait les marchands ambulants, les caravanes et les voyageurs. Hercule regarda la courbe de la rivière qui filait jusqu’à la mer puis s’en détourna. Il entra alors dans Agrabah, déjà en effervescence suite à l’arrivée des souverains étrangers, et se dirigea vers le palais. ***
Le soleil n’avait pas atteint son zénith que les délégations étrangères passèrent la porte principale de la cité d’Agrabah. Aladdin, Jasmine et le Sultan les virent arriver au loin, se tenant au seuil des portes du palais entourés par Razoul et ses hommes. A leurs pieds, la longue avenue, reliant le palais à la grande porte, avait été dégagée par la garde. Les habitants d’Agrabah étaient contenus par les soldats qui les empêchaient de traverser la grande rue. Les citoyens étaient entassés de chaque côté pour voir arriver les grands seigneurs qui gouvernaient les Sept Déserts. Ce fut Hassan Adil, Roi d’Hyrouk, qui passa en premier les portes d’Agrabah. La cité d’Hyrouk et Agrabah avaient depuis de nombreuses années d’excellentes relations. Une alliance militaire et de nombreux accords commerciaux avaient été conclus et cette entente reposait essentiellement sur l’amitié entre le Roi Hassan et le Sultan d’Agrabah. Les deux hommes se connaissaient depuis l’enfance alors que leurs pères partaient à la chasse au lion dans les steppes d’Afrique. Tayeb et Hassan restaient ensemble avec leurs mères attendant que leurs pères reviennent de leurs longues semaines de chasse. Ils avaient appris ensemble l’art de monter, l’art de l’épée, la politique, les tactiques et stratégies militaires, la diplomatie et l’économie. Bien qu’ils fussent formés à l’art de la guerre, Tayeb et Hassan ne versaient pas dans les frasques belliqueuses et guerrières. Ils se plaisaient à parcourir les vastes déserts à cheval ou à explorer les forêts exotiques et sauvages de la province d’Hyrouk. Ils préféraient s’adonner à l’astrologie, à la mécanique ou à l’herboristerie, là où leurs pères et grands-pères chassaient, guerroyaient et joutaient. Les deux hommes étaient différents de ce qu’on pouvait attendre de souverains de leur stature. Malgré les années, après qu’ils eurent pris épouses et qu’ils héritèrent de leurs charges, Tayeb et Hassan restèrent très proches. Lorsqu’un conflit éclatait, Agrabah et Hyrouk se retrouvaient toujours côte à côte dans la bataille et défendaient leur peuple avec la même ardeur. Si l’un prenait parti pour une cause, l’autre le rejoignait sans se poser de question. Tayeb et Hassan avaient un lien qu’on ne pouvait retrouver que chez des frères. Ce lien s’était presque étendu à leurs provinces formant une puissance alliance parmi les nations des Sept Déserts. L’escorte d’Hassan Adil fit son entrée dans la ville sous le son détonnant des tocsins. Des soldats en longues tuniques rouges, armés de lances étincelantes, marchaient en tête, suivis par des cavaliers du désert sur de robustes montures à la robe sombre. Attroupés derrière les lignes formées par les gardes, les gens d’Agrabah observaient les soldats d’Hyrouk parader dans la longue avenue. Deux gigantesques cages passèrent sous les portes, tanguant de gauche à droite, soutenues par de larges porteurs. Entre les fins barreaux, des oiseaux exotiques de piaillaient et virevoltaient parmi les centaines de perchoirs. Les spectateurs s’émerveillèrent devant cet amas de couleur et de plumes et ce malgré le son strident et chaotique qui s’en échappait. Derrière les voilières piétinait un grand éléphant gris entouré de cavaliers en armures dorées. Sur le pachyderme, une petite loge était disposée sur laquelle trônait un homme rayonnant. Le Roi d’Hyrouk, Hassan Adil, dans une tenue rouge ornée d’or et de grenat, salua la foule amassée de chaque côté de la grande avenue. Le peuple acclama le souverain au passage de son éléphant qui s’approcha peu à peu du palais alors que d’autres soldats en armes fermaient sa marche. Tayeb, le Sultan d’Agrabah affichait un sourire sans égal sans sa barbe blanche. Il avait mis sa plus belle tenue pour accueillir son ami de toujours. Jasmine se tenait non loin de son père, habillée d’une tenue blanche, un fin voile blanc entourait ses épaules et son haut dévoilant ses formes et son ventre. Elle portait un diadème orné d’un saphir qui brillait au soleil et un collier d’or. Aladdin portait un long manteau blanc de cérémonie aux larges épaules. L’ancien voleur ne s’était pas encore fait à ces habits. La tenue lui pesait et il n’était pas à l’aise dans ses mouvements. Il remit son turban en position alors que l’éléphant portant Hassan Adil commença l’ascension qui le menait au Palais. Arrivé en haut des larges marches qu’il avait grimpées lentement mais surement, l’éléphant s’assit ses pattes pour faire descendre celui qui demeurait dans la loge sur son dos. Hassan descendit du pachyderme d’un saut assuré malgré sa longue tenue de cérémonie en soir rouge. C’était un homme maigre à la peau d’ébène et à la barbe et aux cheveux de neige. Tout comme son compère d’Agrabah, le temps avait fait son œuvre sur le Roi d’Hyrouk mais son visage, marqué par les rides, semblait rayonner de joie et ses yeux pétillaient de malice. Hassan avança d’un pas rapide vers le Sultan, les bras ouverts et le sourire aux lèvres. -Tayeb ! Mon ami ! s’écria-il. Le Sultan alla à la rencontre d’Hassan et l’enlaça avec ses courts bras. -Quel plaisir de te revoir, Hassan ! dit-il. -Tu grossis d’année en année, mon ami. Remarqua Hassan. -Et toi, tu restes tout aussi mince, répliqua Tayeb en riant. Les deux hommes éclatèrent de rire et s’embrassèrent amicalement comme deux frères qui se retrouvaient. Hassan se tourna vers le couple derrière le Sultan. Il s’approcha de Jasmine et il lui prit les deux mains. Il les embrassa vivement. -Toujours aussi belle, mon enfant. Dit-il en plongeant ses yeux dans ceux de la Princesse d’Agrabah. -Tu es trop bon, répliqua Jasmine à celle qu’elle considérait depuis son enfance comme un oncle affectueux. Hassan se tourna alors vers Aladdin qui par reflexe s’inclina devant le vieux Roi. Celui-ci pouffa de rire devant la courbette du voleur et s’empressa de le prendre dans ses bras : -Arrête le protocole, mon garçon. Tu fais partie de la famille maintenant ! Aladdin fut surpris de la force du Roi qui l’étreignit de toutes ses forces. Il regarda par-dessus l’épaule d’Hassan et vit Jasmine et son père, ravis de voir qu’Hassan l’avait adopté. Le vieux roi et sa suite passèrent les portes du palais alors qu’une nouvelle escorte entrait dans Agrabah. C’était une escorte bien plus humble que celle du Roi Hassan, elle était composée d’une cinquantaine de soldats à pieds et de serviteurs qui entouraient une grande loge fermée soutenue par huit porteurs. Ils provenaient de la petite province de Cirine et leur arrivée dans Agrabah fut discrète. Bien que le peuple acclama le passage de la loge à porteurs, il n’y eut aucune manifestation de la part du souverain dont la loge resta close. Ils rejoignirent rapidement le seuil du palais où les porteurs déposèrent lentement la loge au sol. La porte de la loge s’ouvrit et une petite vieillarde voutée en sortie. La Reine régente Warda de Cirine était une femme aux cheveux blancs noués en une longue tresse. Son visage ridé montrait des signes de faiblesse mais la vieille femme affichait néanmoins un sourire au Sultan qui l’aida à sortir de sa loge. -Je vous remercie d’être venue, Warda. Dit le Sultan d’un ton poli. Votre présence m’enchante. Il lui fit un baisemain. -Je suis moi aussi heureuse de vous revoir, dit-elle. -Le voyage fut-il agréable ? -Assez, rit-elle. Bien qu’à mon âge, ces voyages me fatiguent. -Votre venue m’honore, reprit le Sultan ravi. -Je n’allais pas manquer une occasion de revoir Agrabah. Cela fait une vingtaine d’années que je ne suis pas venu ici. Votre ville est magnifique, Sultan. Tayeb s’inclina et Warda se dirigea vers le couple de jeunes mariés. Jasmine et Aladdin s’inclinèrent à son passage. La Princesse eut droit à un sourire et à regard amical de la part de la régente de Cirine. Mais Warda s’attarda sur Aladdin. Elle le dévisagea avec ses petits yeux pénétrants et le jeune homme se sentit comme nu sous le regard déroutant de la reine régente. Sans aucun mot, elle partit avec son escorte dans le Palais. Jasmine remarqua la gêne de son époux devant Warda. Discrètement, elle lui saisit la main. Aladdin, surpris croisa les yeux de sa princesse. Des yeux rassurants et affectueux qui voulaient dire : « Ce n’est rien, juste une vieille femme aigrie ». Au loin, on entendait arriver la prochaine escorte. Celle-ci était précédée par de courts bruits de clochettes. C’étaient des serviteurs qui portaient de longs bâtons sur lesquels étaient accrochés de nombreuses petites cloches. Ils les secouaient à l’unisson pour attirer l’attention de tous les gens d’Agrabah. Des fantassins en armure d’argent les suivaient ainsi que des concubines qui dansaient agitant de nombreux voiles de maintes couleurs et portant de nombreux bijoux ornées de pierres précieuses. Des Cavaliers entouraient un rhinocéros à la corne d’or massif qui tirait un immense carrosse en bois sculpté et décoré en or et argent. Le carrosse était ouvert et contenait de nombreux coussins précieux surmonté d’une toile où siégeait une femme blonde qui attirait tous les regards. Elle salua la foule et les hommes furent frappés par sa beauté. Elle avait un visage fin, une longue chevelure blonde, des lèvres pulpeuses et des yeux verts. Elle portait une longue robe bleue, proche du corps avec un long voile transparent qui descendait dans son dos. Sur sa tête trônait une couronne d’or étincelante avec trois émeraudes en ornements et des petits diamants incrustés. La foule d’Agrabah firent un accueil chaleureux à cette déesse des sables qui fut applaudi tout comme ses danseuses qui la précédaient. Arrivé devant les portes du palais, Balki, Reine de Saba, descendit de son carrosse. Elégante avec sa chevelure flottant dans le vent, elle rejoignit le Sultan d’Agrabah qui accourut devant elle. Il embrassa la main délicate de la Reine de Saba. -Vous nous illuminez par votre présence, Madame. Dit-il envouté par la jeune femme. Balki regarda le Sultan avec amusement, attendrie par sa galanterie. Aladdin ne resta pas insensible au charme de la blonde car sa beauté ne faisait aucun doute à celui qui croisait son regard de jade. Balki resta silencieuse et se baissa pour baiser le front du vieux sultan d’Agrabah qui pendant un instant se sentit pousser des ailes. -Merci de nous accueillir dans votre Palais, noble Sultan. Déclara la reine. Elle passa devant Aladdin et Jasmine qui s’inclinèrent. Elle s’arrêta devant le jeune couple et leur sourit. -Vous êtes magnifique, Princesse Jasmine. Dit-elle. -Je vous remercie, votre Majesté. Répondit Jasmine. Les roses du désert se saluèrent de nouveau et la Reine de Saba se tourna vers Aladdin auquel elle porta un certain intérêt. -Alors voici le fameux Aladdin. Dit Balki langoureusement. Sentant le regard de Jasmine et les yeux verts de la Reine de Saba sur lui, Aladdin frémit un court instant et répondit maladroitement : -A votre service, votre Altesse. Cela fit rire la blonde et fit grimacer son épouse. -On m’a conté vos exploits, héros d’Agrabah. Le récit de vos combats et aventures ont dépassé les frontières de votre province. J’adorerais écouter vos histoires par votre propre bouche. Aladdin resta bouche bée devant Balki qui lui faisait les yeux doux alors que Jasmine observait ,impuissante, son époux défaillir. -Eh …Eh bien … bégaya le vaurien. Je ne sais … pas … si … -Vous avez bien dit que vous étiez à mon service ? rappela la blonde moqueuse. -Je le ferais, répondit finalement Aladdin, rouge, en détournant le regard. La Reine de Saba partit en gloussant, suivie par ses suivantes alors qu’Aladdin soutenait le regard sombre de Jasmine. -Elle peut te mener par le bout du nez, réprimanda la Princesse à son époux. -Elle est assez … intimidante … tenta de se justifier Aladdin. Jasmine ne répondit pas et détourna son attention de son mari qui fit tout pour tenter de se pardonner auprès d’elle. Les tambours annoncèrent l’arrivée de l’Emir d’Arwa, Fayiz Sakhri. C’était un guerrier qui avait traversé de nombreuses guerres et vu maintes batailles : Un homme de haute stature et de forte carrure au visage sévère comme taillé dans la pierre, à la barbe grisonnante et aux yeux sombres. Il menait de tête son escorte sur son cheval à la robe noire comme la nuit. Ce géant menait une longue escorte de cavaliers portant tous des armures en plaques sombres, des boucliers et des casques dénués de pierres et de fanfreluches. L’Emir Fayiz était réputé dans les Sept Déserts pour être un seigneur de guerre redoutable. Il ne fallait pas penser qu’il était belliqueux mais il entendait protéger son Emirat d’Arwa en exacerbant les craintes des autres souverains. Son attitude froide et distante conjuguée à la discipline qu’il exigeait de son armée décourageait ceux qui tentaient de s’en prendre à sa province. Pourtant certains tentèrent de s’attaquer à lui. Ils le payèrent amèrement. Fayiz Sakhri et ses cavaliers piétinèrent le sable de la grande avenue d’Agrabah laissant derrière eux un nuage de poussière. A leur passage, certains habitants les saluaient et les acclamaient mais ils n’obtenaient aucune réponse de la part de l’Emir ou de ses hommes. Ces derniers ne détournaient pas les yeux de leur chemin, leurs faces étaient impénétrables et elles déroutèrent par leur absence de sentiments. Certains enfants se cachèrent derrière leur parent lorsque le Titan d’Arwa passa devant eux, tant son allure et son aura intimidait et effrayait. L’Emir Fayiz avait hérité de ce surnom il y a quelques années et l’avait détesté dès qu’il avait entendu. Au seuil du Palais, Aladdin discernait les chevaux et les cavaliers dont les lances d’acier étincelaient au soleil. Leurs armures formèrent des cliquetis alors ils montaient les escaliers menant à la demeure du Sultan. Arrivé au sommet des marches, l’Emir Fayiz mit pied à terre et tendit son casque à un de ses hommes. Arborant sa barbe sombre taillée comme une arme acérée, il se dirigea à pas lourds vers le Sultan qui l’accueillit à bras ouverts. -Je vous souhaite la bienvenue à Agrabah, Emir Fayiz ! Le Titan d’Arwa ne serra pas la main qui lui tendit le Sultan. Détaché, il s’inclina légèrement et répondit sur un ton neutre : -Je vous remercie de votre hospitalité, Sultan Tayeb. -Avez-vous fait bon voyage ? Demanda le Sultan. -Mes cavaliers ont voyagé avec hâte durant toute la nuit. Le voyage fut bref, ce qui est tout aussi agréable. Il passa avec sa suite de guerriers devant Aladdin et Jasmine. La Princesse fut saluée avec respect mais l’ancien malfrat fut parfaitement ignoré. Les petits yeux de Fayiz s’étaient posés brièvement sur lui et Aladdin n’avait pu y voir que dédain et mépris. Ils passèrent les portes du palais et le Sultan s’approcha d’Aladdin. -Ne t’en fais pas pour ça, mon garçon. Murmura-t-il. Fayiz est un homme hautain. Il n’accorde son respect qu’à une infime partie d’individus. Et il a ses propres critères pour juger une personne. Aladdin sourit à la remarque du Sultan, Jasmine ajouta en serrant le bras de son époux : -Tu as vaincu des monstres et des adversaires bien plus impressionnants que lui. -Tu te débrouilles très bien, mon garçon, reprit Tayeb. Je suis fier de toi, tu feras un grand Sultan si tu continues ton apprentissage. -Merci Sultan, répondit Aladdin dont le cœur venait de sauter dans sa poitrine. Je crois avoir pris un peu de confiance. Même Jasmine semblait avoir oublié le petit incident avec la Reine de Saba lorsqu’elle posa un baiser sur sa joue. Le Sultan reprit sa place alors que le dernier souverain était attendu. Des trompettes sonnèrent à l’entrée de la ville pour annoncer la venue du Prince Marchand de Nawal. La Province de Nawal était différente de tous les autres royaumes formant les Sept Déserts. Elle était dirigée par un triumvirat de trois dirigeants. On les appelait les princes marchands. Cette appellation leur convenait car Nawal était une province riche en ressources et matières premières et ses dirigeants étaient choisis parmi les familles les plus riches de la contrée. Les marchands de Nawal parcouraient le monde à la recherche de nouvelles richesses à exploiter et vendre. Cependant plus les trois princes marchands gagnaient en prestige et en fortune et plus ils commençaient à se jalouser. Ainsi depuis une vingtaine d’années, Nawal était en état de guerre civile parce que le Prince Marchand Achraf avait tenté d’assassiné la Princesse Zayn sous son propre toit. Le pays avait sombré dans le chaos lorsque le troisième dirigeant de Nawal, le Prince Ghâlib, décida de lever une armée pour éliminer ces deux rivaux. Ce conflit toucha les petites gens de Nawal, les plus pauvres, les faibles qui subirent de plein fouet l’horreur et les atrocités de cette guerre. L’activité commerciale de la contrée diminua et déstabilisa l’économie autrefois puissante de Nawal pour le mener peu à peu vers la ruine. La guerre civile perdura pendant maintes années et Nawal se replia sur elle-même dans une autarcie totale. Deux ans plus tôt, des nouvelles s’échappèrent des frontières de Nawal. La guerre civile était terminée et les leaders de chaque faction avaient été vaincus par un groupe armé populaire appelé « les Enfants de Nawal ». Il rétablit la paix dans la paix et calma les tensions. Leur leader devint l’unique Prince Marchand gouvernant le pays. Selon les rumeurs, Nawal commençait à retrouver sa gloire et sa prospérité d’antan après un long sommeil empli de cauchemars et de ténèbres. L’invitation du nouveau dirigeant de Nawal au sommet des Sept Déserts était une main tendue des autres souverains vers cette nation pour ramener l’ordre et créer un immense réseau commercial entre les sept royaumes. Officiellement, c’est ce qui avait été dit mais officieusement, c’était pour pouvoir rencontrer ce fameux leader qui avait retourné la guerre civile de Nawal à son avantage pour s’imposer comme unique dirigeant. Nawal n’était pas une contrée à se mettre à dos, surtout si elle était prête à offrir de rares richesses. Ainsi vint le Prince Marchand Munir. Précédés par des musiciens jouant à l’unisson une mélodie d’allégresse, un convoi d’une cinquantaine de chameaux passa les portes d’Agrabah. Certains cavaliers portaient des cimeterres à leurs ceintures, certains n’avaient aucune arme. Cette escorte ressemblait plus à une gigantesque caravane plutôt qu’à la suite d’un grand prince. Mais sur chaque chameau, des paniers étaient disposés des deux côtés de l’animal. Ces paniers contenaient une matière qui attira les yeux de tous. Ils débordaient d’or. Dès leur entrée dans Agrabah, les cavaliers commencèrent à lancer les pièces d’or contenues dans leurs paniers. A la vue de l’or qui volait dans leur direction, les gens d’Agrabah s’agitèrent et remuèrent. Les cris de surprise s’échappèrent de la foule alors que les acclamations doublèrent en force. Plus les habitants d’Agrabah hurlaient leur joie, plus les cavaliers balançaient le contenu de leurs paniers dans la foule. Ils portaient différentes tuniques de couleurs et on pouvait apercevoir leurs grands sourires alors que la foule les saluait et les applaudissait. Pendant quelques instants, les soldats d’Agrabah eurent beaucoup de difficultés à contenir le peuple d’Agrabah qui se battait presque pour atteindre les pièces d’or, certains tentèrent même de passer outre les soldats pour se servir dans les paniers. Même les gardes qui protégeaient la grande rue n’hésitaient pas à rompre le rang pour ramasser deux ou trois pieces d’or qui gisaient à leurs pieds. La clameur monta jusqu’au palais et le Sultan s’étonna d’entendre une telle euphorie de la part des habitants d’Agrabah pour un souverain qui n’était pas le leur. -Ils sont très enthousiastes ! Dit-il naïvement. L’escorte du Prince Munir fut portée aux nues jusqu’à sa montée des marches du palais. Le Sultan chercha du regard où pouvait être le souverain de Nawal parmi tous les monteurs de chameaux aux nombreuses tuniques colorées. Le cavalier qui menait le convoi descendit de son cheval et enleva son turban vert pour dévoiler ses cheveux courts sombres bouclés. Il avait un long manteau vert sur des vêtements blancs. Il était jeune et beau avec des yeux verts et un sourire immaculé. Il émergea de la cohorte de chameaux et s’approcha du Sultan : -Prince Munir, à votre service, Sultan d’Agrabah ! Tayeb écarquilla les yeux devant le jeune qui venait de mettre genou à terre pour s’incliner devant lui. Le vieil homme sourit jusqu’aux oreilles et invita le prince marchand à se relever. -Vous devez être le fameux Prince Munir. Bienvenue à Agrabah ! C’est un plaisir de vous rencontrer. -Tout le plaisir est pour moi, votre Altesse. -Je dois avouer, concéda le Sultan, que je vous aurais cru plus vieux … Le Prince Munir éclata d’un rire franc et reprit : -Je suis jeune et j’ai énormément de choses à apprendre. J’espère apprendre énormément à votre contact. -Ho ho ho ! Je ne voulais pas vous froisser. Je suis sûr que nous nous entendrons très bien. Le Sultan et Munir s’arrêtèrent devant Aladdin et Jasmine. -Voici ma fille Jasmine et son époux Aladdin. Annonça Tayeb. Le Prince Marchand saisit délicatement la main de la princesse et fit un baisemain. -Les rumeurs sur votre beauté ne vous rendent pas suffisamment justice, Princesse Jasmine. Dit-il. -Et que disent les rumeurs ? Demanda-t-elle en souriant. -Elles disent que vous êtes magnifique et gracieuse. Mais votre beauté rayonne comme un second soleil. Jasmine était habituée aux compliments des grands dignitaires étrangers qui venaient s’attirer ses faveurs ainsi que celles de son père. Elle n’y accordait la plupart du temps que peu d’importances car elle y voyait les manœuvres politiques et les frasques du protocole. Mais le Prince Munir avait prononcé ses mots d’un ton léger, non forcé et ses paroles semblaient pleines de sincérité. Elle le remercia d’un signe de tête silencieux alors que le Prince Marchand se tourna alors vers Aladdin. -Aladdin ! J’ai tant entendu parler de vous ! dit-il en serrant la main de l’ancien voleur. C’est un plaisir de vous rencontrer enfin. -C’est un plaisir réciproque, Prince Munir. Répliqua Aladdin à l’aise avec ce Prince plus amical qu’intimidant. -Je suis heureux de vous voir ici. Dit-il. Je pensais que vous seriez parti pour une de vos grandes aventures comme on me l’a conté dans mon pays. Aladdin ne sut quoi répondre. -Disons que les aventures se font plus rares, ces derniers temps … Le Prince Munir acquiesça avec un sourire et se reporta sur le Sultan. -Votre Altesse ! J’ai apporté d’innombrables cadeaux pour Agrabah et son peuple ! De la soie de l’Orient lointain et de la fourrure apportée des froides terres de l’Ouest. Des fruits cultivés dans les îles tropicales du Sud et des poissons que l’on ne peut trouver que dans les Océans au-delà du Soleil. Le Sultan afficha un sourire jusqu’aux oreilles et invita son invité à le suivre. -Tout cela me semble merveilleux, mon jeune ami ! Mais nous verrons tout ça en temps et en heure ! Je présume que votre voyage fut long depuis Nawal. Vous devez avoir faim assurément. Et pour cela j’ai le remède ! Un festin nous attend ! Remplissons-nous la panse et ensuite nous pourrons discuter de nos affaires. Le Prince et le Sultan passèrent les portes du palais suivis par Aladdin et Jasmine qui parlaient à voix-basse. -Ton père semble bien aimer le Prince Munir. -Je ne m’imaginais pas qu’il serait aussi jeune, enjoué et euphorique. -Comment ça ? -Je m’attendais à quelqu’un de plus sévère, âgé et qui s’apparenterait à un guerrier, ou à un seigneur de guerre. Il a mis fin à une guerre civile qui ravageait son pays depuis vingt ans et pourtant il n’est pas plus âgé que toi ou moi. C’est assez étonnant … -Il cache peut-être son jeu, dit Aladdin en souriant. En tout cas, il me plait bien … -Évidemment, répondit Jasmine en riant. Il ne tarissait pas d’éloges sur toi. Tout comme la Reine de Saba. -Ah … -On aurait dit un enfant qui avait fait une bêtise et qui tentait de le cacher. Tu ne pouvais aligner aucun mot face à elle. Dit-elle pour taquiner son époux. Mais tu n’es pas le seul à flancher devant Balki, Reine de Saba. Elle fait le même effet à tous les hommes qu’elle croise. -Je ne défaillirais pas une seconde fois, lui promit Aladdin. -Les Sultans ne doivent pas flancher devant une belle plante blonde. -Je préfère les belles brunes … dit-il en se rapprochant d’elle. -N’essaie pas de te faire pardonner, répliqua-t-elle tout sourire. Tu n’es pas encore sorti d’affaire. Le repas sera une plus grosse épreuve pour toi, apprenti Sultan. Le banquet fut servi dans la salle du trône au milieu du tapis rouge qui reliait le trône à la forme d’éléphant doré aux grandes portes de la salle aux parois bleues azur. La grande table était en U, dos au trône et ouvert à la porte. C’était une table faite d’un bois rare dans le désert et dont la couleur jaunâtre faisait penser à de l’or. Sur celle-ci étaient disposés de somptueux mets. Un plateau d’argent présentait des côtes d’agneau saupoudrées d’épices à côté d’une grande corne d’abondance de fruits qui semblait ne pas avoir de fond. Deux amphores de vin étaient séparées par un grand poisson aux écailles étincelantes et encerclés par de nombreux fruits de mer sur un lit de citron. Des loukoums parsemaient chaque coin de la table dans de petits plats de verre et de chaque côté de la table deux poulets farcis se faisaient face comme des chevaliers avant une joute bien que la leur ne débuterait jamais. Tant de plats qui défilaient devant les dirigeants des Sept Déserts grâce aux serviteurs et domestiques du Sultan qui transitaient entre les cuisines et le banquet. Le Sultan était assis à côté du Roi Hassan sur la petite partie de la table en U et les deux souverains plaisantaient comme à leur habitude. D’un côté de la table, Aladdin était encadré par le Prince Munir et l’Emir Fayiz. Ce dernier n’avait aucune conversation et restait enfermé dans un mutisme profond dégustant simplement tout ce qui lui était servi. Munir était presque tout le contraire, il s’adressait aux domestiques qui venaient le servir et le remerciait avec un mot gentil. Il suivait attentivement une conversation entre Tayeb et Hassan forte animée, appelant fréquemment une jeune domestique pour qu’elle remplisse sa coupe de vin. Aladdin s’ennuyait à mourir. Il pensait que Munir et lui auraient pu discuter durant le repas mais voilà qu’il l’ignorait totalement. Il regarda à la table parallèle face à lui, Jasmine était entourée par Balki, la Reine de Saba et Warda, la Reine Régente de Cirine. Les trois femmes conversaient calmement, Aladdin ne discernait aucune de leurs paroles. Parfois, il vit Jasmine tourner légèrement les yeux vers lui avec un léger sourire de réconfort dans ce repas qui lui semblait déjà durer une éternité. Aladdin se réinstalla sur son coussin et prit la coupe de vin qui trainait devant lui. Il porta le liquide rouge à ces lèvres et le but lentement en portant le regard sur la salle. Il ne s’était toujours pas habitué au gout du vin et fit tout pour dissimuler cela aux autres invités. Un versant de la salle du trône était ouvert et donnait sur les jardins du Palais. Une légère brise passait entre les épais piliers de marbre et caressait le dos d’Aladdin avant de ressortir à l’autre bout de la salle par l’immense balcon qui donnait sur Agrabah. Dans les jardins, toutes les suites des dirigeants des Sept Déserts avaient pris quartier autour de la grande fontaine. Aladdin repensa à Abu et Rajah qui ne pourraient pas faire leur balade quotidienne dans les jardins à cause des invités. Il ne les avait pas vu de la journée et s’attendait presque à voir surgir son comparse simien de sous une table pour chiper un fruit ou une friandise. Munir, Hassan et le Sultan éclatèrent de rire et attirèrent l’attention de tous les convives sur eux. -Mon cher Munir, vos anecdotes sont hilarantes ! S’esclaffa Hassan Adil. -Cela fait bien longtemps que je n’avais pas ri ainsi, dit le Sultan. -Je pourrais partager d’autres anecdotes lorsque le vin aura ravivé certains de mes souvenirs enfouis. Expliqua Munir. -Prince Munir ! Votre venue dans notre petit cercle restreint est une bénédiction. Vous semblez de la même trempe que Tayeb et moi. Répliqua le Roi Hassan en levant sa coupe, hilare. -Je ne m’avancerai pas là-dessus. L’Emir Fayiz venait de rompre le silence à la stupéfaction de tous. Le Titan d’Arwa essuya sa bouche et fixa Munir de ses yeux sévères. -Je suis certain que vous n’êtes pas de la même trempe que ces deux-là. Dit-il en désignant Tayeb et Hassan. Vous êtes quelqu’un d’autre. Munir contint le regard accusateur de Fayiz, jusqu’à ce qu’il questionna : -Alors qui suis-je, Emir Fayiz ? Le ton joueur du jeune Prince Marchand déplut au guerrier d’Arwa qui commença son explication : -On entend de nombreuses choses depuis la fin de la guerre civile à Nawal. Je ne sais rien de vous, Prince Munir. (Il prononça ce nom comme s’il lui écorchait la bouche). Mais j’ai entendu des rumeurs sur ce que vous avez fait pour accéder au pouvoir à Nawal. Je n’ai jamais porté le Prince Achraf en estime. C’était un être puant qui incarnait la décadence chaque minute qu’il passait sur cette terre. Il était incapable de bouger son corps obèse et passait son temps à se bâfrer dans l’opulence et la luxure. On raconte que vous et vos hommes l’avez pendu à la plus haute tour de son palais et qu’il fallut trois cordes pour le soutenir. Les rumeurs sont pourtant sombres et nébuleuses. Pour le Prince Ghâlib, on m’a murmuré que vous l’avez enfermé dans son palais et que vous l’avez incendié. Mais les rumeurs sont sombres et nébuleuses. Je n’éprouvais aucune affection que ce soit pour Achraf et Ghâlib. Je n’ai pas pleuré la mort de ces deux êtres indignes. Et pourtant avec les rumeurs concernant leurs morts, j’ai appris énormément sur celui qui les a renversés et les a remplacé à la tête de Nawal. Vous souriez, vous vous comportez comme un fanfaron. Mais c’est un rôle, un masque que vous portez. Vous n’êtes pas celui que vous voulez montrer alors je vous le demande à vous … Qui êtes-vous ? Le sourire du Prince se mua en un rictus. Il soupira et toisa le regard agressif de l’Emir Fayiz. -Je suis quelqu’un comme vous. Répondit-il. Quelqu’un prêt à tout pour protéger son peuple. Munir reprit une gorgée sous l’œil sceptique de l’Emir. -Vous avez jeté un froid sur notre festin, cher Fayiz. Annonça Balki. Ne donnons pas d’importance aux rumeurs qui parcourent nos royaumes par les bouches des serpents et les oreilles des singes. -Vous avez raison, appuya le Sultan. Profitons que nous soyons tous réunis pour célébrer la paix enfin revenue dans les Sept Déserts. -La fin de la guerre civile à Nawal ouvre une nouvelle ère pour nous tous après de bien sombres épreuves. Rajouta la vieille Warda alors que les derniers mots s’étouffèrent dans sa bouche. Aladdin vit qu’elle regardait le redoutable émir avec des yeux teintés de tristesse et de colère. Ignorant la régente de Cirine, Fayiz gardait son attitude distante et sa stature de pierre. -Le dernier conseil entre les chefs des Sept Déserts s’est déroulé, il y a plus d’une trentaine d’années, fit remarquer Balki. Et celui-ci se termina en un bain de sang … -Prions pour que l’histoire ne se répète pas, lança le Roi Hassan en levant son verre. La sublime Reine de Saba lui rendit le geste et les invités firent de même. Aladdin se força à finir son verre quand Munir se tourna vers lui. -Maintenant, j’aimerais beaucoup que vous me racontiez quelques-unes de vos aventures. Aladdin, pris au dépourvu, faillit recracher son vin. Il déglutit et répondit : -Je ne sais pas par où commencer. -Celle qui vous vient à l’esprit, dit Balki intéressée. -Il y en a tellement, ajouta Jasmine pour soutenir son époux. -Tu as participé à ces aventures, Jasmine. Déclara le Roi Hassan. Tu peux surement nous en dire quelque chose. -Je ne les connais pas toutes, se ravisa soudainement la Princesse alors que tous les regards se tournaient vers elle. Seul l’Emir Fayiz et la Régente Warda semblaient ne pas accorder de grande importance aux récits héroïques d’Aladdin. Le militaire ne les écoutait que d’une oreille continuant de manger ce qui se trouvait devant lui tandis que la vieille femme observait la conversation nonchalante et détachée. -Il y a cette fois, où j’ai combattu une chimère qui s’était attaqué à Agrabah en pleine nuit. Aladdin retenait à présent toute l’attention de l’assistance. -C’était une créature à tête et corne de lion, aux cornes de bouc et avec un serpent venimeux pour queue. Ce n’était pas une bête très grande mais elle était bigrement rapide et filait entres les ruelles d’Agrabah terrorisant tout sur son passage. Le Sultan et Hassan buvaient ses paroles tels des enfants à l’écoute d’une geste héroïque. -Comment l’avez-vous arrêté ? demanda Munir. -Il fallait capturer cette chimère avant qu’elle ne fasse d’autres dégâts donc nous avons décidé de lui tendre un piège. J’allais appâter la bête pour la mener directement dans notre guet-apens. Je connais Agrabah comme ma poche et ça n’a pas été difficile pour amener le monstre exactement où je le voulais. Après l’avoir mener dans une impasse, Génie l’a enfermé dans une cage … -Attendez un instant, interrompit Munir. Vous avez bien dit « Génie » ? Sentant qu’il en avait surement dit trop, Aladdin se stoppa dans son récit et sembla moins prompt à poursuivre. -Vous avez un génie ?! S’exclama le Roi Hassan. -Ou … oui c’est exact …, dit Aladdin. -Et vos trois vœux ? Demanda vivement l’Emir Fayiz qui trouva un soudain intérêt pour la conversation. Les yeux sévères de l’Emir percèrent les pupilles d’Aladdin qui se crut victime d’un interrogatoire. -Il a utilisé ses trois vœux, il y a bien longtemps, répondit à sa place Jasmine. Il a libéré ce Génie avec son dernier souhait. Les visages des dirigeants des Sept Déserts affichèrent un étonnement et une certaine surprise à cette nouvelle. -C’est stupéfiant … souffla le Roi Hassan. -Cela ne m’étonne pas de la part du héros d’Agrabah, répliqua Munir. -Vous auriez également en votre possession un tapis volant, selon les dires. Dit la vieille Warda sans sourciller. -C’est vrai ?! S’exclama Hassan en écarquillant les yeux. -Oui. C’est un sacré voltigeur et un compagnon hors-pair. Répondit le Sultan en se remémorant les quelques péripéties aériennes qu’il avait partagé avec ce tapis magique. -Tu m’avais caché cela, Tayeb ! s’indigna Hassan. -Tu n’avais jamais eu l’occasion de le rencontrer. Expliqua l’autre. -Pouvons-nous voir votre génie et votre tapis ? demanda Munir à Aladdin. -Malheureusement, ils sont partis en voyage, il y a quelques mois. L’entrain concernant ces deux êtres magiques disparut aussitôt parmi les convives. Le Prince Munir affichait un air déçu tandis qu’Hassan grimaçait. Fayiz et Warda n’en furent pas troublés et Balki rompit le silence avec sa voix langoureuse : -Le héros d’Agrabah a énormément de ressources. Elle but le vin contenue dans sa coupe en jetant un regard charmeur à l’ancien vaurien. Jasmine vit que la Reine de Saba accordait bien trop d’intérêt à son jeune époux. Elle décida de relancer la conversation : -Ils reviendront surement sous peu. Dit-elle à Hassan. Nous nous ferons une joie de vous les présenter. Aladdin ne put s’empêcher de penser que si le Génie était parmi eux, il leur ferait un show de magie dont lui seul avait le secret. Le Tapis aurait été égal à lui-même discret et fiable. Il aurait fait quelques cabrioles pour certains invités sur demande. Le Tapis et le Génie avaient deux personnalités totalement opposés et pourtant leur entente était parfaite. C’est pourquoi le Génie décida de prendre le Tapis comme compagnon de voyage lorsqu’il partit pour un second tour du monde. Partis depuis six mois, Aladdin espérait les voir revenir à tout moment pour changer la monotonie de ces derniers temps. Comment se serait passé les choses si le Génie et le Tapis n’étaient pas partis ? Aladdin continuait de s’interroger. -Maintenant, la question qu’on peut se poser c’est quelle est la part de mérite de ce Génie et de ce Tapis Magique dans vos exploits ? grogna l’Emir Fayiz. Aladdin sentit les yeux inquisiteurs du Titan d’Arwa sur lui durant tout le reste du repas. Tous les mets qu’on lui servit eurent alors un goût amer.
Dernière édition par Lexias le Dim 27 Oct 2013 - 19:53, édité 1 fois |
| | | Lexias
Âge : 31 Messages : 11 Inscription : 27/08/2013
| Sujet: Re: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Mar 27 Aoû 2013 - 22:40 | |
| - Suite du chapitre 1:
Suite du chapitre 1 - L'épreuve de l'apprentiShang ne pouvait détourner son regard du corps. Il reposait sur une grande table, allongée sur des fleurs de lotus roses pâles. Autour de lui, étaient disposés des bâtons d’encens qui se consumaient lentement laissant des fils de fumées grises s’élevant dans les airs tels des dragons avant de disparaitre. Le corps portait une armure et des épaulettes d’écailles en or. Son épée et son fourreau avaient été placé à ses côtés. Son casque reposait entre ses pieds, brillant et luisant à la lumière des lanternes. Le temple était lugubre, simplement éclairé par quelques lanternes blanches accrochés à certains piliers. La pâleur du cadavre jurait avec l’obscurité qui régnait dans le sanctuaire. Ses cheveux avaient été coiffés, il avait été rasé pour ne laisser apparaitre que sa petite moustache noire. Ses yeux étaient clos et ses mains jointes reposaient sur son thorax où son cœur ne battait plus. Le général Li Shang prit une grande inspiration. Il serra les dents alors qu’il sentit son ventre se nouer. Ses yeux s’humidifièrent et il se frotta les yeux avec ses doigts avant de reprendre de nouveau une profonde inspiration. Il sentit une main se poser sur son épaule. C’était le général Sun Wei, un homme à forte carrure, âgé, aux cheveux grisonnants et aux sourcils broussailleux, portant la même armure que le défunt. Ses yeux fatigués croisèrent les pupilles sombres du jeune général Li et lui fit un sourire réconfortant. -Comment vous sentez-vous, mon garçon ? demanda-t-il. Shang ne put répondre immédiatement tant l’émotion le submergeait. -Je ne saurais l’expliquer … répondit-il. -C’était un ami proche à ce que je sais. Shang porta de nouveau son regard sur le cadavre. -Chao a été mon mentor, commença-t-il. Il m’a tout appris à l’Académie Impériale. Il m’a soutenu dans toutes mes épreuves. C’était un véritable ami, un compagnon d’armes, un frère … Le général Sun contempla le corps du défunt général Huan Chao et sa bouche se tordit. -Il est malheureux de voir de remarquables hommes partir avant les vieillards gâteux qu’ils sont censés remplacer. Dit-il. Shang observa le visage attristé du général Sun. Celui-ci avait été dans la même promotion que son père à l’Académie Impériale. Ils avaient été tous les deux nommés Généraux d’Empire en même temps car ils étaient les meilleurs et qu’ils avaient fait leurs preuves lors des invasions barbares. Mais c’était il y a une trentaine d’années et aujourd’hui, le général Sun Wei sentait que son âge touchait à sa fin. Et pourtant, il se trouvait devant la dépouille d’un jeune général, fauché au zénith de sa vie. -J’ai été un de ses professeurs à l’Académie, expliqua Sun. C’était un élève brillant, juste et impétueux, voire peut-être trop impétueux. J’ai toujours su que Huan Chao irait loin. Mais partir maintenant … Quel gâchis ... Huan Chao avait été tué alors qu’il revenait d’une mission d’inspection dans le nord, non loin de la Grande Muraille. Son escorte empruntait un chemin de montagne en pente à travers la forêt dense. Les troupes avançaient en file indienne sur le sentier lorsqu’ils furent attaqués en embuscade par des bandits. Les flèches fusaient sur les troupes du général et de nombreux traits percèrent ce dernier, le désarçonnant de son cheval. Les quelques survivants réussirent à ramener sa dépouille à la Cité Impériale afin qu’il reçoive les derniers honneurs dues à un des quatre Généraux d’Empire. Shang accorda un dernier regard à son ancien ami avant de quitter le temple avec le général Sun Wei. Les deux généraux empruntèrent la longue promenade qui liait le sanctuaire au palais. La cité impériale était illuminée par les nombreuses lanternes multicolores qui pullulaient dans les rues. C’était une nuit froide et de sombres nuages cachaient les étoiles. Le vent qui balayait la promenade donna des frissons dans le dos des deux généraux. Shang restait toujours plongé dans sa mélancolie suite à la mort de son frère d’armes. -Cet acte ne restera pas impuni, Shang. Dit Sun Wei. Huan Chao sera vengé. -Ces attaques de bandits ont été nombreuses durant l’hiver, ajouta Shang. Des villages et des fermes ont été attaqués et pillés. Mais en s’attaquant à l’armée, ils ont voulu montrer leur puissance et prouver qu’ils n’ont pas peur de l’Empereur. -Ces bandes de brigands ne peuvent rien contre la plus puissante armée d’Orient. Répliqua le vieux général. Tout est une question de temps avant qu’ils payent pour leurs crimes. Ils arrivèrent enfin au pied des escaliers du palais impérial. Alors qu’ils allaient passer les portes, une silhouette émergea de derrière le socle d’une gigantesque statue et les interpella : -Général Li. Général Wei. Les généraux se tournèrent vers l’homme svelte qui se rapprocha d’eux le sourire aux lèvres. -Général Tian. Déclara Shang en reconnaissant l’individu. Meng Tian portait la même armure que Shang et Sun Wei. L’armure dorée des généraux d’Empire. Son visage était fin arborant un bouc et des cheveux noués sombre. Ses petits yeux rusés étaient sombres et son sourire moqueur. -Qu’est-ce que vous faites ici, Tian ? demanda Sun Wei. -Je suis venu rendre les honneurs qui sont dus au général Chao. Répliqua-t-il en conservant le sourire. -Je vous croyais à l’est à surveiller le littoral. Dit Shang. -La mort du Général Chao a obligé l’Empereur à me rappeler du front de l’est. -Pourquoi souriez-vous ? Questionna Sun Wei en fronçant les sourcils. Vos divergences avec Huan Chao étaient connues de tous mais je n’aurais jamais pensé que vous seriez heureux pour son trépas. -Ne vous méprenez pas, Général Wei, répondit Tian. Feu le général Chao et moi avons eu auparavant des différents mais je n’irais pas jusqu’à me réjouir pour la mort d’un compagnon d’armes. -Alors effacez ce sourire de votre visage, ordonna Sun Wei. Le ton de Sun Wei avait été sévère. Mais elle ne perturba pas Meng Tian qui sourit jusqu’aux oreilles devant l’air renfrogné du vieux général. -En ces temps difficiles, je préfère garder le sourire plutôt que de me morfondre et de sombrer dans la morosité. L’âge vous rend amer, Wei. Shang vit les narines du général Wei se dilater sous la colère. La provocation de Tian avait touché le vieux général dans son estime. Shang allait se préparer à intervenir quand Tian reprit : -Trêve de bavardages, je suis venu vous informer que l’Empereur nous demande expressément pour tenir un conseil d’urgence. -Vous auriez dû commencer par cela, pesta Wei qui avait repris son calme. -Je l’aurais fait si vous ne m’aviez pas fait perdre mon temps, général. Répondit Tian en passant les immenses portes du palais impérial. Le visage de Wei passa au rouge tant le vieil homme fulminait intérieurement de rage. Shang posa sa main sur l’épaule du général pour l’apaiser et celui-ci retrouve de nouveau son calme pour qu’ils puissent assister au conseil. Les trois généraux impériaux se retrouvèrent quelques minutes plus tard dans une grande salle au haut plafond soutenue par de monumentaux piliers de bois peints en rouge. Le sol était recouvert de magnifiques tapis ornés de fils d’or et les murs d’étendards ou étaient brodés de flamboyants dragons. Au centre de cette salle, une table sur laquelle était représentée une carte de la Chine, séparait les généraux et leur Empereur. L’Empereur était un homme d’un âge avancé, vêtu d’une longue tunique dorée et portant un petit chapeau aux bords noirs. Sa longue et fine barbe blanche rendait son visage sage. Ses petits yeux noirs étaient perçants et ses sourcils immaculés. Sa stature était droite et sublime tant son aura imposante émanait dans toute la pièce. Il s’installa à un haut siège, surplombant la table face aux trois généraux qui s’inclinèrent devant lui. Il les examina longuement d’un regard soutenu. -Nous sommes profondément attristés d’apprendre la mort du jeune général Huan Chao. Cette perte nous affecte profondément tant la valeur du général Chao reste inégalée. Il sera pleuré et célébré. Un silence solennel s’en suivit où l’Empereur prit quelques instants pour se recueillir alors que les généraux d’Empire gardèrent la tête baissée. -La mort du Général Chao nous permet d’entrevoir la montée d’une nouvelle menace. Commença l’Empereur. Notre Empire abrite des brigands sèment la désolation dans toute la Chine. Le meurtre du général Chao est le dernier affront que nous pourrions supporter. Ces bandits doivent être arrêtés. -La situation est plus complexe que cela, votre Altesse. Expliqua Sun Wei. Ces malfrats sont bien organisés. On compte de nombreux déserteurs de l’armée dans leurs rangs. Mes informateurs parlent d’un ancien gradé de l’armée qui serait à leur tête : le capitaine Gao, un homme qui était sous mon commandement et qui a déserté, il y a une quinzaine d’années. Ses connaissances militaires peuvent expliquer l’ingéniosité et la témérité dont font preuve ces bandes organisés. -Dans ce cas, il vous faut arrêter cet homme au plus vite avant qu’il ne récidive. -Je reviens des frontières de l’ouest, votre Altesse. Poursuivit Wei. On m’a appris que de petits groupes de Huns et de Mongols ont traversé la Grande Muraille durant tout l’hiver. Ils se terreraient dans les montagnes et attaqueraient et pilleraient les voyageurs et les villages aux alentours. -Comment ont-ils pu passer la Grande Muraille avec tant de facilité ? Questionna l’Empereur. -Je crois bien qu’ils ont été aidés, votre Excellence. Et je m’avance en disant que les malfrats qui pillent la campagne y sont pour quelque chose. Les militaires connaissent les chemins qui permettent de passer les défenses du Mur. Il en est de même pour les déserteurs qui ont rejoint le camp des malfrats. L’Empereur pesa toutes les paroles de son plus ancien général. Il frotta sa longue barbe et conclut : -Ce sont des nouvelles très alarmantes, Général Wei. -Le peuple a peur, votre Excellence. Coupa Li Shang. L’hiver a été rude et il a été précédé d’un été où les récoltes ont été mauvaises. Les réserves de nourriture sont presque vides et le riz manque dans de nombreux villages. Les plus pauvres cherchent à subsister et les plus riches font tout pour protéger leurs propres réserves. Les tensions sont palpables dans les campagnes. Le vieil Empereur continua de frotter sa longue barbe en portant son regard sur la carte de la Chine sculptée à même le bois de la table à ses pieds. -Nous devons faire parvenir une part des réserves impériales dans les provinces en manque de nourriture. Mais nous devons le faire en toute discrétion. Nous ne voulons pas créer de remous dans notre Empire. Assignez des hommes de confiance à cette tâche, des agents qui savent se mêler au peuple et qui connaissent les routes dissimulées pour faire parvenir les convois de nourriture sans encombre et rapidement. Il se leva et s’approcha de la table sculptée. -Général Wei, vous irez avec vos troupes au nord. Dit-il. Vous transportez une partie de nos réserves aux villages dans les montagnes et vous traquerez les bandits et nos éventuels envahisseurs. -Ce sera fait selon vos désirs, votre Excellence. Dit Sun Wei. -Votre Altesse, commença Meng Tian, je dois également vous avertir de la menace qui s’annonce à l’ouest. L’Empereur porta un regard intrigué au général Tian. -Quelle est cette menace, général Tian ? -Je possède des nouvelles provenant d’informateurs au-delà de la mer. Expliqua Meng Tian. Le Japon prévoit une attaque contre la Chine. Les clans se sont rassemblés, ils construisent de gigantesques navires et stationnent leurs armées au Sud sur l’île de Kyûshû. Ils créent une flotte afin de débarquer sur nos terres. L’Empereur garda le silence, son visage prit un aspect sévère. -Ces informations sont-elles avérées ? Meng Tian baissa les yeux et poursuivit : -J’avais envoyé quatre hommes au-delà de la mer Jaune pour obtenir des informations parmi les troupes japonaises. Un seul en est revenu avec de nombreuses lettres destinées au haut commandement japonais. Tian sortit de sous sa cape rouge, un long cylindre en bambou. Toujours agenouillé, il tendit l’objet des deux mains au-dessus de sa tête. L’Empereur s’approcha de Tian et récupéra le cylindre de bambou. Il remarqua qu’il y avait un couvercle au sommet de l’objet. Il l’ouvrit et déversa son contenu sur la table adjacente. De petits parchemins s’en échappèrent et roulèrent sur le bois sculpté. L’Empereur en saisit un et le déroula entre ses fins doigts ridés. Il parcourut le parchemin de ses yeux perçants avant de le remettre sur la table et d’en saisir un nouveau. -Ce sont de très sombres nouvelles que vous me rapportez. Annonça-t-il sèchement. -Ce n’est pas tout, malheureusement, Excellence. Continua Tian. Les Japonais ont découvert que mes agents avaient infiltré leurs rangs. Ils ont trouvé mes hommes et les ont exécutés. Le dernier de mes agents a pu fuir avec les informations qu’ils avaient amassées et me les a rapportés, il y a trois jours. Les Japonais savent que nous sommes au courant de leur invasion. Ils vont accélérer leurs plans. Avancer leur attaque pour que nous ne puissions pas préparer notre défense. L’Empereur laissa le dernier parchemin rouler sur la table et ordonna aux trois généraux de se relever. Shang, Wei et Tian se remirent debout, leur casque doré dans leurs mains. Le vieil homme s’arrêta devant le général Tian. -Ce sont là de sombres nouvelles, mais des nouvelles capitales. Déclara-t-il. Que préconisez-vous, général Tian ? -J’ai prévu cette éventualité depuis de nombreuses années, Excellence. Répondit Meng Tian avec un sourire. J’organise la défense du littoral est depuis des mois. Les Japonais frapperont en un seul endroit par un coup puissant et terrible. Selon mon instinct, ils passeront par la mer Jaune pour entrer dans la mer de Bohai pour être au plus proche de la capitale. C’est là qu’ils sont censés débarqués. La Mandchourie est plus proche des terres Japonaises mais ils ne se sont pas préparés pour une longue campagne. Laissez-moi préparer notre contre-attaque, Excellence. Laissez-moi les rejeter à la mer. L’Empereur maintint ses yeux sur le général puis lui tourna le dos. -Nous vous faisons confiance général, défendez nos côtés et repoussez ces envahisseurs. -Ce sera avec plaisir, votre Excellence. Répondit Tian. Shang observa Meng Tian à sa gauche qui affichait un sourire satisfait tandis qu’à sa droite le vieux Sun Wei fusillait Tian du regard. L’Empereur se posa derrière la table face à ses généraux. -Cette réunion est terminée. Annonça l’Empereur. Vous pouvez partir, votre devoir vous appelle. Sauf vous général Li. Shang vit les yeux de l’Empereur se poser sur lui. Il voulait s’entretenir avec lui personnellement et s’interrogea sur les raisons du vieil homme. Alors que les deux généraux allaient sortir de la salle, Wei s’adressa à l’Empereur : -Votre Altesse, la mort de Huan Chao laisse vacant une place de général d’Empire. Qui allez-vous nommez à sa place ? L’Empereur regarda déconcerté le général Sun Wei auquel il répondit sèchement : -La défense de la Chine passe avant cette nomination, général. Cela peut attendre. Sun Wei baissa les yeux, presque honteux que sa question ait déplu à l’Empereur. Meng Tian ricana dans sa barbe et les deux hommes sortirent de la salle, laissant Shang et l’Empereur seul. Le jeune général s’approcha de la table et posa la question : -Que puis-je pour vous, Altesse ? L’Empereur se racla la gorge. -J’ai une requête à vous formuler, Général. ***
Loin des déserts d’Arabie et de la Cité Impériale de Chine, à l’Ouest, dans un pays reculé, un manteau de neige recouvrait une vallée sauvage d’arbres et de sapins. L’hiver était toujours vivace dans cette région et le froid mordant obligeait les villageois à se réfugier dans leurs chaumières en l’attente de jours meilleurs. Peu osaient affronter les vents gelés qui soufflaient sur les plaines et les vallons. Excepté deux voyageurs qui étaient descendus du nord à la recherche de l’aventure et animé par la découverte de nouvelles contrées. Ils avaient acheté un chariot pour continuer leur périple. Toute la journée, le cheval, tirant le chariot, piétina l’épaisse neige avec ses lourds sabots alors que les deux voyageurs étaient assis à l’arrière, emmitouflés dans des manteaux chauds. L’homme tenait les rênes du cheval et la femme était assoupie, la tête sur ses larges épaules. Elle avait de longs cheveux rouges qui juraient avec les couleurs froides et pâles qui les entouraient. Les arbres et les sapins ployaient sous l’épaisse neige qui recouvrait leurs branches et leurs feuillages. Le ciel était bleu avant de virer à un gris terne cachant le soleil qui amorçait sa descente vers l’Ouest. L’homme qui tenait les rênes du cheval avait des cheveux bruns et des yeux bleus perçants. Il regardait toujours devant lui. La neige recouvrait le chemin et ils désiraient tout deux ardemment rejoindre un village avant la tombée du jour pour pouvoir profiter d’une nuit de repos dans une auberge. Malheureusement, le destin en avait décidé autrement. Alors que le soleil commençait à se cacher derrière le haut des arbres, le chemin longeait le versant d’un précipice donnant sur l’immensité de la vallée. Ce fut à ce moment précis qu’une roue se détacha de leur chariot pour chuter dans la fosse et disparaitre parmi les buissons en contrebas. Le chariot s’affaissa en un éclair et le couple faillit presque tomber dans le gouffre. -Je crois que nous n’irons pas plus loin, déclara l’homme en observant l’étendue des dégâts. -Il n’y aucun moyen de le réparer ? -A moins qu’il ne faille descendre dans ce précipice pour récupérer notre roue, je crois qu’il nous faut continuer à pied, jusqu’au prochain village. Ils prirent les sacoches et sacs qu’ils transportaient avec eux. Ils étaient partis en quête d’aventure et cela incluait de voyager léger et de ne pas se charger inutilement. Leur voyage avait débuté il y a un mois d’un commun accord entre les deux. Elle désirait voir le monde, découvrir toutes les terres émergées et les merveilles d’en haut. Lui, désirait l’accompagner dans son périple et espérait qu’une aventure survint sur leur chemin. L’homme prit le grand sac sur son dos et laissa la femme aux cheveux rouges porter une sacoche en bandoulière de cuir. Ils abandonnèrent leur chariot au froid et suivirent le chemin enveloppés dans leurs manteaux de voyage. Le soleil glissa derrière les montagnes et ils durent allumer leur lanterne pour pouvoir distinguer le chemin entre les arbres sinueux et les escarpements rocheux. Ils marchèrent pendant une heure et le vent se leva, mordant et frigorifiant. Plus ils s’enfonçaient dans la forêt, plus les éléments semblaient s’acharner contre eux. Les ténèbres les entouraient, le vent les mordait et au loin, résonna un long cri nocturne qui se répercuta sur les monts sombres. Le jeune couple n’y porta aucune attention. Ils s’inquiétaient surtout de trouver un abri pour la nuit et contre le froid. La fatigue les rattrapait. La jeune femme semblait faiblir à chaque pas. -Pouvons-nous nous arrêtez quelques instants pour reprendre notre souffle ? demanda-t-elle. Le jeune homme s’approcha d’elle l’encouragea à continuer : -Il ne faut pas s’arrêter, il faut poursuivre notre marche. Cet endroit n’est pas sûr, nous ne devons pas nous reposer avant d’avoir trouvé un refuge. Leurs pupilles se croisèrent et ils reprirent courage. Un autre long hurlement émana de la forêt profonde et plusieurs cris lui répondirent. L’homme et la femme sentirent soudainement qu’ils étaient observés entre les troncs des arbres. Des pas rapides et des grognements étouffés parvinrent à leurs oreilles. Puis des yeux jaunes émergèrent de l’obscurité. -Derrière moi. Ordonna l’homme à la jeune femme en tirant son sabre de son fourreau. Elle se plaça dans son dos et sortit un poignard de l’intérieur de son manteau. Les yeux jaunes se multiplièrent et se rapprochèrent d’eux. L’homme et la femme continuaient d’avancer lentement, les armes dégainées prêts, à toute éventualité. Une créature au poil sombre se hissa sur un rocher dénudé et ses yeux d’or croisèrent ceux du couple. Il s’arqua sur ses pattes et le chef de meute fit un long grognement plaintif annonçant le début de la chasse. Sans se dire un mot, le couple s’enfuit par-delà le chemin alors que les loups les traquaient sur leurs talons. Dans leur course, ils entendaient les grognements et les râles affamés de la meute à leurs trousses. Le chemin serpentait entre les arbres et le manteau peu épais de neige sur le sol leur permettait de maintenir une bonne allure. Mais tôt ou tard, la fatigue et le froid les rattraperait et leurs poursuivants n’auraient alors aucune pitié. Profitant d’être caché par un rocher, l’homme emmena la femme hors du chemin. Il sauta dans un fossé en contrebas du sentier et tous deux, ils se collèrent à la paroi. L’homme cala son index sur sa bouche et sa femme garda le silence. Ils entendirent les pas rapides et effrénés des loups sur le sentier ainsi que quelques reniflements et des glapissements. Le vent soufflait dans les branches sinueuses et cadavériques des arbres et la meute poursuivit sa traque sur le chemin. Pendant que les hurlements disparaissaient au loin, le couple se prépara à sortir prudemment de leur cachette. Quand soudain, un loup survint sur le rebord au-dessus de leurs têtes, les babines retroussées et les yeux assassins. La femme étouffa un cri de surprise alors que le loup gris se jeta sur eux. L’homme fit danser son sabre et l’animal gémit et tomba sur la neige, mort. Le dernier cri de la bête rameuta sa meute qui reprit en chasse leurs proies à travers la forêt. La neige était plus épaisse que celle qui recouvrait la route et leurs pieds s’enfonçaient dans le manteau blanc ralentissant leur course. Le couple dut éviter les racines dissimulées sous la neige et les troncs morts qui leur barraient la route. La femme aux cheveux rouges regarda par-dessus son épaule dans sa course et aperçut les yeux jaunes des loups se mouvoir entre les arbres. -Eric ! Ils nous rattrapent ! Le couple passa par-dessus un tronc arraché et couché par le vent et les hurlements revirent à leurs oreilles. La jeune femme vit soudain une ombre filer vers eux par la gauche. L’homme ne l’avait pas remarqué et la créature l’attaquait avec ses crocs acérés. La jeune femme eut le réflexe de fouiller dans sa sacoche. Le loup sauta à la gorge de l’homme qui ne le vit que trop tard. Un coup de feu retentit dans la vallée et tous les animaux frémirent à l’entente de ce son fatal. Le loup mourut sur le coup et s’affaissa sur Eric. La meute se stoppa dans son élan alors que le canon du pistolet de la jeune femme laissa s’échapper une fine fumée. Une balle, un tir, elle n’aurait pas une seconde occasion de l’utiliser. Elle rangea son pistolet fumant dans sa sacoche et aida son époux à se relever. -Merci. Dit-il. -Il faut continuer ! La peur s’était insinuée dans les rangs de la meute. Ils geignaient et se retranchaient derrière les arbres pour se dissimuler de l’arme crachant le feu et la mort. Le couple ne tarda pas à reprendre la fuite en s’enfonçant plus profondément dans les bois enneigés. Les loups ne les suivaient plus depuis un moment alors ils décidèrent de se reprendre leur souffle près d’un gigantesque arbre mort. -On les a semés ? demanda la jeune femme. -Le coup de feu les a effrayés, répondit Eric. Mais je doute qu’ils aient abandonné la traque. -Ce sont des leups ? C’est ça ? demanda-t-elle haletante. -Des loups, Ariel, des loups. Répondit-il en reprenant son souffle avec un sourire. Leur halte prit fin lorsque les grognements de la meute résonnèrent au loin. L’épaisse neige les ralentissait et ils étaient tous deux exténués. La traque touchait à sa fin et leurs chasseurs se rapprochaient. Eric aperçut soudainement à travers les arbres, un immense mur de marbre blanc. -Par-là ! Il prit Ariel par la main et ils bifurquèrent vers la muraille. C’était un grand mur sans fenêtres sans portes qui s’étendaient le long de la forêt sur leur gauche et à leur droite. S’il y avait un mur, c’était pour protéger des personnes des dangers de la forêt. Ils devaient trouver une porte et vite. Ils longèrent le mur sur une certaine distance. La neige était moins épaisse prouvant qu’il y avait un chemin proche des murailles qui entouraient tout le domaine. La lune s’était levée dans le ciel sombre mais elle était dissimulée par une brume fantomatique. Ils continuèrent leur course redoublant d’efforts tandis que les loups filaient entre les arbres à leur poursuite. Ils arrivèrent enfin devant un grand portail en fer forgé. Ariel et Eric se jetèrent dessus et tentèrent de l’ouvrir. Le portail était ancien et usé. Ils tirèrent sur les poignées peintes d’un jaune d’or mais les portes restèrent fermées. Les loups les entouraient. Ils n’avaient aucune échappatoire. Eric s’élança sur le portail et la porte s’ouvrit à la volée. Ariel passa la porte en un éclair et la referma. La porte fut secouée par la meute qui grogna et aboya montrant les crocs. Ariel et Eric restèrent au sol haletant, à espérer que le portail tiendrait contre la furie des loups. Après quelques minutes, quelques yeux jaunes disparurent dans la forêt tandis que les plus enragés des loups restaient au portail avec leurs babines retroussées et leurs estomacs vides. Eric et Ariel se relevèrent et regardèrent autour d’eux. Ils étaient dans une petite cour pavée et face à eux s’étendait un long pont en pierre qui fendait le brouillard. Au-dessus du pont, ils crurent distinguer à travers la brume de longues tours qui s’élevaient vers le ciel. C’était un grand château monté sur un gros monticule de pierre au cœur de la vallée. -Où est-ce que nous sommes tombés ? dit Eric à haute-voix. Les loups décidèrent de battre en retraite et disparurent dans les tréfonds de la forêt. Affamés et exténués, Eric et Ariel s’engagèrent alors sur le pont de pierre en direction du sombre et lugubre château.
_________ Alors qu'en pensez-vous ? J'espère que ce petit avant-goût vous a plu.
Le chapitre 2 - "Des visiteurs inattendus" arrivera sous peu.
Dernière édition par Lexias le Dim 27 Oct 2013 - 19:57, édité 1 fois |
| | | Lexias
Âge : 31 Messages : 11 Inscription : 27/08/2013
| Sujet: Re: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Mer 18 Sep 2013 - 21:24 | |
| Comme promis, je reviens avec le chapitre 2 dans la continuité du premier chapitre. J'espère que ça a plu à ceux qui l'ont lu. ^^'
Bonne Lecture !___________________________________________ - Chapitre 2 - Des visiteurs inattendus:
Chapitre 2 – Des visiteurs inattendusAriel et Eric hésitèrent quelques instants avant de s’engager sur le pont de pierre qui menait au sinistre château qui fendait la brume. Sur les rebords du pont, ils distinguèrent à travers le brouillard des formes monstrueuses et grotesques. Lorsqu’ils s’approchèrent, ils réalisèrent que ce n’était que des statues angéliques représentant des divinités à demi-nu arborant soit des armes guerrières soit des instruments de musique lyrique. Ils s’avancèrent jusqu’à distinguer l’entrée du château. Il commença à neiger et le vent doubla en force. Ariel et Eric mirent les capuches de leur manteau de voyage. La porte était en bois décorée par de fines sculptures de fer forgé noir. Des frappoirs étaient installés sur les portes, Eric s’approcha prêt à en saisir un. L’obscurité s’étendit dans la vallée. La neige chutait à gros flocons poussé par un vent glacial qui gagnait en force à chaque instant. Les loups rôdaient aux alentours. Ils ne pouvaient plus faire machine arrière. Ils étaient tous les deux affamés et fatigués et cette sombre demeure semblait être le seul endroit où ils pourraient espérer trouver de l’aide. Ariel tira les pans de son manteau pour se protéger du froid et Eric ce décida à frapper. Deux coups secs sur la porte mais rien ne se passa. Le vent hurla contre les parois du château avec un sifflement fantomatique qui donna des frissons au couple. Eric frappa à nouveau quatre coups sur la grande porte. Mais elle resta close. C’était l’unique salut pour Ariel et Eric d’échapper au froid et à chaque instant que ils passaient dehors cet espoir semblait s’envoler, soufflé par le blizzard de cette nuit d’hiver. Eric plongea ses yeux dans les pupilles azur d’Ariel. Elle répondit à sa détresse en soufflant : -Une dernière fois … Eric se retourna vers la porte qui restait toujours fermé. Il agrippa fermement le frapper et il fit tonner le bout de métal contre le bois de la porte. A six reprises, il frappa et c’est à la sixième que la porte s’ouvrit sur un chandelier. C’était un chandelier en or massif portant trois bougies semblable à un petit trident. La cire séchée ruisselait le long des bougies telles des gouttes figées par le temps. Une main tenait la base de l’objet. Une main épaisse aux doigts potelés qui appartenaient à une femme ronde d’âge mur qui se dissimulait dans l’entrebâillement de la porte. Ses petits yeux, faiblement éclairés par la lumière des bougies, se posèrent sur le couple et avant qu’elle ait pu dire quelque chose, Eric s’empressa de s’annoncer : -Pardonnez-nous ! dit-il d’une voix forte pour couvrir le bruit du vent. Nous sommes deux voyageurs ! Notre chariot est endommagé et nous avons dû quitter la route à la recherche d’un abri ! Pouvez-vous nous accorder le logis pour la nuit ? La femme à la porte resta muette, son regard se porta tour à tour sur l’homme brun et la jeune fille aux cheveux rouges. Elle porta longuement son attention sur la jeune fille dont les yeux bleus semblaient la supplier d’accepter. La femme sortit de sa transe et répondit rapidement. -Bien sûr ! Entrez ! Elle ouvrit plus largement la porte et laissa Ariel et Eric passer le seuil de la grande demeure. Elle referma la porte derrière eux et les hurlements du vent se turent. Ariel et Eric soupirèrent de soulagement lorsqu’ils ne sentirent plus le vent et le froid leur mordre la peau à l’abri de la neige et des dangers. -Merci infiniment, dit Ariel à mi-voix. Les bougies éclairèrent le large sourire qui rayonnait sur le visage de la femme qui les avait fait entrer. -C’est tout naturel ! dit-elle. Le froid est cruel avec les voyageurs malchanceux et cet hiver est l’un des pires que j’ai vu dans ma simple vie. Ariel et Eric secouèrent leurs manteaux et la neige s’éparpilla devant la porte d’entrée. Ariel et Eric observèrent attentivement le hall d’entrée du château. C’était une immense salle éclairée de part et d’autres par des fines bougies, particules de lumières qui permettaient de rendre l’endroit moins sinistre qu’il y aurait pensé. Face à la porte d’entrée, à des dizaines de mètres, un escalier donnait sur une grande porte. Au seuil de cette double porte, deux escaliers partaient de chaque côté le long du mur pour rejoindre les étages. Un long tapis rouge sombre reliait la porte d’entrée à l’escalier principal et de nombreuses portes s’étalonnaient de chaque côté de la salle. Le hall était faiblement éclairé mais Eric et Ariel purent voir à quel point ce château était luxueux par les nombreuses statues qu’ils distinguèrent dans des alcôves ainsi que les gigantesques tableaux aux murs. -Venez-vous réchauffez mes pauvres enfants. Dit la femme en leur emboitant le pas. Ariel et Eric la suivirent sans hésitation vers une porte sur la droite. Ils passèrent sous de monumentales colonnes où trônaient des colosses de pierres qui soutenaient le plafond. La femme leur ouvrit la porte et les invita à entrer. C’était une pièce éclairée par un grand feu se consumant sur de grosses buches dans une cheminée sculptée. De larges fauteuils étaient installés proche du foyer. Une table en bois recouverte de napperons était placée dans un coin de la salle au pied de portraits de nobles individus accrochés au mur. Sur l’un des fauteuils, un homme filiforme avait le regard figé sur le brasier. Il avait de grands yeux, un long nez et grande bouche et il tirait de profondes inspirations d’une pipe en bois. Il ne les avait pas entendu entrer tant il était profondément plongé dans ses pensées. -Lumière. Nous avons des visiteurs. Dit la femme. L’homme se releva d’un seul bond et fit face à Ariel et Eric. Il était habillé de vêtements jaune et marron forts élégants. Il fit un immense sourire au jeune couple. -Madame Samovar ! Qu’avez-vous trouvé là ? -De jeunes gens qui se sont égarés sur la route. Dit-elle en enlevant le manteau des épaules d’Eric. -Ce n’est pas une période pour rester dehors. Répondit le dénommé Lumière. Surtout pour les jeunes filles. Il fit un baisemain à Ariel, qui rougit sous la surprise, et l’invita à enlever son manteau de voyage alors qu’Eric se décida à prendre la parole. -Nous avons rencontré un imprévu sur la route et nous avons … -Prenez place auprès du feu, la coupa Madame Samovar. Vous devez être frigorifié ! Eric fut installé sur le fauteuil central et Lumière fit asseoir Ariel dans un siège non loin de son époux et poussa leur fauteuil pour les rapprocher du feu. -Désirez-vous quelque chose à manger ? demanda Mme Samovar. -Vous être trop bonne. Souffla Ariel après un instant. Nous prendrons ce que vous pouvez nous donner. Samovar sortit rapidement de la pièce alors que Lumière s’installa sur un troisième fauteuil, sa pipe en main. -Maintenant que vous êtes installés, commença Lumière. Racontez-nous votre épopée, qu’est-ce qui vous a menez dans notre demeure ? Ariel et Eric croisèrent le regard. -C’est une longue histoire, expliqua la jeune femme. Nous venons d’un royaume lointain. -Nous avons voyagé depuis le nord. Poursuivit Eric. Depuis un petit royaume que vous ne devez pas connaitre car il y a énormément d’infimes parcelles de terre qu’on appelle royaumes dans nos contrées. -Il est vrai que j’ignore de nombreuses choses à propos de ces régions éloignées. Dit Lumière. Pourquoi êtes-vous partis de votre pays ? -Nous sommes partis à l’aventure. Déclara Ariel. -Racontez-moi votre périple. Dit Lumière enjoué. Leur récit dura une dizaine de minutes. Ils contèrent les grandes lignes de leur voyage : leurs nombreuses haltes dans les villages et les auberges du pays, leurs épreuves à travers les montagnes, les rivières qu’ils avaient dû traverser et les dangers qu’ils durent affronter. Lumière resta assis sur son fauteuil, à l’écoute d’Ariel et d’Eric qui, tour à tour, lui relataient leurs aventures. La fumée s’élevait lentement de sa pipe et allait disparaitre dans les coins obscurs du plafond tandis que le feu de cheminée crépitait dans le foyer. -C’est une sacré histoire, avoua Lumière lorsqu’ils eurent terminé. Et je suis sûr que vos aventures ne sont pas terminées. Dès qu’il eut fini sa phrase, Lumière se releva brusquement sur son siège, se tenant aux accoudoirs. -Mais quel imbécile je fais, je ne connais toujours pas vos noms ! dit-il. La rousse fut la première à se présenter. -Je me nomme Ariel. Et voici … -Eric, à votre service. Des sifflements se firent entendre dans le grand hall du château. Lumière tendit l’oreille et se leva de son fauteuil. -Monsieur, Madame. Je crois que votre diner est prêt. Les sifflements se rapprochèrent et se firent plus stridents lorsque les portes de la salle s’ouvraient à la volée pour laisser passer Mme Samovar poussant un grand plateau doré à roulettes sur lequel reposait un volatile cuit entouré de pommes de terre et de légumes et quelques assiettes et couverts. -Prenez place ! dit-elle en montrant la table. Ariel et Eric s’assirent face à face et Mme Samovar leur mit le couvert. Lumière l’assista et commença à découper le poulet aux herbes. Les deux voyageurs étaient traités comme des rois alors qu’ils y a quelques instants, ils étaient à la porte, dans le froid, comme de simples mendiants. Ariel regardait cependant la carcasse de l’animal d’un air intrigué. Cela faisait très peu de temps qu’elle avait dû suivre des cours spéciaux avec Maitre Grimsby pour apprendre tout ce qui touchait à la surface et à la vie des « êtres d’en haut ». Tout cela avait commencé par des choses enfantines qu’Ariel avait aisément assimilé et ce avec entrain. Mais plus les leçons devenaient complexes, plus elle commençait à les haïr. Et Grimsby préférait l’initier à l’histoire et aux sciences physiques alors qu’Ariel préférait apprendre et connaitre la faune et la flore de la surface. Voyant qu’Ariel perdait patience avec les leçons du vieux Grim, Eric avait alors avancé son projet de voyage avec elle et ils étaient partis avec hâte laissant Grimsby et ses leçons derrière eux. Et pourtant, Ariel se trouvait devant un animal et elle n’arrivait pas à l’identifier. C’eut été bien plus simple de le reconnaitre lorsqu’il était vivant, quand il avait ses plumes et sa tête. Lorsque Mme Samovar déposa une cuisse dans son assiette avec deux pommes de terre et des petit pois, Ariel l’interpella avec hésitation : -Dites-moi. Quel … quel est cet animal ? La domestique la regarda avec étonnement et répondit avec gêne en recouvrant le plat de sauce : -C’est un poulet, ma … chère. Eric souffla de soulagement. Il pensa qu’ils auraient pu avoir bien pire comme incident pour le repas. Après tout, Ariel se refusait à manger toute sorte de poisson ou produit provenant de sous l’océan. Lumière et Mme Samovar auraient surement mal vu que leur jeune invité refuse le plat qu’ils lui auraient servi. Elle avait aussi appris à se servir des couverts depuis son premier repas à la surface et Eric remercia sa domestique Carlotta d’avoir appris le protocole et les bonnes manières à son épouse. Dès que le poulet fut dans leurs assiettes, Ariel et Eric se jetèrent sur le plat. Ils dévorèrent avec immense satisfaction cet excellent repas sous les yeux de Lumière et Mme Samovar. -C’est délicieux, déclara Ariel entre deux bouchées. -Je vous remercie, ma douce enfant. Répondit le cordon bleu du château. C’est une chance que vous ayez trouvé ce château. -Je ne sais pas comment vous remercier, dit Eric. Nous serions morts de froid et de faim si vous ne nous aviez pas laissé entrer. -Nous accueillons tous les voyageurs dans le besoin depuis une certaine mésaventure. Déclara Lumière. Les deux domestiques échangèrent un regard complice laissant leurs invités inattendus finir leur repas. -Lorsque vous aurez fini, nous pourrons vous mener à vos chambres. Annonça Mme Samovar. Lumière et Mme Samovar guidèrent Ariel et Eric à l’extérieur de la pièce pour revenir dans le grand hall. Les chandeliers sur les piliers étaient presque consumés lorsque des voix se firent entendre du grand escalier. Ariel et Eric distinguèrent trois silhouettes au sommet de l’escalier devant la gigantesque porte de la salle de bal. Deux d’entre elles étaient rondouillardes et petites tandis que la troisième dominait les autres d’une grande et haute stature. Ils discutaient à mi-voix mais leurs paroles résonnaient dans la salle. -Le médecin dit que tôt ou tard, il faudra que je fasse un choix. -N’y-a-t-il aucun autre moyen ? -Il n’existe aucun remède. -C’est malheureux, Maitre … Malheureux … -Elle est si affaiblie. Elle souffre à chaque instant. Je ne sais que faire Big Ben. -Vous êtes à bout, Sire. Vous devez aussi vous reposer. Nous allons veiller sur elle. -Oui, nous resterons à son chevet. Lumière prit un chandelier sur une table et fit un signe de tête à Ariel et Eric en direction du grand escalier. Ils suivirent le domestique élancé jusqu’en haut des escaliers où ils purent rencontrer ceux qui murmuraient dans le noir. A la lumière du chandelier, ils purent voir que le premier était un petit homme chauve aux cheveux blancs, à l’épaisse moustache, habillé simplement et aux yeux emplis de tristesse. Le second avait un visage rond et des cheveux châtains bien peignés, tout comme la fine moustache noire placé sous son petit nez écrasé. Il était habillé de manière distingué avec un pantalon serré, et un veston dans lequel il conservait une montre à gousset relié à uen chaine dorée. Dans son regard, on pouvait lire de l’inquiétude et de l’angoisse. Ce fut le troisième individu qui retint l’attention d’Ariel et Eric. C’était un grand homme bien bâti vêtu d’une large chemise blanche, pantalon noir et de bottes brunes. Son visage était pâle, aussi blanc que la neige qui tombait au dehors et ces longs cheveux châtains clairs étaient attachés en une queue de cheval qui descendait en dessous de sa nuque. Il était beau mais ses yeux bleus cachaient reflétaient un profond désespoir. Ariel resta sublimée par son regard pénétrant. Au fin fond de ces pupilles bleues, elle vit une immense détresse. Elle plongea dans cet océan bleu et azur rempli de peur, de rage et de colère. Ses yeux restèrent indifférents lorsqu’il aperçut Ariel et Eric. Son visage restait couvert d’un voile de mélancolie et de souffrance. Des poches étaient creusées sous ses yeux, séquelles de nombreuses insomnies. Mme Samovar et Lumière saluèrent les trois hommes de la tête quand celui à la montre à gousset demanda : -Lumière, qui sont ces personnes ? -Ce sont des voyageurs qui ont eu un imprévu sur la route. Ils ont besoin d’un refuge pour la nuit. Lumière s’était tourné vers l’homme de haute stature. Ce dernier porta son regard dans le vide avant de baisser les yeux sur Ariel et Eric. Ses yeux semblaient les traverser tels des êtres transparents de simples songes dans une sombre nuit. -Vous êtes les bienvenus, dit-il avec une voix sans chaleur et morne. Prenez le repos nécessaire avant de reprendre votre route. Mes domestiques sont à votre service. Eric et Ariel soufflèrent un « merci » à celui qui apparaissait comme le maitre des lieux. Mme Samovar pressa le couple de monter l’escalier droit pour rejoindre l’aile est du château laissant derrière eux les trois hommes qui disparurent dans l’obscurité et en silence, semblable à des fantômes tourmentés par la souffrance et la tristesse. -Mme Samovar, pardonnez mon indiscrétion, demanda Eric alors qu’ils traversaient un long corridor. Votre maitre semble profondément tourmenté. Qu’est-il arrivé ? Lumière ne réagit pas à la question et continua d’éclairer la voie avec son chandelier dans les méandres du château. Mme Samovar, quant à elle, perdit ses couleurs. Sa bouche se tordit en une moue désolée et elle balbutia quelques mots : -Ce n’est pas très important. Voyant que la domestique se décomposait, Ariel tenta de la réconforter mais Lumière les interrompit : -Inutile de vous larmoyer, dit-il avec un faux sourire. Vous avez suffisamment été éprouvé avec votre escapade dans la forêt. D’ailleurs, voici votre chambre. Il ouvrit une porte blanche et laissa le jeune couple entrer dans la chambre. Ils débouchèrent sur une grande pièce avec un lit à baldaquin aux draps mauves sombres coincé entre deux tables de nuit blanches sculptés. Contre le mur, il y avait une grande armoire avec de nombreux miroirs et de tableaux de chasses aux imposantes dimensions. Lumière entra dans la chambre et alluma un second chandelier qui reposait sur une commode. -La salle de bains est ici. Annonça-t-il en montrant une porte en face du lit. Prenez vos aises et passez une bonne nuit. Si vous avez besoin de quelque chose, faites sonner la cloche. Il montra une cordelette tendue près du lit qui montait jusqu’à un minuscule trou au plafond. -Sur ce, bonne nuit, mes amis ! Dormez bien ! -Merci à vous aussi, répondit Ariel. Lumière laissa échapper un sourire lorsqu’il referma la porte de la chambre et laissa le jeune couple éclairé à la simple lumière du chandelier. Mais quelques paroles du domestique passèrent au-delà de la porte de la pièce et parvinrent aux oreilles. -Allons ma chère, il ne faut pas perdre espoir … S’en suivit les sanglots étouffés de Mme Samovar qui s’éloigna de la chambre en compagnie de Lumière. Les pleurs de la gouvernante du château s’éteignirent dans la nuit. Eric et Ariel furent seuls dans la chambre dans le noir avec le hurlement fantomatique du vent qui frôlait leurs fenêtres. *** Les rues de la Cité Impériale étaient désertes lorsque le soleil commença à frapper les gigantesques murailles du palais. Shang s’était réveillé avant l’aurore et s’était préparé pour son long voyage. Dès le saut du lit, il s’était habillé de son armure dorée et était monté à cheval suivi par ses aides de camp pour rejoindre ses troupes. Il passa les hautes portes de l’enceinte du palais et fut aveuglé par les rayons du soleil. Son cheval martela les rues enneigées avec ses sabots suivis par les montures de ces deux portes étendards. Le dragon d’or flottait sur la bannière rouge, bercé par la brise matinale. La Cité Impériale était ensevelie sous la neige et hibernait en l’attente de meilleurs jours. Shang croisa quelques malheureux qui somnolaient au seuil des portes à l’abri du froid. La misère était la seule chose qui avait germé durant ce redoutable hiver. Les mendiants et les affamés erraient dans les avenues à la recherche de nourriture ou de bons samaritains prêts à donner quelques piécettes aux miséreux. Il vit des marchands et des fermiers installer leurs étals le long des maisons, prêts pour une longue journée de commerce et de troc avant de repartir pour les campagnes avec de quoi subsister pour leurs familles. Shang prit de l’allure en frappant sur les flancs de son destrier blanc et celui-ci fila à travers les rues. Le jeune général aperçut au loin dans la grande avenue, une grande cohorte d’hommes qui marchaient au pas. Il les rattrapa en peu de temps et vit qu’il s’agissait d’une trentaine de soldats en armure noires allant vers les portes de la cité. Les meneurs étaient à cheval et Shang et son escorte les dépassèrent avant de s’arrêter au niveau de celui qui menait cette troupe. -Général Wei. Vous êtes bien matinal. déclara Shang. Le vieux militaire laissa la surprise passer sur son visage et afficha un grand sourire. -L’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt. Dit-il. Et j’ai un long voyage devant moi avant d’atteindre les frontières nord. Et le temps joue contre moi. -Avec ce qui est arrivé à Huan Chao, je vous conseille de voyager avec prudence. -Je n’ai pas l’intention de me laisser piéger par de vulgaires brigands. Répondit Sun Wei avec orgueil. Mais je vous remercie d’être soucieux pour le vieil homme que je suis. Le pas des soldats et des cavaliers étaient réguliers et sonnants contre la neige. Les fenêtres et les portes des maisons s’ouvraient à leur passage. Les garçons regardaient ces soldats avec émerveillement en plissant les yeux après une nuit qui leur semblait toujours trop courte. Les femmes observaient avec mélancolie ces hommes qui partaient pour un combat duquel ils ne reviendraient peut-être pas. Des rumeurs s’étaient propagées dans les villes et les campagnes. Des villages et des fermes étaient pillés aux bordures de l’Empire du Milieu. On voyait des étrangers et des bandits rôder dans les bois et les montagnes. La mort du général Huan Chao avait attisé cette peur naissante dans le cœur des Chinois. Ils se mettaient à espérer que tout ceci cesserait avec l’arrivée du Printemps mais celui-ci tardait. -Mais d’ailleurs, Général Shang ? Pourquoi êtes-vous ici ? demanda le vieux général. Serait-ce en rapport avec votre entretien avec l’Empereur hier soir ? Shang resta silencieux un instant. Les yeux du général semblaient percer son cœur pour y sonder tous les recoins de son âme. Il détourna son regard vers l’entrée de la cité et déclara : -Je dois aussi quitter la Cité Impériale ... -Et pour quelle destination ? Coupa Wei. Ces paroles avaient été tranchantes comme un couperet. Le général avait changé de voix pour un simple instant. Un ton inquisiteur et une voix sombre que Shang aurait décrite comme menaçante si elle n’était pas sortie de la bouche du vieil ami de son père. Shang décida de relever le défi. Il resta de marbre et jaugea du regard Sun Wei dont la bouche se tordit lentement en un sourire. Un sourire qui en apparence était amical, mais qui dissimulait un ressentiment que Shang n’avait eu aucun mal à déceler. -Très bien. Gardez vos secrets, mon garçon. Rit Sun Wei. Vous devez avoir de bonnes raisons. Afin d’éviter un long moment d’embarras et de tension, Shang relança la conversation en changeant de sujet. -Nous pensons être matinaux mais le Général Tian est parti au beau milieu de la nuit avec son escorte. -C’est un homme qui aime agir dans l’ombre, grogna le général. Il a des oreilles dans tout l’Empire, et dans tous les royaumes alentour qu’ils soient alliés ou ennemis. -Sans cela, nous n’aurions pu connaitre le plan d’invasion des Japonais. Argumenta Shang. -Je n’aime pas cet homme, Shang. Je ne l’ai jamais caché d’ailleurs. Je me méfie de lui. Il est sournois et calculateur. Quelles preuves avons-nous que les Japonais prévoient de nous attaquer ? Shang savait parfaitement que le vieux général n’avait aucune affection ou sympathie pour Meng Tian. Parmi les rangs des militaires, c’était un fait connu. Mais le général Wei n’en avait pas encore parlé si ouvertement à Shang. Avec la mort de Chao, les Généraux d’Empire semblaient plus désunis que jamais. -L’Empereur lui fait confiance. Son jugement vaut bien plus que le nôtre. -J’ai toujours été contre sa nomination. Répliqua Wei. Je ne vois pas pourquoi l’Empereur a tenu à ce qu’il devienne Général d’Empire. -Vous ne faites peut-être pas confiance à Tian. Mais l’Empereur semble avoir pleinement confiance en lui. Douteriez-vous de l’Empereur ? Cette fois, ce fut Wei qui crut qu’on le soumettait à la question. Les yeux de Shang étaient froids et durs mais le vieux général ne se laissa pas berner par un enfant qui tentait de jouer dans la cour des grands. -Vous êtes malin, Shang. Vous êtes loyal à l’Empire du Milieu tout comme l’était votre père. Dit Wei. Gardez une part de votre libre arbitre. A l’école militaire, on vous a appris à obéir afin de pouvoir commander. Aujourd’hui, je te demande plutôt d’agir en pleine conscience de tes actes et tes motivations. Surtout en ces périodes troubles. Shang ne réagit pas aux paroles du vieux Wei mais elles restèrent gravées dans son esprit comme une leçon qu’il ne devrait jamais oublier. Deux gamins avec des épées en bois passèrent rapidement devant le convoi armé et les montures des deux généraux se cabrèrent sous la surprise. Shang et Wei n’eurent aucun mal pour calmer leurs chevaux tandis que les deux garçons s’arrêtèrent en demandant pardon aux généraux impériaux. -Désolé … Général ! On voulait pas … s’écria un gamin. Sun Wei éclata d’un rire gras qui réveilla tout le quartier. -Tout va bien ! Soldats, plaisanta le vieil homme. Déguerpissez maintenant ! Les deux enfants se regardèrent atterrés puis prirent leurs jambes à leurs cous disparaissant entre les maisons. Cela rappelait à Shang, son enfance. Il avait aussi l’habitude de jouer aux guerriers, étant petit, défendant la Chine contre les envahisseurs, prêtant allégeance à l’Empereur et à l’Empire du Milieu. Le convoi reprit sa route alors qu’ils approchaient de plus en plus des portes de la cité. Les hauts et solides murs les dominaient de toute leur imposante puissance. Des soldats patrouillaient sur les remparts et observaient la troupe qui s’avançait à travers la ville. -Concernant votre question, commença Wei, mon allégeance va à la Chine. Je suis dévoué à elle entièrement, de toute mon âme. Mais notre Empereur arrive au crépuscule de sa vie, il n’est plus l’homme qu’il était autrefois donc je m’autorise à parfois remettre en question ses décisions. -Et pourtant, vous marchez avec vos troupes pour le nord tout comme il vous l’a ordonné. Dit Shang avec ironie. -Des villages et des personnes sont menacés, répliqua Wei qui n’avait pas aimé la remarque du jeune général. Huan Chao a payé au prix fort, la négligence de l’Empereur sur les malfrats qui pullulent son Empire. Nous nous devons d’éviter qu’un nouveau malheur survienne. Shang avait parlé un peu trop vite. Il se mit à regretter ce ton ironique qu’il avait pris contre un homme qui l’avait aimé et respecté depuis toujours. -Je crois toujours en notre Empereur et je crois que vous aussi vous ferez la bonne décision. Termina le jeune général. Sun Wei tapa sur l’épaule du jeune général avec un grand sourire. -Nous sommes vraiment de la même trempe, mon garçon. La troupe passa sous les portes de la cité et déboucha sur une immense plaine. Au loin, on distinguait de hautes montagnes enneigés et des collines où des rizières dévalaient les pentes éclairées par les rayons du soleil. Un chemin, recouvert de neige, s’étendait sur le long de la plaine avant de disparaitre dans une épaisse forêt de bambous, affaiblis par la rigueur de l’hiver. De chaque côté de ce chemin, des campements avaient été installés avec de minces palissages en bois et des tentes en lin qui s’affaissaient sous le poids de la neige. L’un des campements avait été vidé. Il s’agissait des troupes du général Wei. Elles l’attendaient non loin de là, sur la plaine en rang de bataille. Il y avait plus cinq milles hommes : des archers, des lanciers, des bretteurs ainsi que des cavaliers montés. Tous se préparaient à rejoindre les frontières nord de la Chine pour mettre fin aux troubles apportées par les bandits et les malfrats qui parsemaient ces régions. Ce fut à cet instant que les deux généraux choisirent de se faire leurs adieux. -Nos chemins se séparent, Shang ! Annonça Wei. Puisse votre mission être couronnée de succès. Soyez prudent, mon garçon ! -Puissions-nous nous revoir en des jours moins sombres. Répliqua le jeune général. Faites honneur à la Chine. Sun Wei fit un dernier signe de tête à son comparse et mit sa monture au galop pour rejoindre son bataillon. Dès que le vieux général fut à portée de l’armée, les tambours de marche résonnèrent dans la vallée. Ils frappèrent de gros coups et l’écho se répercuta dans les montagnes alentour puis l’armée se mit en marche. Shang rejoignit son campement avec ses aides de camps. Une dizaine de cavaliers l’attendait en armure prêt à partir pour la mission secrète que l’Empereur avait confiée à Shang. Mais trois soldats étaient positionnés devant l’entrée camp et attendaient le retour de leur supérieur. Lorsque le cheval blanc de Shang arriva à leur porté, le plus petit d’entre eux interpella le général : -Général ! Il faut faire quelque chose ! Ca fait des mois qu’on stationne ici dans le froid ! -On meurt de froid ! Rajouta le plus maigre des trois. -La nourriture se fait rare, termina le troisième qui ressemblait fort à Bouddha. Ling, Yao et Chien-Pô dévisagèrent leur général tandis que celui-ci les ignora totalement. -On a besoin d’action ! s’écria Yao en se craquant les phalanges. Il faut qu’on nous assigne une mission ! Je veux pouvoir frapper quelqu’un avec mes poings, sinon je vais devenir fou !! -Doucement Yao. Dit Chien-Pô d’une voix douce en posant ses mains sur les épaules du soldat bagarreur. Ne t’énerve pas. Penses à ton cœur. -Ouais … T’as raison … souffla Yao alors qu’il prit une grande inspiration. T’as raison … -Vous ne pourrez pas nous ignorez pour toujours, Général Shang. Répliqua Ling. Les hommes sont mécontents et … -Je pars en mission secrète. Coupa Shang. C’est l’Empereur qui me l’a confié et je peux vous assurer que vous ne resterez pas inactifs très longtemps. Je vous demande d’attendre encore un peu. Les trois soldats se regardèrent intrigués et Ling osa demanda : -Et vous n’allez rien nous dire concernant cette mission secrète ? Shang prit le casque doré de général que lui tendait son aide de camp. Il mit le heaume de son père et répondit à ces hommes : -Je dois aller rendre visite à une amie … ***
-Hors de question ! Razoul avait toujours effectué sa tâche de capitaine de la garde avec zèle et fermeté. Il était entré au service du sultan à l’adolescence et était monté en grade très rapidement grâce à sa pugnacité, son sens du devoir et son dévouement au sultan d’Agrabah. Il avait vécu la naissance de la princesse Jasmine et la mort de sa mère Esra, une dizaine d’années plus tard. Il avait survécu au grand pillage d’Agrabah et à la Guerre du Désert. Il avait assisté à la venue d’un nouveau vizir auprès du sultan Tayeb. Un homme du nom de Jafar avec lequel il partageait de nombreux points de vue sur l’ordre et la gestion de la cité d’Agrabah. Mais il s’était avéré que cet homme usurpa le trône du sultan et Razoul n’avait pas oublié à qui il avait porté allégeance. Mais ce ne fut pas lui qui sauva le sultan, ce fut ce vaurien. Il était presque arrivé de nulle part avec un tapis volant et un génie. Razoul ignorait où il avait pu mettre la main sur ses artefacts magiques mais grâce à ces derniers, le rat des rues avait pu gagner le cœur de la princesse et l’affection du sultan. Il connaissait ce malfrat depuis fort longtemps. Depuis de nombreuses années, il s’acharnait à traquer ce jeune voleur dans les rues d’Agrabah et maintenant, il devait le laisser vaquer dans le palais en toute liberté. Ce qui l’exaspérait plus que tout, c’est qu’un jour, ce gamin deviendrait sultan et que c’est à lui qu’il devra porter allégeance. Razoul espérait mourir avant que ce vaurien accède au trône et qu’il mène le pays à la ruine. Il avait même réussi à s’être fait aimer et apprécier du peuple en sauvant à plusieurs reprises Agrabah de menaces, monstres et cataclysmes. Tous ces actes de bravoure, ce moins que rien les devait à son génie et à son tapis, Razoul n’en doutait pas. Et maintenant, il devait supporter tous ceux qui désiraient le rencontrer ou lui demander une audience pour un quelconque service ou une tâche à lui confier. Et Razoul avait d’autre chose à faire que de gérer les affaires de ce gamin. -Je te le redis pour la dernière fois ! Cracha-t-il. C’est hors de question. -Mais pourquoi ? Il était face à un gringalet aux cheveux roux et aux yeux bleus habillé d’une espèce de tunique couleur bronze avec une petite cape bleue. Il n’était pas d’ici, cela se voyait à sa tête. Et de ce fait, il était plus que suspect. Razoul ne cèderait pas. -En ce moment même, une grande réunion se déroule au palais, expliqua le capitaine de la garde. Alors il est hors de question de laisser des quémandeurs comme toi, rentrer dans le palais. -Je souhaite simplement parler à Aladdin. Razoul grinça des dents. Il commençait à perdre patience. Hakim et Fazahl, derrière lui, retenaient les lourdes portes de l’enceinte du palais. La matinée avait été épuisante avec l’arrivée des dignitaires étrangers. La garde avait dû réguler la foule et cela n’avait pas été une mince affaire. Tout ce qu’ils désiraient tous, c’est prendre du repos et ce gamin leur faisait perdre du temps. -Tu ne rentreras pas, gamin ! hurla Razoul. A moins que tu ne fasses partie d’une délégation étrangère invitée. L’adolescent répliqua aussitôt : -Euh … Je fais partie d’une délégation étrangère … Razoul et les gardes le dévisagèrent avec suspicion. -Et de quelle délégation fais-tu partie ? Questionna le capitaine. Le jeune homme se gratta la nuque en évitant le regard agressif de son interlocuteur et balbutia quelques mots avec un sourire peu convaincant. -Je suis … avec … le … le … Roi … de … de The … Thessalie … Razoul referma les portes avec fracas, laissant Hercule à l’extérieur des murailles du palais. L’apprenti héros n’osa pas insister. -Disparais d’ici, morveux !! Hurla Razoul de l’autre côté de la grande porte. Et que je ne te revoie plus ! Hercule soupira et alla s’adosser contre un mur avant de glisser contre la paroi pour s’assoir sur la terre au pied des murailles. Il avait mis tant d’espoir sur sa rencontre avec cet Aladdin que son entrain disparut pour se transformer en un profond désarroi. S’il le désirait, il pourrait fracasser les portes d’un seul coup de poing en utilisant sa force de demi-dieu. Mais ce n’est pas comme ça qu’agisse les vrais héros. Il entendait la voix de Phil dans sa tête : « Règle n°101 – Le héros ne met pas en danger la vie d’autrui ». Pénétrer dans le palais en fracassant les murs et les portes n’était pas le meilleur moyen de rencontrer un héros dans les meilleures conditions. Surtout lorsque ce palais était l’endroit où Aladdin réside. Les murailles étaient bien trop hautes pour les escalader et Hercule savait que l’infiltration n’était pas son fort à cause de sa maladresse. Il ne pouvait qu’attendre. Attendre qu’on lui permettre d’entrer pour lui parler ou que lui-même sorte du palais afin d’accomplir un de ses travaux de héros. Mais il ne savait même pas à quoi Aladdin pouvait bien ressembler. Hercule était dans un pays où il ne connaissait rien et où il n’avait aucun repère. Surtout qu’est-ce qui a bien pu lui passer par la tête ? Il s’était mis en tête de rencontrer un héros reconnu dont il ne savait rien et maintenant qu’il était dans l’impasse. Il avait l’impression de ne plus pouvoir revenir en arrière. Il avait abandonné son épreuve et il se demandait où pouvait être Phil et Pégase à cette heure-ci. Ils devaient être surement à sa recherche, suivant le cours d’eau jusqu’à la mer en espérant le trouver en aval de la rivière. Il frappa l’arrière de sa tête contre le mur. Il s’était vraiment conduit comme un abruti. Soudain il entendit un puissant hennissement dans les cieux et une ombre s’abattit sur lui. La chance lui souriait. -Gamin ! On t’a cherché partout !! Philoctète se laissa tomber de Pégase et alla directement vers son jeune apprenti. Hercule se remit debout, presque hilare de revoir ses amis alors qu’il était au plus mal. -Phil ! s’écria le jeune homme. Pégase ! Sa monture ailée hennit de bonheur et le demi-dieu enlaça l’encolure de l’animal qui souffla un air chaud de ses nasaux blancs. -Je suis heureux de vous voir ! Je croyais que vous ne me retrouveriez jamais ! La bouche du satyre se tordit en une grimace grotesque. -Dis-moi, Herc ? Demanda Phil. A moins qu’il y ait des vahinés, du sable blanc, des mouettes et de la flotte derrière ces murs, t’es pas vraiment dans la direction de la mer. Tu te foutrais pas de moi par hasard ?! Phil était rouge de colère. Hercule aurait espérer éviter ça mais son entraineur était plus que colérique de nature. Il avait fini par supporter ces colères et surtout les retourner à son avantage. -Je sais pas si on te l’a appris à l’école mais tous les fleuves se jettent dans l’immense étendue d’eau qu’on appelle communément la mer ou l’océan. Déclara Phil en faisant de grands gestes avec ses bras. Alors pourquoi je te retrouve ici dans ce trou perdu du désert !!? -Je peux t’expliquer, Phil … commença Hercule. -Règle N°132 ! L’entrainement est essentiel pour la forme du héros et doit … -Laisse-moi m’expliquer ! s’écria son élève. Le satyre fit la moue et croisa les bras en dévisageant son apprenti avec des yeux peu convaincus et ruminant sa rage. -Vas-y, je t’écoute. Grogna-t-il. Hercule sourit, prit quelques instants pour trouver les mots puis se racla la gorge. -Voilà ! Des gens m’ont sauvé de la rivière alors que je dérivais. Ils m’ont donné à boire. J’ai discuté avec eux et ils m’ont parlé d’un héros qui vivrait dans ce palais. Son entraineur haussa les sourcils et regarda son élève, intrigué. -Un héros, ici ? C’est quoi son nom ? Le satyre semblait soudainement très intéressé par ce qu’il venait d’entendre. Hercule, satisfait, continua sur sa lancée. -Il s’appelle Aladdin. Les gens d’ici disent que c’est un grand héros, qu’il a vaincu de nombreux monstres et que … -Attends ! Attends ! Petit ! Coupa Phil. Est-ce qu’ils t’ont dit qui était son entraineur ? Hercule ne comprit pas où le satyre voulait en venir même Pégase affichait un air interrogatif. -Eh bien, … ils ne m’ont rien dit … là-dessus … Le visage de Phil rougeoya intensément alors qu’il se mordait la lèvre pour s’empêcher de hurler. -C’est encore un coup de CHIRON … Grommela-t-il en ses dents. Ce stupide … centaure !! Il ne pouvait pas s’en empêcher !! Le satyre commença faire les cent, pestant et maudissant dans sa barbe. -Il prend des apprentis supplémentaires !! J’en étais sûr qu’il essayait de me doubler ! Il connait la règle, nom de Zeus !! Un entraineur, un apprenti !! Je croyais qu’il entrainait ce fils à maman d’Œdipe mais en fait, il entraine d’autres héros dans un coin paumé du désert !! Il va le payer … il va le payer !! -Phil ! Calme-toi !! Lâcha son apprenti. Qu’est ce qui te permet de dire que c’est Chiron qui l’a entrainé ? Le satyre continua de tourner en rond frappant avec ses sabots, la terre retournée. -Chiron a toujours essayé de me nuire ! Pesta Phil. Lorsque j’ai entrainé Achille, il a entrainé Hector ! Lorsque ces deux-là se sont affrontés en duel à Troie, j’ai vidé ma réserve complète d’amphores de vin et j’ai eu la pire gueule de bois de ma vie lorsque Achille l’a vaincu. Chiron était furieux et il a finalement entrainé Paris et puis « Cric, Crac, Badaboum », la flèche dans le talon, mon champion Achille finit en charpies … On ne pouvait raisonner Phil lorsqu’il était dans cet état. Hercule croisa le regard de Pégase qui souffla longuement en hochant la tête, fatigué du comportement de chèvre du satyre. Dans un éclair de génie, Hercule eut soudain une brillante idée. Un immense sourire se dessina sur son visage. -Phil. Nous n’avons qu’à interroger cet Aladdin et il nous révèlera le nom de celui qui l’a entrainé. Expliqua Hercule. Philoctète resta immobile un instant et pivota sur ses sabots pour faire face à son jeune apprenti. -C’est pas une mauvaise idée, gamin ! S’étonna le satyre. C’est une très bonne idée même ! Hercule explosa de joie et jubila de l’intérieur, il avait réussi à retourner la colère de Phil en sa faveur. Le jeune héros monta sur Pégase et tendit la main à son entraineur. -Il est dans ce palais ! Allons le trouver, Phil ! Le satyre attrapa la main d’Hercule qui le tira sur la croupe du cheval ailé. -On va aller débusquer ce fumier et lui tirer les vers du nez ! hurla l’entraineur de héros. Hercule s’agrippa à la crinière bleue de sa monture et en deux battements d’ailes, Pégase s’éleva au-dessus des murailles du Palais. Quelques temps auparavant, alors que les seigneurs des Sept Déserts attendaient que les fastueux desserts soient servis par les domestiques, Aladdin put s’échapper de la table du festin pour aller sur l’immense balcon donnant sur les jardins du Palais. Ils étaient envahis par toutes les tentes et chapiteaux dressés par les différentes délégations étrangères parvenues à Agrabah avec leurs seigneurs. Ils s’étaient répartis autour de la grande fontaine blanche et parmi les bois qui couvraient les bordures des murailles. Il voyait les cavaliers d’Arwa qui festoyaient autour d’une grande table en bois, les courtisanes de Saba se prélassaient au soleil sur une kyrielle de coussins et les chameaux de la province de Nawal s’abritaient sous les arbres aux cotés de l’éléphant d’Hassan, Roi d’Hyrouk. Les sculpteurs d’Hircine s’affairaient sur des bustes de marbre afin d’immortaliser le visage de redoutables soldats ou de magnifiques concubines car ils étaient parmi les plus illustres artistes que la Terre avait portée. Les jardins du palais, habituellement si paisibles, étaient maintenant une immense fourmilière où différents insectes pullulaient entre des tentes et des pavillons aux couleurs sombres. Aladdin chercha du regard Rajah et Abu. Chaque après-midi, le singe et le tigre aimaient trainer dans les jardins et profiter du calme des bois pour faire un somme après avoir réussi à voler quelque chose dans les cuisines du palais. Aladdin crut les apercevoir au loin, au pied des murailles entre deux arbres. Rajah était à l’ombre sous un grand olivier et il distinguait une petite forme brune qui somnolait sur une mince branche de l’arbre. Les jours se suivaient et se ressemblaient pour ces deux-là mais cela les importait peu. Aladdin aurait aimé partager cette même insouciance. Rien ne semblait les perturber malgré le brouhaha qui régnait dans les campements et les tentes. Aladdin releva les yeux vers le ciel. Il n’y avait aucun nuage dans les parages seul le soleil rayonnait au-dessus de lui. Il observa encore l’horizon et espéra voir arriver au loin la silhouette azur flottante et détonante du Génie, volant vers eux en compagnie du Tapis. -Tu sembles préoccupé. Aladdin se retourna et vit le Prince Munir passer entre les gigantesques colonnes de la salle du trône pour le rejoindre sur le balcon. Le jeune prince marchand avait parlé avec une familiarité qui étonna Aladdin. Depuis le banquet, il avait toujours gardé une certaine distance avec lui mais ce rapprochement l’intriguait fortement. -Tu n’es pas très à l’aise depuis le début du banquet, ajouta Munir. -Qu’est-ce qui vous fait dire ça ? -Tu peux me tutoyer Aladdin. Je ne suis pas si différent que toi. Répliqua le Prince gêné. -Prince, qu’est-ce que vous voulez dire ? Continua Aladdin, troublé. Munir se gratta la tête et se plaça aux côtés d’Aladdin sur la balustrade du balcon et soupira. -Pardonne moi, pour toute à l’heure. Mais je préférais te parler ouvertement face à face. Bien que sa soudaine familiarité ait surprit Aladdin, Munir gardait la même sincérité dans ces propos. Sa voix était toujours claire et assurée. -Cela fait longtemps que je voulais te rencontrer Aladdin. Parce que nous sommes identiques toi et moi. Aladdin restait silencieux, il ne savait vraiment pas où le Prince marchant voulait en venir alors il décida d’entrer dans son jeu. -En quoi sommes-nous identiques ? demanda-t-il. -Nous n’appartenons pas à ce monde : les palais, les banquets, les domestiques, la richesse. Nous n’avons pas vu le jour dans cet univers. Je suis né dans la rue comme toi, mon ami. Mon père était un marchand ambulant qui voyageait et commerçait dans les Sept Déserts et ma mère est morte en me mettant au monde. Le prince marchand croisa les mains et baissa la tête comme si il tentait de se rappeler de son passé. -Tu étais un voleur, un malfrat et pourtant aujourd’hui, tu es marié à la Princesse d’Agrabah et tu seras Sultan, toi qui n’étais qu’un moins que rien. Aladdin appuya ses coudes sur la rambarde et se mt à contempler les falaises qui entouraient le Palais. -Nous nous ressemblons, en effet … souffla Aladdin qui reconnut l’honnêteté dans les paroles de Munir. -Ha ha. Je t’admire, tu sais. Tu es un héros reconnu et aimé dans tous les Sept Déserts. -Ce n’est pas grand-chose, Prince. Relativisa Aladdin. Vous avez mis fin à une guerre civile qui durait depuis une vingtaine d’années et qui ravageait votre pays. -Appelle-moi, Munir. Dit le Prince en riant. L’étiquette ne sert à rien entre nous. -Dans ce cas, comment es-tu devenu Prince Marchand de Nawal ? demanda Aladdin en cédant aux exigences de Munir. Le Prince Marchant eut un rictus satisfait car celui qu’il admirait avait décidé de se mettre à égalité avec lui. -J’ai repris l’affaire de mon père à sa mort et j’ai longuement travaillé et accumulé des richesses. Expliqua-t-il. Lorsque la guerre à Nawal fut à son paroxysme, j’ai décidé de mettre un terme à ces violences en créant une force populaire et en usant de mes richesses, j’ai pu engager des mercenaires pour former mon armée. Nous avons mis fin à la guerre civile et on m’a demandé de prendre le trône de Nawal que j’ai accepté. -Comment peux-tu m’admirer alors que tu as fait tant pour ton peuple et ton royaume ? Plaisanta Aladdin. Je n’ai pas accompli autant que toi. Munir passa sa main dans ses cheveux bouclés et garda le silence. Cela avait piqué la curiosité d’Aladdin. Munir et lui avaient connu un même destin mais pas le même parcours mais une question lui mordait les lèvres. -Puis-je te poser une question ? Questionna Aladdin. -Je t’écoute, dit immédiatement le Prince. L’ancien malfrat hésita quelques instants avant de poser : -Pourquoi as-tu pris la charge de Prince Marchand ? Tu aurais pu la confier à quelqu’un de plus compétent que toi. Munir fut étonné par la question du héros d’Agrabah, il se frotta sa fine barbiche et répondit : -On m’a poussé à accepter. Le peuple me soutenait et puis j’avais quelque chose que tous les autres monarques des Sept Déserts n’avaient pas. -Quelle est cette chose ? demanda Aladdin. Munir croisa le regard sombre du héros d’Agrabah. -Je viens du peuple, je connais la pauvreté, la faim et la misère. Et donc je suis plus proche du peuple qu’ils ne le seront jamais. J’ai pris le pouvoir à Nawal afin d’aider les pauvres gens car je sais plus que quiconque, quels sont les problèmes de la plèbe. C’était mon devoir d’accepter de régner pour ceux qui m’ont demandé de guider Nawal vers une nouvelle ère de prospérité. Aladdin buvait les paroles du Prince. La volonté et la détermination dans la voix de Munir vouait l’admiration. Il comprit pourquoi cet homme était parvenu à mettre fin à une guerre et à ramener la paix dans une nation en péril. -Toi aussi Aladdin, reprit Munir. Tu connais les faibles, les affamés, les miséreux. Tu es à un tournant de ton histoire. Dans un avenir proche, tu deviendras Sultan d’Agrabah et tu pourras faire changer les choses pour le peuple. Aladdin resta silencieux, embarrassé par le plaidoyer du Prince. Il n’avait jamais autant ressenti autant de poids et de responsabilité sur ses épaules. -J’ai encore du mal, commença Aladdin, à réaliser que je devrais bientôt remplacer le Sultan. Je suis toujours en pleine apprentissage et ces diners me terrifient. Munir s’approcha d’Aladdin et lui donna une tape amicale dans le dos. -Ça viendra ! J’ai dû apprendre moi aussi à régner. Tu as mon soutien dans ces épreuves ! Nous ferons de grandes choses ensemble ! Et puis, je dois t’avouer quelque chose, ces repas me terrifient. Les deux hommes éclatèrent de rire et Aladdin fut rassuré. Munir s’était ouvert à lui simplement afin de gagner son amitié. Ils se ressemblaient et se respectaient mutuellement. Dès cet instant, Aladdin l’apprécia comme un modèle à suivre, un ami. Munir jeta un coup d’œil dans la salle et vit l’Emir Fayiz, assis de toute sa masse sur un coussin, qui utilisait un narguilé rouge dont le tuyau montait à sa bouche dissimulée dans sa barbe, recrachant et aspirant une épaisse fumée grise. -A vrai dire, dit le Prince. N’importe qui serait angoissé d’être assis à côté de ce géant grincheux. -Il n’est pas très bavard en plus ! reprit Aladdin. Il grogne plutôt comme un cochon ou un vieux chameau malade. -Ha ha ! S’il nous entendait, il nous trancherait en deux. Le Roi Hassan et le Sultan étaient toujours attablés en bout de table, discutant de tout et de rien tandis que Jasmine suivait une conversation animée entre la vieille Warda et la Reine de Saba. Elle aperçut Aladdin et Munir au loin qui riaient aux larmes et décida d’aller à leur rencontrer. Elle traversa la salle du trône et passa entre les grandes colonnes blanches. -Qu’est ce qui a bien pu vous faire rire à ce point, demanda-t-elle les mains sur les hanche en souriant. Munir et Aladdin se stoppèrent dans leurs ricanements et le Prince Marchand se racla la gorge. -Nous faisions plus amplement connaissance, Princesse Jasmine. Dit-il en reprenant un ton soutenu. Jasmine dévisagea Munir et Aladdin en haussant les sourcils, peu convaincue par l’explication du prince. -Vraiment ? Aladdin s’approcha d’elle et prit les mains de son épouse. -Ne t’inquiètes pas, nous discutions simplement de tout et de rien. Nous passions juste le temps. -D’ailleurs, je vais retourner à table. Je crois qu’on ne va pas tarder à servir le dessert, supposa Munir en dépassant la Princesse pour retourner dans la salle du trône. Aladdin et Jasmine le regardèrent retourner à sa place puis s’immiscer dans la conversation du Sultan et du Roi d’Hyrouk comme si de rien n’était. -On dirait que vous vous entendez bien, souffla Jasmine à son mari. -Disons que nous sommes identiques sur de nombreux points. Dit-il. -Qu’est-ce que tu veux dire ? -Je t’expliquerais tout ça plus tard … Je crois qu’on devrait retourner à table. En effet, des domestiques arrivèrent dans la salle du trône portant les mets sucrées qu’ils allaient servir pour conclure ce fastueux repas. Il y avait des gâteaux aux mille saveurs et des fruits exotiques qui débordaient sur des plats d’argents tellement lourds qu’ils devaient être porté par deux serviteurs. Le vaurien et la princesse revinrent dans la salle du trône quand un puissant hennissement résonna dans la salle. Une forme blanche passa entre les colonnes et de grandes ailes blanches balayèrent l’air de la pièce. Tous les regards se portèrent vers le plafond bleu de la salle du trône. -Qu’est-ce que ceci !? s’écria l’Emir Fayiz en se relevant de table et dégainant son sabre. Les gardes aux portes sortirent leurs armes et se rapprochèrent de leur forme qui avait fait irruption dans le palais. C’était un cheval ailé blanc. Il se posa au sol au milieu des gardes et deux individus descendirent de la monture. -Du calme ! Braves gens de la haute !! S’écria la créature de petite taille qui en descendit. On veut pas troubler votre diner de nababs ! On veut simplement parler à votre héros local !! Tous les souverains des Sept Déserts s’étaient levés de table et observèrent la petite créature, le jeune homme qui l’accompagnait et leur coursier légendaire. -C’est un satyre ? S’interrogea à voix haute la Reine de Saba. -Un cheval ailé, c’est un prodige ! clama Hassan. Aux côtés de Phil, Hercule chercha du regard toutes les personnes dans la salle du trône espérant apercevoir celui qui ressortait du lot par sa carrure et son charisme. Comme tous les grands héros, il devait émaner de lui une aura étincelante et sans nom digne des plus grands dieux. -Que signifie cette intrusion ? ordonna le Sultan en se trémoussant. Ce fut Hercule qui répondit alors que les gardes les encerclaient peu à peu, cimeterres au poing. -Nous sommes simplement venus parler à Aladdin le héros d’Agrabah ! Tous se retournèrent vers l’interpellé qui venait de rentrer dans la salle en compagnie de Jasmine. Aladdin n’avait vu ces deux-là nulle part. -Je … je suis Aladdin. dit-il d’une voix forte. Philoctète écarquilla les yeux en apercevant celui qu’’ils désignaient comme leur héros puis son visage se tordit en un sourire malsain et vicieux. Il tira la cape de son poulain pour le mettre à son niveau et lui murmura à l’oreille : -Ce type est une mauviette. Un gringalet … Tu l’exploses à tous les coups … Hin hin. -On ne devrait pas se fier aux apparences, Phil … murmura Hercule alors que son entraineur ricanait sournoisement. Aladdin s’approcha du trio d’intrus et les gardes le laissèrent passer. -Vous désirez me parler mais qui-êtes-vous ? demanda-t-il. Hercule ne pouvait cacher une certaine déception. Il imaginait Aladdin comme les héros grecs : fort, grand, imposant par la taille, par la voix et la carrure mais il ressemblait plus à un type lambda qu’il aurait croisé dans la rue en venant au palais. -Je suis Philoctète ! L’entraineur des vrais héros et voici ma jeune recrue ! Hercule ! Fils de Zeus !! L’adolescent sentit les yeux de tous se poser sur lui. Il aurait préféré que ce soit lui qui commence à parler avec Aladdin mais Phil en avait décidé autrement. -Zeus !? S’exclama Munir. Alors vous êtes des Grecs ! -Oui mais ça n’a pas d’importance, commença Hercule. Nous … -Depuis quand les chèvres peuvent-elles former des héros ? Siffla l’Emir Fayiz qui n’avait toujours pas rengainé son cimeterre. Phil entendit cette provocation et son visage vira au rouge vif alors qu’il fulminait intérieurement. -Qui sait que tu traites de chèvre … ? Grogna-t-il entre ses dents. -Calmes-toi ! Phil ! Supplia Hercule alors qu’il retenait son entraineur. -Tu voulais me parler alors ? demanda Aladdin qui essayait de ramener le duo comique à ce pourquoi il était entré par effraction dans le Palais. Le satyre recentra son attention sur le Héros d’Agrabah et commença son interrogatoire. -Tu es un héros, n’est-ce pas ? J’aimerais bien savoir qui t’as entrainé ? -Je n’ai été entrainé … par personne, répondit Aladdin qui ne comprenait pas le but de la question. Philoctète examina le héros d’Agrabah de haut en bas tout en se grattant la barbiche. -Vraiment ? Aucun mentor ? Professeur ? -Aucun … Les autres invités observent la scène avec intérêt. C’était une des surprises inespérées de ce repas. Pour certain, c’était une attraction supplémentaire à ce banquet et pour d’autres un simple contretemps avant le dessert. Pégase n’aimait pas les visages sévères et agressifs des gardes qui considéraient toujours ces invités inattendus comme une menace. Le cheval ailé renifla intensément, prêt à riposter à la moindre attaque mais Hercule tenta de calmer l’ambiance. -Nous ne voulons faire de mal à personne ! s’écria Hercule. Nous venons simplement parler. - Gardes ! Baissez vos armes ! s’écria le Sultan. Ils s’exécutèrent et reculèrent de quelques pas tout en restant proches des monarques. Hercule souffla de soulagement alors qu’un plan machiavélique germait dans l’esprit du satyre. -Je suis un héros en pleine formation, expliqua librement Hercule à Aladdin. J’ai entendu de nombreuses choses sur toi et j’ai voulu te rencontrer au plus vite pour pouvoir … -Te défier en DUEL !! Phil avait terminé la phrase de sa recrue, abasourdie par la tournure que prenaient les évènements. -Ce gamin veut te défier et prouver sa force ! poursuivit Phil. Il a fait des centaines de kilomètres pour ça ! Tu ne vas pas lui refuser ça ! Et en plus, ces personnes de haute naissance seraient surement ravis de voir un duel entre le Héros d’Agrabah et le futur nouveau prodige de la Grèce Antique ! Balki, Hassan et Munir ne cachèrent pas leur amusement à cette idée titanesque d’un combat entre deux héros. Même le Sultan affichait un sourire d’enfant. -On dit que les héros grecs sont de redoutables adversaires, fit remarquer Warda, la doyenne de la Province d’Hircine, restée silencieuse depuis l’interruption du repas. -C’est aussi une bonne occasion de voir le héros d’Agrabah à l’action, dit l’Emir Fayiz avec sarcasme. Aladdin souffla d’agacement suite à la pique lancée par l’Emir et se passa la main dans ses cheveux en bataille. Depuis ces quelques mois, il aurait voulu quelque chose d’inattendu comme ceci, une aventure ou un évènement pour picoter sa vie devenue peu à peu monotone. Mais pourquoi devrait-il accepter ce duel contre un adversaire qu’il ne connaissait pas et envers lequel, il n’éprouvait aucun ressentiment. Mais une partie de lui voulait accepter le duel pour prouver à ceux qui doutaient de lui, qu’il était capable de bien d’être le héros dont il avait tant entendu parler. Son adversaire ne semblait pas si fort que ça. C’était un gamin en pleine puberté qui ne ferait pas de mal à une mouche, il pourrait le battre en impressionnant les invités du Sultan et faire enrager ce stupide gorille d’Emir qui ne cessait sans arrêt de le rabaisser plus bas que terre. -Qu’est-ce que tu fais, Phil ? Souffla Hercule à l’oreille de son entraineur. -Fais-moi confiance ! Gamin ! Je sais ce que je fais ! répliqua le satyre. Hercule dut se résoudre à suivre le plan de son entraineur car il désirait lui aussi voir ce héros d’Agrabah à l’œuvre et s’il devait apprendre quelque chose d’Aladdin, un duel contre lui serait le meilleur moyen pour le former. -Un duel entre deux héros serait un excellent spectacle pour finir ce festin, soupira la Reine de Saba. -Oui, oui ! Acquiesça le sultan. Ce serait une superbe distraction. Aladdin regarda par-dessus son épaule Jasmine qui avait rejoint les monarques des Sept Déserts. Elle n’était pas aussi enjouée que les autres. Ce duel ne lui inspirait rien de bon. Aladdin comprit cela au premier regard mais il ne pouvait s’empêcher d’entendre la petite voix dans sa tête qui ne cessait de répéter : «Accepte ! Accepte ! ». Hercule se racla la gorge et tendit la main en demandant d’une voix hésitante. -Alors ? Est-ce vous acceptez le duel ? Aladdin hésita un instant mais au final il se laissa submerger par l’excitation et saisit la main que lui tendait le fils de Zeus. -J’accepte.
______________________________________________ Allez ne soyez pas timides ! J'accepte tous les avis, qu'ils soient positifs ou négatifs ! =)
En tout cas, j’espère avoir plus de réactions qu'au premier chapitre. J'espère aussi que cela vous a plu ! A la prochaine !
Dernière édition par Lexias le Ven 31 Jan 2014 - 19:34, édité 2 fois |
| | | Percée
Âge : 26 Messages : 144 Localisation : Entre Le pays Imaginaire et le pays des Merveilles. Inscription : 16/05/2013
| Sujet: Re: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Dim 13 Oct 2013 - 21:27 | |
| Cette fan fic est vraiment géniale !! je n'ai pas eu le temps de tout lire mais ce que j'ai lu est super ! je ne comprend pas pourquoi personne ne met de commentaires =( je comprend que ce soit frustrant ! (après c'est peut être car tes chapitres sont trèèèèès long, ce qui est très très bien !, mais ça peut décourager des gens qui sont préssés). Je reviendrais plus tard pour poster un avis plus détaillé mais franchement j'adore, continue ! " /> |
| | | Lexias
Âge : 31 Messages : 11 Inscription : 27/08/2013
| Sujet: Re: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Lun 14 Oct 2013 - 21:20 | |
| Je te remercie grandement d'avoir pris un peu de ton temps pour poster un message ! =)
Je commençais à désespérer à voir une réaction sur cette histoire. Je ferais surement mes chapitres plus court alors pour la prochaine fois. =)
Merci encore pour ton message, j'attends ton avis avec impatience ! =D |
| | | Percée
Âge : 26 Messages : 144 Localisation : Entre Le pays Imaginaire et le pays des Merveilles. Inscription : 16/05/2013
| Sujet: Re: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Dim 27 Oct 2013 - 16:42 | |
| De rien =). Comme promis voila mon avis ^^ :
J'aime beaucoup ton style, le caractère des personnage est très bien respecté ! Il y a plein de détails, ça permet vraiment de visualiser l'histoire =). J'adore les changements d'atmosphère, et la rencontre entre nos personnages adorés ! Ce qui est bien aussi c'est que l'histoire se passe après la fin d'Aladdin, de la Petite Sirène et de La Belle et La Bête (et la fin de Mulan ?), mais au milieu de l'histoire de Hercule, ça fait un décalage très interessant. Je suis absolument préssée de connaitre la suite !! qu'est ce qui arrive à Belle ? ='(, où est Mulan ? comment va se terminer le duel ? c'est une histoire très entraînante ^^.
Après je ne dis pas que tu dois faire des chapitres plus courts ! c'est super bien d'arriver à faire des chapitres longs, d'ailleurs sur beaucoup de fanfictions que j'ai vu les gens reprochaient à l'auteur de faire des chapitres trop courts ! Seulement quand on arrive sur le topic on se retrouve devant un long texte, et il suffit qu'on ai très peu de temps pour que ça nous décourage et du coup on se dit "je reviendrais plus tard" mais au final on revient pas ^^'. Donc je pense que le mieux serait de mettre tes chapitres en balises "spoiler", comme ça le topic serait aéré, de plus ceux qui viennent aurait accès aux commentaires directement, sans avoir à descendre toute la page. Si les commentaires sont positifs (et il n'y a pas de raison qu'il ne le soient pas) les gens auront encore plus envie de lire les chapitres =).
Voila ! Vivement le chapitre 3 !!! " /> |
| | | Lexias
Âge : 31 Messages : 11 Inscription : 27/08/2013
| Sujet: Re: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Mar 29 Oct 2013 - 10:05 | |
| Merci !
J'essaye de conserver au maximum, l'ambiance et les caractères de chaque lieu ou personnage de Disney et ce ne 'est pas chose facile car c'est vraiment une mosaïque très diverse. Pour Hercule, je voulais commencer avec lui en tant que jeune apprenti héros car je trouvais que ça apportait une meilleure approche du personnage : c'est un gringalet maladroit, peu sûr de lui, mais fort, terriblement fort.
J'ai suivi ton conseil concernant les balises spoiler, c'est vrai que c'est bien mieux pour parcourir le topic. Je vais me tenir à cela ^^
J'ai commencé le chapitre 3, j'espère qu'il pourra arriver prochainement ! Merci encore ! =) |
| | | facilierdu54
Âge : 22 Messages : 371 Localisation : devant mon ordi Inscription : 30/10/2013
| Sujet: Re: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Jeu 31 Oct 2013 - 11:55 | |
| j'ai tout lu!!! super ! Et tu m'a inspiré . Moi le plus grand fan de méchant , je compte faire la même chose dans le sens inverse. J'espere que tu vas ne pas mal le prendre mais plutôt être honorée! Le one piece... EXISTE POUR DE VRAI !!! |
| | | facilierdu54
Âge : 22 Messages : 371 Localisation : devant mon ordi Inscription : 30/10/2013
| Sujet: Re: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Jeu 31 Oct 2013 - 12:24 | |
| Introduction:Le déshonneur total. Facilier :Où, où suis-je ? Gaston : Il fait chaud hein ?! T’inquiètes tu vas t’y faire. Facilier :Ca ne réponds pas à ma question . Hé ! J’te reconnais ! Comment ça ce fait ? Gaston : C’est génétique tous les méchants Disney se reconnaissent . Eh le nouveau ! Comment t’es mort ? Facilier : J’avais un objet . Un objet qui appartenait a mes ‘’amis de l’au delà’’ et cette maudite Tiana l’a cassé. Gaston : Et il te l’on fait payer c’es ça ? Bon moi je suis tombé du haut d’un château . Pour répondre à ta question on est en enfer . Tu vas passer devant l’ancienne . Si tu n’es pas assez méchant pour elle tu iras en enfer sinon elle te proposera une requête et te présentera au maître des lieux : Hadès. Facilier : Et tu accepté toi ? Gaston : Oui . Allez ! Et les 2 compères se dirigèrent vers l’ancienne . Evil Queen : Ah … un nouveau . Je t’explique : je suis la 1ère méchante Disney et ma requête est de nous venger ! Tous ! Mais les moires ont prédit que seulement 4 méchants viendront. Et c’est à moi de les choisir ! Question 1 : Quel est ton pouvoir ? Facilier : Le Vaudou Evil Queen : 2 : Comment décrirait tu celui ou celle qui t’a emmené ici ? Facilier : Je ne trouve pas de mots assez … Evil Queen : Il est pris ! Elle se leva de son trône et dit : Suivez moi ! Elle les emmena dans une salle sombre et brûlante. Hadès : Content de voir mes 3 acolytes enfin réunis . Gaston : Je n’imaginais pas le Maître comme ça .
Hadès : Nous allons nous venger de ce : DESHONNEUR TOTAL !!!!! Le one piece... EXISTE POUR DE VRAI !!! |
| | | Percée
Âge : 26 Messages : 144 Localisation : Entre Le pays Imaginaire et le pays des Merveilles. Inscription : 16/05/2013
| | | | Princess Meg Modérateur
Âge : 28 Messages : 12864 Localisation : Dans la citadelle de Vahla Ha'Nesh. Inscription : 07/06/2013
| Sujet: Re: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Jeu 31 Oct 2013 - 16:24 | |
| Lexias : Wouhaaaaa !!! *o* Ta fanfic m'a émerveillé d'un bout à l'autre !!! J'avais prévu de ne lire que la première partie du chapitre 1, mais je n'ai pas pu résister et j'ai tout lu ! Les personnages et lieux sont respectés à la lettre, c'est génial ! J'ai juste eu un peu de mal à imaginer Ariel avec un flingue, mais c'est un détail ! ^^ J'adore le fait qu'on découvre peu à peu les personnages sans savoir tout de suite qui c'est ! Et j'adore la façon dont les héros de différents univers se rencontrent ! Depuis longtemps j'ai envie de créer une fanfic de ce type, mais je ne savais pas comment m'y prendre... Et ton fanfic m'a vraiment inspire !!! Vivement la suite !!!! J'espère que tu mettras en scène encore d'autres univers Disney ! Et encore une fois, félicitations ! Tu devrais te convertir dans l'écriture, si ce n'est pas déjà ton métier ! ^^ Tu mériterais d'être publier tellement ce que tu écris est prenant, magnifique... Et en plus, pas une seule faute d'orthographe ! |
| | | Lexias
Âge : 31 Messages : 11 Inscription : 27/08/2013
| Sujet: Re: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Sam 2 Nov 2013 - 22:12 | |
| Merci pour vos avis !
Facilierdu54 > Je suis content que ça t'ait plu et inspiré ! Ca ne me gêne pas que tu reprennes le principe en sens inverse mais comme l'a dit Percée, il aurait fallu que tu fasses ton propre topic ^^ Sinon pour le premier chapitre que j'ai lui, c'est très rapide peut-être trop rapide et je n'aime vraiment pas le style théâtral en ce qui concerne les fan-fictions. =/
Princess Meg > Merci beaucoup ! Que de compliments, je vais attraper la grosse tête XD. Je compte bien intégrer d'autres univers Disney, je ne veux pas me limiter à cinq univers. =) Les introductions de certains univers ou personnages seront peut-être surprenantes mais j'espère que vous recevrez cela de façon positive.
Pour le coup d'Ariel avec un pistolet, c'était pour éviter qu'elle ne fasse trop demoiselle en détresse même si cela fait un peu décalé à la lecture.
Le chapitre 3 est toujours en cours d'écriture mais vos avis me motivent à poursuivre ardemment la rédaction de ce chapitre dont je peux seulement vous révéler le titre "Le maitre et l'apprenti"
Merci encore et à bientôt pour la suite !
|
| | | Princess Meg Modérateur
Âge : 28 Messages : 12864 Localisation : Dans la citadelle de Vahla Ha'Nesh. Inscription : 07/06/2013
| Sujet: Re: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Dim 3 Nov 2013 - 1:39 | |
| Mais de rien, tu le mérite ! En fait, pour Ariel, ce qui m'as surpris c'est qu'elle sache se servir d'un pistolet alors qu'elle ignore ce qu'est un poulet ! Sinon, je voulais te poser une question : Est-ce que tu as déjà une idée de la fin de ta fic, ou est-ce que tu écris au fur et à mesure sans savoir comment ça va se terminer ? Car moi je ne sais jamais comment procéder pour écrire une fic, la plupart du temps j'écris comme ça me vient, mais après je bloque car je n'arrive jamais à trouver une bonne fin... :/ (donc en gros ma question c'est est-ce que tu as déjà une idée globale de l'histoire du début à la fin, ou est-ce que tu inventes tout au fur et à mesure ?) En tous cas, bravo ! J'ai souvent vraiment hâte de lire la suite ! |
| | | Lexias
Âge : 31 Messages : 11 Inscription : 27/08/2013
| Sujet: Re: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Dim 10 Nov 2013 - 20:10 | |
| Je te mentirais en disant que j'ai planifié la fiction du début à la fin. J'ai déjà la première partie en tête, il manque surement des détails quelques mécanismes à l'intrigue mais j'ai une fin fixée pour cette partie.
Malheureusement, cela peut être long. J'ai les grandes lignes de l'histoire complète mais il faut les relier. Écrire au fur et à mesure, c'est pas vraiment ma méthode, mais disons que ça m'arrive d'avoir une idée en cours d'écriture et de l'inclure à ce que j'avais déjà prévu.
Après, lorsqu'on a prévu une longue fic, on attend plutôt de bien avancer dans l'intrigue plutôt que de trop penser à la fin. Et malheureusement, certaines fics restent inachevées. |
| | | Princess Meg Modérateur
Âge : 28 Messages : 12864 Localisation : Dans la citadelle de Vahla Ha'Nesh. Inscription : 07/06/2013
| Sujet: Re: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Dim 10 Nov 2013 - 20:43 | |
| Merci de ta réponse ! C'est un peu comme ça que je procède aussi, mais le truc c'est que j'ai du mal à raccorder toute l'intrigue, c'est assez dur à gérer... Mais toi tu t'en sort plutôt bien ! |
| | | Lexias
Âge : 31 Messages : 11 Inscription : 27/08/2013
| | | | Princess Meg Modérateur
Âge : 28 Messages : 12864 Localisation : Dans la citadelle de Vahla Ha'Nesh. Inscription : 07/06/2013
| | | | Lexias
Âge : 31 Messages : 11 Inscription : 27/08/2013
| Sujet: Re: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Jeu 30 Jan 2014 - 17:15 | |
| Après une longue absence, je vous offre la suite de "La Dernière Alliance". Merci pour tous vos avis encourageants. J'espère que ce chapitre trois va vous plaire ! N'hésitez pas à donner vos commentaires sur ce chapitre ! Ils seront les bienvenus ! Bonne lecture à tous ! Enjoy ! _____________________________________________________________________________________ Chapitre 3 – Le maitre et son apprenti- - Chapitre 3 -:
Les seigneurs des Sept Déserts étaient rassemblés sur une terrasse couverte qui donnait sur deux bassins peu profonds séparés par une longue bande de marbre. D’immenses piliers soutenaient le plafond au-dessus des bassins et la passerelle de marbre séparait deux colonnes comme le seuil d’une porte sur les somptueux jardins du palais. Le roi Hassan, le Sultan Tayeb d’Agrabah, la doyenne Warda, l’Emir Fayiz, le Prince Munir et la Reine Balki, tous, étaient installés sur des banquettes, allongés, dégustant les confiseries et les fruits qu’on leur avait servis sur de riches tables basses. Les dirigeants des Sept Déserts prenaient leur dessert alors qu’ils allaient assister au duel opposant Aladdin le Héros d’Agrabah à Hercule, fils de Zeus. L’ancien malfrat avait enlevé sa longue cape blanche de cérémonie et son turban. Il aurait bien voulu changer de tenue mais les invités du sultan furent tellement emballés par l’idée d’un duel entre les deux héros qu’il n’eut pas le temps d’aller s’habiller d’une tenue plus adéquate pour le combat. Les domestiques avaient installé les tables et les banquettes sur la terrasse en un rien de temps afin qu’ils puissent observer le combat en dégustant des mets sucrés et juteux. Les membres des délégations étrangères s’étaient regroupés autour des bassins pour ce qui semblait être l’attraction de la journée. Les concubines gloussaient avec leurs voix fluettes et les soldats grognaient et raillaient formant un brouhaha sans nom. Sur la passerelle de marbre, Aladdin sentit les regards de tous ces spectateurs. Une assistance imposante et embarrassante dont il se serait bien passé. En face de lui, Hercule semblait terriblement gêné par l’ampleur que prenait ce duel. Après tout, le jeune apprenti n’avait jamais voulu ça. Tout était de la faute de Phil. L’entraineur avait défié le Héros d’Agrabah au nom de son jeune poulain et celui-ci fut forcé de se plier à la décision Philoctète traversa la passerelle de marbre, passa devant Aladdin et alla jusqu’à son apprenti afin de le briefer sur son combat. -Viens là, petit ! dit-il à mi-voix en invitant Hercule à se mettre à sa hauteur. Tout d’abord, on ne sait rien de ton adversaire. Mais à première vue, il fait pas très mastoc. C’est peut-être là sa faiblesse mais reste concentré, ta maladresse est ton plus grand défaut ! -Bien, souffla Hercule. Je ferais attention, je ne te décevrais pas … -Je te fais confiance, gamin … Aladdin donna son turban et sa cape à un garde à côté de lui tandis que Jasmine descendit les marches de la terrasse pour rejoindre son époux. Le jeune homme n’avait aucun mal à discerner la désapprobation dans les yeux de la princesse. Il ne put se retenir de sourire devant l’air inquiet de la princesse. -Je suis désolé, dit-il en riant. Je n’ai pas pu m’en empêcher. -Les repas aristocratiques, ce n’est pas ton truc. Répondit-elle en rendant son sourire. Aladdin observa son adversaire. L’apprenti héros n’avait rien de menaçant. Il était figé, inconfortable sous les yeux de l’assemblée grouillante venue assister à la confrontation des deux héros. Les Seigneurs des Sept Déserts s’étaient également installés sur la terrasse donnant sur la passerelle de marbre où le duel se déroulerait. -Ils sont venus voir du spectacle, déclara Aladdin. Il s’agit de ne pas les décevoir. -Ce sommet diplomatique prend des tournures surprenantes. Reprit la princesse. -La diplomatie, ce n’est pas mon domaine. Mais concernant l’action, je me débrouille assez bien. Et puis cet Hercule n’a pas l’air terrible. Ce combat ne sera pas sérieux, simplement du divertissement pour les grands seigneurs et leurs suites. -Ne fais pas de folie, on ne sait rien sur ton adversaire. Conseilla Jasmine. Le satyre qui l’accompagne semble très confiant. -Tout ira bien, rassura l’ancien malfrat en s’approchant d’elle. Cela fait peut-être longtemps que je ne me suis pas combattu mais je ne suis pas rouillé pour autant. -Reste prudent, termina la princesse en observant le héros grec par-dessus l’épaule d’Aladdin. Elle fila rejoindre les invités suivi par le satyre-entraineur qui trépignait d’impatience dans l’attente du combat. Jasmine s’installa sur une banquette proche de la belle Balki et de la vieille Warda. Derrière elles, discutaient l’émir Fayiz, le Sultan Tayeb et le Prince Munir et les trois souverains semblaient dans un débat houleux. -Alors vous ne pariez pas ? demanda Munir insistant. -Je ne me plierai pas à cette bassesse, cracha Fayiz. -Voyons, Emir Fayiz, supplia le Sultan d’Agrabah, une simple pièce d’or. Voyez ça comme un jeu. -Je ne miserai aucune pièce, qu’elle soit d’or, d’argent ou de bronze, sur ces gringalets. Les sourcils sévères de l’émir semblaient se durcir alors qu’il fusillait du regard Tayeb qui baissait les yeux comme un enfant ayant commis une bêtise. Munir s’empressa de venir à la rescousse du sultan en l’éloignant de cette montagne de chair rude et grondante. -Tant pis, nous jouerons sans lui. Concéda le Prince. Sur quel héros allez-vous misez, Sultan ? -Mais voyons quelle question !? S’esclaffa-t-il. Aladdin évidemment, il est mon gendre, le futur sultan. Le vieux seigneur sortit de son manteau de cérémonie une pièce d’or qu’il confia au Prince Munir. Balki observa la petite rondelle de métal passer entre les mains du Prince de Nawal. Elle soupira avec dédain : -Je me souviens d’un temps où les dirigeants des Sept Déserts pariaient des fortunes sur leurs champions. Nous sommes tombés bien bas à parier comme dans un sordide tripot avec de piètres piécettes. -N’oubliez pas pourquoi nous sommes ici, déclara le Roi Hassan sur le ton de la réprimande. Jasmine vit Balki grincer des dents. Elle venait de se faire rembarrer comme une adolescente insolente. La Princesse d’Agrabah connaissait les raisons du sommet entre les dirigeants des Sept Déserts. Cela faisait plus d’un an que des caravanes de marchands disparaissaient mystérieusement dans le désert. Ces disparitions avaient lieu en différents endroits d’Arabie et à chaque fois les convois s’évanouissaient dans la nature. On ne retrouvait aucune bête, aucune denrée, aucun marchandise, aucun être vivant. Cela avait grandement affaibli l’économie des Sept Déserts, les échanges s’étaient faits plus rares et les commerçants étrangers se refusaient de s’aventurer dans les étendues désertes et ensablées d’Arabie préférant faire le tour de la contrée par la mer. Ces évènements avaient poussé les Sept seigneurs du Déserts à se réunir en urgence pour trouver une solution à ces disparitions. En apparence, cette réunion avait débuté de façon grandiose et festive mais tout ceci était un voile aux yeux des petites gens afin de leur dissimuler la gravité de la situation. Ces disparitions de marchandise avaient entrainé une perte importante d’argent pour les cités du désert et donc pour leurs leaders. On avait soupçonné des voleurs ou des brigands comme responsables de ces vols. Certaines rumeurs disaient qu’un démon du désert s’était réveillé de son sommeil millénaire et s’affairait à piéger les gens qui s’égaraient dans le désert pour les plonger sous la mer de sable où plus personnes n’entendraient plus jamais parler d’eux. -Nous aurons le temps de parler de ces préoccupations plus tard, déclara Jasmine voulant calmer la tension. -La femme de votre pseudo-héros a raison ! s’écria Phil en sautant sur le siège vide installé à côté de la Princesse. Voir un des poulains de Philoctète en action, c’est une chose rare, mes bons amis de la haute ! Jasmine regarda avec suspicion le satyre qui semblait lui lancer un regard de défi. -Qu’as-t-il de si spécial pour que tu sois si confiant ? demanda-t-elle afin d’obtenir d’éventuels renseignements sur l’adversaire de son époux. -Je suis un entraineur de héros, j’ai formé les plus grands ! Persée ! Thésée ! Achille ! Se vanta Philoctète en se frottant sa barbiche rousse. Et ce petit gars, ce sera le meilleur de tous ! Le plus grand de tous les héros ! Hercule, fils de Zeus !! Cela ne répondait en rien à la question de Jasmine, toujours intriguée par ce gamin qui s’était présenté comme un apprenti héros. La doyenne Warda se pencha légèrement en avant pour mieux apercevoir le satyre gesticuler sur la banquette prônant la grandeur et la bravoure des héros Grecs. -Alors, vous désirez parier sur votre élève ? demanda Munir au satyre. -Tu l’as dit bouffi ! s’écria Phil en lançant une bourse rempli de pièces au Prince de Nawal. C’est impossible qu’il perde face à cet Aladdin. La vieille Warda sortit alors d’un pan de son manteau, deux pièces d’or qu’elle tendit vers le ciel pour attirer l’attention de Munir. -Vous prenez toujours les paris, prince ? dit-elle d’une voix douce. Munir et les autres souverains furent surpris par l’intervention de la dirigeante d’Hircine, d’habitude si discrète et distante. -Ou … Oui, bien sûr. Répondit Munir en souriant. Sur quel champion voulez-vous parier ? -Je vais parier sur le jeune Grec. Dit-elle sans tarder. L’étonnement fut total alors que la vieille femme laissait ses deux pièces d’or entre les mains du Prince Munir. Balki regarda Warda avec méfiance. Derrière son air candide, la vieille femme semblait en savoir plus que les autres sur ce jeune héros. Philoctète jubila lorsque la doyenne prit parti pour Hercule. Le mauvais pressentiment qu’avait Jasmine semblait s’intensifier alors que le duel était imminent. Les monarques s’étaient mis à leurs places pour le combat, il ne manquait plus qu’à instaurer le silence parmi les spectateurs. Le Roi Hassan se leva de sa banquette et avec prestance il éleva ses mains pour faire taire l’assemblée et attirer l’attention de tous. Le brouhaha s’éteignit peu à peu et les yeux se tournèrent vers le souverain dont la voix résonna contre les murs du palais. -Voilà de nombreuses années que les dirigeants des Sept Déserts ne s’étaient pas rassemblés ! La foule exulta et chacun hurla le nom de sa contrée respective ainsi que les noms des souverains. Hassan attendit que les cris d’éteignent pour poursuivre : -Pour célébrer cet évènement, nous vous offrons un spectacle à la mesure de vos espérances. Un duel opposant deux héros ! Alors que les acclamations et les applaudissements grondaient dans les jardins, il porta ses mains vers les deux champions. -Le premier d’entre eux nous vient de la Grèce, au-delà de la mer. Il se nomme Hercule !! Les applaudissements avaient diminué et étaient presque devenus inaudibles alors qu’Hercule salua timidement ceux qui avaient la décence de l’acclamer. Hassan ne tarda pas à présenter le second champion. -Face à lui, se trouve le héros d’Agrabah, connu à travers les Sept Déserts : Aladdin !! Un tonnerre d’acclamations et de cris éclata dans les jardins pour célébrer le champion d’Arabie qui resta de marbre face aux émules de la foule. Au fil de ses aventures, il avait appris à ne sous-estimer aucun de ces adversaires. -Les règles de ce duel sont très simples, expliqua le Roi Hassan. L’aire de combat est délimitée par la bande de marbre séparant ce bassin d’eau en deux. L’eau dans les bassins était calme et quelques fleurs d’eau émergeaient à plusieurs endroits. D’habitude, des flamants roses aimaient se désaltérer et tremper dans cette eau. Mais les oiseaux s’étaient envolés lorsque les délégations étrangères s’étaient installées dans les jardins troublant la quiétude du lieu. -Celui-ci qui fait chuter son ennemi dans le bassin remporte le duel. Les armes ne sont pas autorisées. Nous ne désirons pas que ce combat se termine en un bain de sang. Cependant, il peut se poursuivre jusqu’à ce qu’un des deux champions déclare forfait, ou décède. Après tout, les accidents sont vite arrivés … Hercule ravala sa salive à l’entente des consignes. Le héros d’Agrabah n’avait rien de sanguinaire à ces yeux. Il ne semblait pas être un guerrier assoiffé de sang qui massacrait ses ennemis au fil de son épée. Il était loin des figures d’Ajax, de Jason et de Bellérophon. A vrai dire, ils se ressemblaient. -Il est temps maintenant de passer au duel ! Annonça Hassan. Philoctète trépignait d’excitation et d’angoisse sur sa chaise tandis que Jasmine sentit son cœur se serrer dans sa poitrine. Le Sultan et les autres souverains s’étaient mis à l’aise sur leurs banquettes et regardaient cela avec amusement et mais aussi avec une certaine indifférence buvant du vin et dégustant des fruits frais dans des coupes d’argent. Sur l’étroite bande de marbre, Aladdin et Hercule étaient seuls en face à face, se jaugeant du regard. La tension était palpable et le public autour du bassin s’était tut. Les deux héros retenaient leurs souffles. Qui serait le premier à engager le combat ? -Champions ! Commencez ! s’écria Hassan. Hercule fut le premier à charger son opposant. Aladdin l’imita en s’élançant vers le jeune Grec. Ils se rapprochèrent rapidement alors qu’Hercule arma son poing prêt à frapper de plein fouet son adversaire. Aladdin anticipa son mouvement et prit appui sur ses deux jambes avant d’entrer en contact avec l’apprenti héros. Ce dernier mit toute sa force dans ce poing mais Aladdin esquiva le coup en sautant par-dessus lui. Hercule faillit trébucher lorsque son attaque frappa dans le vide. Aladdin passa au-dessus de sa tête et d’un puissant coup de pied, il le frappa dans le dos provoquant la chute du jeune héros. Il s’étala au sol alors qu’Aladdin atterrissait sur ses pieds dans le dos d’Hercule. Philoctète ne tarda pas à encourager son poulain à terre : -Relève-toi, petit ! Hercule s’empressa de se remettre debout, face à son ennemi. Aladdin resta prudent et garda ses distances tandis que le Grec se rapprochait lentement de lui en position de défense. Hercule balança une droite, facilement évitée par son adversaire. Il exécuta quelques coup de poings dans sa direction mais Aladdin les esquiva tous sans exception, sous les cris d’exaltation de la foule. Aladdin était agile, Hercule l’avait compris dès le début du combat. Essayait-il de profiter de son habilité et de sa vitesse pour le fatiguer ? L’entrainement de Phil sur l’endurance allait peut-être montrer ses fruits. Mais il n’avait rien mangé depuis longtemps, il n’était pas au meilleur de sa forme et Phil n’avait pas pris ce facteur en compte lorsqu’il provoqua ce duel fatidique. -Frappe ! Hurla le satyre. A gauche ! Frappe à gauche !! Son apprenti s’exécuta mais l’ancien voleur d’Agrabah esquiva chaque tentative d’Hercule pour l’atteindre. Aladdin appréhendait tous les attaques du Grec. Il était vif comme un serpent. Ses yeux ne quittaient pas son adversaire, anticipant tous ses mouvements et jaugeant le moment propice pour riposter. Il se baissa à temps pour s’écarter de la trajectoire du poing de son opposant. D’un rapide coup de pied, Aladdin faucha les frêles jambes de l’apprenti héros. Hercule tomba à la renverse et évita de peu de tomber dans un bassin. Les spectateurs hurlaient et acclamaient le champion du désert. Malgré l’acharnement du Grec, Aladdin le dominait tant au niveau de la vitesse que de l’agilité. Phil s’égosillait sur son poulain, crachant des ordres incompréhensibles et des râles de fureur. L’inquiétude de Jasmine semblait s’apaiser. Son époux n’avait aucune difficulté à malmener son adversaire. Le duel serait court et il était évident qu’Aladdin allait le remporter. Cependant le prévisible résultat du combat ne plaisait pas à tout le monde. -Ce duel est un piètre spectacle. Dit froidement l’Emir Fayiz. -Le grec n’arrive même pas à la cheville de son adversaire. Ajouta Balki. -Votre élève n’est pas des plus impressionnants. Dit Munir à l’attention du satyre. Phil se retint tant bien que mal de ne pas exploser de rage. Son visage vira au rouge et il hurla à l’attention d’Hercule : -Allez ! Explose-le !! Hercule entendit les paroles de son instructeur mais il restait concentré sur Aladdin. L’espace entre eux était grand. Il ne pouvait pas rivaliser avec lui. Depuis le début du duel, il n’avait même pas réussi à le toucher alors que son adversaire pouvait le faire chanceler en un instant. Aladdin ne voulut pas aller plus loin dans le duel. Il ne pourrait pas esquiver continuellement les attaques du grec. Il avait remarqué que les mouvements d’Hercule étaient maladroits et qu’il manquait d’assurance dans ses actions. Il allait profiter de tout cela à son avantage pour mettre fin à ce combat. -C’est tout ce que tu sais faire ? Provoqua le héros du désert. Ce duel est bien décevant. Moi qui m’attendais à plus de challenge de ta part. Hercule, son orgueil touché en plein cœur, décida de poursuivre le duel avec plus de hargne. Il se releva et chargea son adversaire. Aladdin recula de quelques pas pour se rapprocher des gigantesques piliers de marbre blanc qui encadraient la fine passerelle qui scindait les bassins. Hercule chargea tel un auroch sur Aladdin. Ce dernier se colla à un des piliers juste avant que le grec ne le percute. Hercule changea sa course de direction et revint sur Aladdin avec son poing fermé prêt à lui asséner un coup. Aladdin put appréhender l’attaque d’Hercule, violente et forte, mais pas inévitable. Le poing d’Hercule se rapprochait et d’un simple pas sur le côté, Aladdin esquiva une nouvelle fois l’attaque du grec qui frappa le pilier. A cet instant, le piler éclata de toute part dans un fracas assourdissant. Le marbre de la colonne s’était fissuré de toute part avant d’exploser en plusieurs blocs qui tombèrent dans le bassin sous les yeux médusés de l’assistance. Les acclamations s’étaient tus soudainement. Il régnait un silence de mort dans l’assistance. La démonstration de force du demi-dieu grec avait stupéfié le public. Même les grands seigneurs des Sept Déserts étaient grandement étonnés de la force surhumaine de ce jeune gringalet qui venait de détruire un pilier de marbre de plusieurs tonnes avec un simple coup de poing. Tout le monde s’était tut et le silence se poursuivit quelques instants dans les jardins du palais. Aladdin avait les yeux écarquillés, lorgnant sur le poing de son adversaire à quelques centimètres de son visage, enfoncée dans le marbre craquelé de la colonne. S’il n’avait pas été aussi rapide, ça aurait été sa tête qui aurait été encastrée dans la colonne. Il resta pétrifié sous le coup de la stupeur alors qu’Hercule essayait de retirer son bras de ce qu’il restait du pilier. Les seigneurs des Sept Déserts n’en croyaient pas leurs yeux. -C’est … stupéfiant … murmura le Sultan. -C’est … fou ! Lâcha Hassan. Seul la vieille Warda affichait une mine satisfaite et semblait se réjouir de la situation. -Qu’est-ce qui vous fait sourire ? demanda la Reine Balki agacée par le visage enjoué et ridé de la vieille souveraine. -Avez-vous écouté lorsque ce jeune Grec s’est présenté ? dit Warda en se tournant vers les autres dirigeants. Il s’est présenté en tant que « fils de Zeus », c’est-à-dire le dieu suprême du panthéon grec. Il n’est pas rare de croiser des surhommes comme lui dans sa contrée. Mais il semblerait que vous l’ignoriez. Philoctète jubilait et montrait un sourire narquois à tous ceux qui avaient osé remettre en doute les capacités de son jeune poulain. Warda osa l’interpeller alors qu’il savourait son instant de pure revanche : -Concernant votre jeune apprenti, me serais-je trompé ? -Nope, Madame ! Vous avez mis dans le mille ! Un vrai demi-dieu ! répondit Phil. Quand à Jasmine, l’horrible pressentiment qui l’avait quitté plus tôt, s’était soudainement réveillé pour l’envahir totalement. Le danger qu’affrontait Aladdin était devenu bien réel. Evidemment, il avait affronté de nombreux périples et adversaires par le passé, mais il avait toujours pu compter sur l’aide du Génie et du Tapis. Cependant le Tapis et le Génie étaient partis et Aladdin ne s’était pas battu depuis bien longtemps. Jasmine craignit le pire pour son époux. Aladdin reprit ses esprits et s’éloigna d’Hercule qui enleva finalement sa main des débris de la colonne. L’apprenti de Phil regarda, désolé, les dégâts de son attaque en grimaçant. -Pardon … Je … je ne voulais pas …, s’adressa Hercule au Sultan. Je n’ai pas pu contrôler ma force. Le père de Jasmine mit quelques instants pour sortir de sa torpeur et répondit hébété : -Non … non … Ce n’est rien … Pas grand-chose… -On s’en moque, gamin ! hurla Phil. Le combat ! Pense au combat ! Hercule reporta son attention sur Aladdin, honteux d’avoir tourné le dos à son adversaire. Celui-ci comprit enfin pourquoi son adversaire était aussi spécial. Depuis le début du combat, Hercule utilisait cette force extraordinaire et l’ancien voleur l’avait grandement sous-estimé. A chaque fois qu’il avait évité les assauts du Grec, il s’était exposé à d’énormes risques. Le pilier avait éclaté sous la puissance d’Hercule et Aladdin frémit en imaginant qu’un coup d’une telle force l’atteigne de plein fouet. Il devait à tout prix éviter les coups d’Hercule et conclure ce combat très rapidement. Il fallait le faire tomber de la passerelle de marbre. Hercule se remit en place pour poursuivre le combat et fonça à nouveau sur Aladdin. Il enchaina les coups sous les cris de la foule qui soutenaient maintenant le jeune Grec. Aladdin reculait à chaque assaut, mettant le plus de distance entre lui et son adversaire. Il ne voulait pas risquer de prendre un coup qui lui briserait le thorax. Cependant à force de reculer, Aladdin allait atteindre la fin de la passerelle, la limite de l’aire de combat. Il pourrait tout aussi bien se coucher et éviter d’innombrables blessures ou une mort probable. Mais à cette pensée, son orgueil s’embrassa dans sa poitrine telle de braises rallumées par une bourrasque de vent. Il n’oserait affronter les huées des spectateurs et les airs moqueurs et suffisants des seigneurs des Sept Déserts. Profitant d’un instant de répit, Aladdin s’élança vers Hercule. Celui-ci s’immobilisa prêt à riposter mais Aladdin sauta au-dessus de son adversaire et retomba dans son dos avant de s’éloigner de nouveau du Grec. Hercule se replaça sans perdre un instant. Il avait remarqué un changement dans l’attitude du héros d’Agrabah. Il avait pris conscience de sa force et craignait qu’une de ses frappes ne l’atteigne. Hercule sourit à la pensée qu’Aladdin puisse le considérer comme un adversaire de valeur. Cela le poussa à aller jusqu’au bout du combat et à ne rien lâcher. Face à lui, les yeux d’Aladdin ne pouvaient être plus clairs. Hercule était fort. Plus fort qu’il ne l’avait cru. Sa force était monstrueuse, surhumaine. Quelque chose se réveilla en Aladdin. Cela faisait bien longtemps qu’il n’avait pas mené un combat d’une telle intensité. Ces derniers mois, il avait dû subir toutes les leçons et apprentissages pour devenir Sultan. Aucune aventure ou périple ne s’était présenté à lui. Ce fut à ce moment précis qu’Aladdin vit à quel point cela l’avait manqué de ressentir une telle montée d’adrénaline dans son organisme. -Ce combat n’a que trop duré, Hercule ! Interpella Aladdin. Il est temps d’en finir ! Le Grec serra les dents et les poings et prit son élan. Les spectateurs s’exaltèrent lorsque les deux héros s’élancèrent l’un vers l’autre pour conclure ce duel. Leur course était rapide et le choc était inévitable. Tout le monde retint son souffle lorsqu’ils se rencontrèrent. Hercule agit le premier avec un coup direct de son poing droit. Mais d’un simple jeu de jambes, Aladdin pivota sur lui-même pour esquiver l’attaque du grec et arriver dans le dos de son adversaire. En un éclair, il joignit ses mains et frappa Hercule à la tête de toutes ses forces. Le Grec reçu la frappe d’Aladdin de plein fouet et chuta dans un bassin sous les cris de joie et de déception de la foule. Le combat était terminé. Aladdin souffla de soulagement tandis que les délégations étrangères assemblées autour des bassins l’acclamaient. Les dirigeants des Sept Déserts, pour la plupart, s’étaient levés pour l’applaudir. Son beau-père et Hassan semblaient ravis de sa victoire et affichaient un large sourire. Balki et Nawal semblaient heureux également de l’issue du combat ce qui n’était pas forcément le cas pour l’émir Fayiz qui applaudissait lentement avec ses grosses mains en conservant un visage renfrogné. La vieille Warda, bien qu’elle ait parié sur Hercule, ne boudait pas la défaite du grec. Elle applaudissait lentement, toujours assise, avec un fin rictus sur ses lèvres. Mais le seul visage qui retint l’attention d’Aladdin était celui de son épouse. Jasmine semblait tout aussi soulagée que lui. Les yeux de la princesse semblaient dire : « Tu l’as échappé belle ». Aladdin ne put s’empêcher de laisser échapper un petit rire nerveux. C’était la seconde fois qu’Hercule se retrouva trempé dans la même journée. Le coup d’Aladdin ne l’avait pas sonné mais il avait été suffisamment fort pour le faire tomber hors de l’aire de combat. Il avait perdu. Jusqu’à la fin, Aladdin avait mené le duel. Hercule se releva tout en évitant de croiser le regard de Phil du côté de la terrasse. Le satyre affichait une mine déçue et désespérée. Sur le toit de la terrasse, même Pégase avait observé le combat et la monture ailée soupira suite à la défaite de leur champion. Hercule rejoignit Aladdin sur la passerelle de marbre sous les cris de la foule de spectateurs. A la vitesse de l’éclair, Hassan descendit les escaliers qui menaient à la passerelle de marbre et rejoignit les deux héros. -Notre vainqueur ! s’écria-t-il en levant la main d’Aladdin au ciel. Les cris de la foule explosèrent en une gigantesque clameur. Aladdin esquissa un sourire, gonflé par les acclamations des spectateurs. A côté d’eux, Hercule était totalement ignoré. Il faisait simplement tapisserie. Il essaya de s’éclipser en direction de la terrasse lorsqu’il aperçut une vieille dame descendre les escaliers. C’était la vieille Warda. Elle avançait lentement soutenue par sa canne. Et au fur et à mesure qu’elle marchait sur la passerelle, la foule devenait de plus en plus silencieuse. Elle fit un signe à Hercule et alla à sa rencontre. Elle prit le jeune apprenti héros par le bras pour qu’il l’aide à marcher et elle se dirigea vers Hassan et Aladdin. D’une voix claire et sonore, elle s’adressa à l’assemblée : -Il existe une lointaine tradition qui provient de Grèce. Lorsque deux héros se confrontent dans un duel, si le gagnant épargne le perdant, il doit alors le prendre en tant qu’apprenti. L’intervention soudaine de la souveraine de Cirine avait surpris tout le monde. Les murmures fusèrent parmi les délégations étrangères ainsi que du côté de la terrasse. Warda continua d’avancer au bras d’Hercule vers Aladdin et le Roi Hassan. Hercule se laissa trainer par la vieille dame alors qu’il désirait seulement un moyen de s’évaporer et de disparaitre de la vue de tous. -Dis-moi, héros d’Agrabah ? Demanda Warda à haute voix. Respecteras-tu cette tradition en prenant Hercule en tant qu’apprenti ? La foule s’était à nouveau animé et soutenait la proposition de Warda par des applaudissements et des acclamations. Warda parcourut la foule avec un sourire et se tourna vers Aladdin, totalement décontenancé. Il était piégé. Quelle serait la réaction de la foule s’il refusait ? Même Hercule semblait mal à l’aise et essayait de se faire le plus transparent possible. Au loin, on pouvait entendre les cris de protestation de Philoctète : -Non ! Non ! Non ! Non ! Nooonnnn !! Noooooooonnnn !! La clameur de la foule gagnait en ampleur. -Alors, héros ? Quelle est ta réponse ? Questionna Warda. Les spectateurs hurlaient le nom du héros d’Agrabah. Ils le portaient aux nues. Hassan voyait bien qu’il était dans une impasse. Aladdin ne sut pourquoi Warda le dévisageait en souriant. Est-ce que cela faisait partie d’un jeu de manipulation ? Ou bien était-ce simplement pour permettre à Hercule d’obtenir un nouvel entraineur ? Dans tous les cas, il ne pouvait refuser et pourtant il entendait la petite voix dans sa tête qui le martelait : «Accepte, accepte». -J’accepte. Dit-il à mi-voix. Philoctète descendait quatre à quatre les escaliers pour rejoindre son poulain et mettre fin à ce massacre. -Non ! Non ! Non !! Noooonn !! Noooooooonnnnn !! Warda leva les bras des deux héros en signe de victoire et hurla suffisamment fort pour qu’elle soit entendue par tous : -IL ACCEPTE ! Les cris et les hurlements de la foule explosèrent en une gigantesque apothéose. Les noms d’Hercule et d’Aladdin étaient acclamés. Phil s’était stoppé dans son élan, à genoux, dépité, répétant à mi-voix : « Non, non, non ». Tayeb, Balki et Munir approuvaient cette décision et applaudissaient les héros tandis que Jasmine tapa lentement dans ces paumes, certaine que cet engagement n’allait mener nulle part. Aladdin croisa le regard d’Hercule. A cet instant, le maitre et son apprenti auraient tout fait pour ne pas être là. Ils échangèrent un sourire nerveux. Ils étaient tous deux dans la même galère. *** Quelques minutes plus tard, Hercule et Phil avaient été guidés par la princesse d’Agrabah dans une des chambres du palais. Jasmine les installa pour les faire patienter car les dirigeants des Sept Déserts devaient poursuivre leur réunion. Elle les invita à se servir dans la coupe de fruits sur la table au milieu de la pièce et les laissa pour rejoindre la réunion en leur promettant que quelqu’un viendrait les voir sous peu. Hercule se posa sur la banquette en silence et Phil fit de même avec son air renfrogné et boudeur. Il faisait la tête depuis la fin du duel et restait muré dans son silence même si Hercule l’avait entendu grommeler dans sa barbe : « Il va m’entendre, il va voir … ». Hercule préféra rester silencieux et attendit comme on lui avait demandé. Il lorgna sur la coupe de fruits installé face à lui et prit une grappe de raisins. Cela ne le rassasia pas mais après ses jours d’errance dans le désert où ils devaient rationner ses maigres portions de nourriture, ces quelques grains de raisins étaient un véritable festin. Il saisit une pomme dans la coupe et la tendit au satyre. Philoctète prit le fruit rouge violemment et le croqua à pleine dents en gardant le visage fermé. Hercule ne voulait pas que le malaise entre eux se prolonge. -Phil, écoute … -Laisse, gamin…. Je ne vais pas me laisser faire … Le ton de Phil était sérieux mais pas agressif. Cela rassura en partie Hercule dont l’attention se porta sur la fenêtre de la chambre d’où provenait de petits coups secs. Il l’ouvrit pour voir Pégase hennissant et frappant l’air avec ses ailes. Hercule le fit renter dans la chambre tout en faisant bien attention à ce que sa monture n’abime aucun élément du mobilier. Pégase posa sa tête sur l’épaule d’Hercule et le grec répondit en caressant la crinière de son compagnon ailé. Il laissa Pégase proche de la fenêtre et revint auprès de Phil sur la banquette. Ils mangèrent à leur faim jusqu’à ce qu’il ne reste qu’une orange et une pomme dans la coupe de fruits. Puis la porte de la chambre s’ouvrit sur Aladdin. Sur son épaule, un petit singe habillé d’un gilet mauve et d’un fez regardait Hercule, Phil et Pégase avec suspicion. A l’entrée du héros d’Agrabah, Phil se leva de la banquette et fonça sur lui laissant sortir toute la rage qu’il avait emmagasiné jusqu’à maintenant. -Espèce de petite raclure ! Tu crois que je vais me laisser faire !! Abu sauta de l’épaule d’Aladdin qui recula de peur. Phil allait en venir aux mains. Hercule s’empressa de l’arrêter en le saisissant par la taille comme un enfant. Le satyre se débattait en grognant prêt à en découdre. -Tu crois que tu peux me faire ça !? -Calme-toi ! Phil ! Le satyre bêla comme une chèvre et son visage vira au rouge. Aladdin essaya de calmer le jeu. -On va tenter de discuter calmement. -Tu veux que je sois calme !? C’est ça !? Quelques instants plus tard, Phil était de nouveau assis sur la banquette, les bras croisés avec sa rage qui se lisait sur son visage. En face de lui, Aladdin s’était installé sur une chaise et gardait Phil dans son champ de vision. Les yeux d’Hercule passaient de Phil à Aladdin en un instant, il connaissait son maitre et craignait qu’il laisse à nouveau sa colère le dominer. Abu s’était faufilé derrière la banquette pour atteindre la table sur laquelle était posée la coupe de fruits. Il avait aperçu la pomme restante en entrant dans la salle et comptait en faire son repas. Mais lorsqu’il bondit sur la table, il ne vit que l’orange dans la coupe. Il entendit un mâchonnement répété derrière lui et vit un gigantesque cheval ailé qui croquait à pleine dents la pomme rouge. Abu grimaça et émit plusieurs cris aigus mécontents auxquels Pégase répondit par la plus grande indifférence. Aladdin observa son ami simien s’assoir en tailleur sur la table, vexé, puis reporta son attention sur Hercule et son satyre enragé. -Navré pour toute à l’heure, dit-il détendu. Disons que les choses se sont un peu enchainées. -C’est ça, prends moi pour une chèvre, grommela Phil. -Ce n’est rien, balbutia Hercule. Faisons comme si rien ne s’était passé. J’ai déjà un entraineur et je ne compte pas l’abandonner. Alors qu’il espérait rassurer son maitre, Hercule fut largement déçu lorsque Phil reprit : -Je vais pas te laisser me prendre mon élève, espèce d’acrobate du désert ! Aladdin ne répondit pas à la provocation du satyre et resta un instant plongé dans ses pensées. -A vrai dire, dit-il. J’ai bien apprécié notre combat. Cela fait bien longtemps que je n’avais pas été poussé dans mes retranchements. -Pourtant, je n’arrivais pas à vous atteindre, répondit Hercule en se grattant la tête, gêné. -Tu es fort, déclara Aladdin. Plus fort que moi. Le Grec sentit sa fierté gonfler dans sa poitrine tandis que Phil pouffa avec mépris. -Mais tu es maladroit, et peu agile. Hercule n’allait pas le contredire. Il avait toujours été ainsi et Phil faisait tout ce qui était en son pouvoir pour que son poulain gagne en agilité et assurance. -Il est en plein apprentissage, cracha Phil. Aladdin prit une grande inspiration. Il avait murement réfléchi après le duel l’opposant au Grec. Il s’était laissé convaincre par la petite voix. Celle qui s’était manifesté depuis qu’il avait rencontré Hercule. Comme si elle voulait le pousser vers lui. Ils étaient décrits comme des héros. Ils se ressemblaient plus qu’ils ne le pensaient. Mais Aladdin pouvait apporter quelque chose à ce jeune novice. -Ce combat m’a permis de voir que j’ai encore de nombreuses choses à apprendre, poursuivit Hercule. Mais j’ai été content de me mesurer à un de mes pairs. Nous n’allons pas rester plus longtemps … -Pourtant, coupa Aladdin, je pense que je peux aussi t’entrainer. A l’entente de cette phrase, les yeux de Phil s’écarquillèrent et ses narines grossirent à mesure que le satyre implosait de l’intérieur. Il aurait tué Aladdin si Hercule n’était pas là. -Phil ! C’est ça ? demanda Aladdin. Je n’ai pas envie de te remplacer. Mais je pense pouvoir accorder un peu de temps à ton poulain. Je pourrais te le rendre plus agile et sûr de lui. -Et comment tu comptes faire ? Questionna Phil en desserrant les dents. Aladdin poursuivit la conversation plus détendu maintenant que le satyre était plus enclin à écouter : -J’ai grandi dans les rues de cette ville. J’ai volé et fui les gardes pour survivre. La rue était le meilleur moyen pour te rendre agile comme un singe. Abu couina et sauta sur l’épaule d’Aladdin pour poser en modèle d’agilité. Hercule commençait à apprécier l’idée. Il ne voulait pas trahir Phil mais il appréhendait l’idée d’avoir un maitre moins colérique et surement plus posé qu’un satyre à demi-chauve. -Qu’est ce qui te fait penser que tu vas y arriver ? reprit Phil. -Laisse-moi quelques mois pour l’entrainer puis nous verrons les résultats. Proposa Aladdin. Philoctète n’était pas du tout convaincu. -Et moi qu’est-ce que je fais pendant ce temps ? Je me dors la pilule au soleil. -Nous pouvons vous héberger au palais pendant tout l’entrainement. Répondit Aladdin. De plus, j’ai besoin d’une remise en forme, je me sens un peu rouillé. J’aimerais bien suivre la formation d’un vrai entraineur de héros. Hercule comprit où Aladdin voulait en venir. Il prenait Phil par les sentiments. Les traits de Phil s’adoucirent, il cessa de grincer des dents et un petit rictus apparut sur son visage. Aladdin avait rapidement trouvé la faille, le point faible de Phil. -Tu pourrais aussi me former ? demanda Aladdin. Ce serait un honneur pour moi d’être un de tes élèves. Phil se gratta la barbiche alors qu’Aladdin fit un rapide clin d’œil à Hercule. -Ouais, pourquoi pas ? déclara Phil. C’est pas une mauvaise idée. J’ai rarement pris deux élèves en même temps mais vous êtes aussi nuls l’un que l’autre. Tu as eu de la chance que Herc n’était qu’un simple novice, quelques mois d’entrainement en plus et il t’aurait écrasé. -Je n’en doute pas. Dit Aladdin. Alors marché conclu ? -On marche ! s’écria Phil. Hercule acquiesça en souriant et Aladdin se releva, satisfait de la façon dont s’était terminé l’entretien. -Parfait, termina-t-il. Mettez-vous à l’aise. Reposez-vous. Cette chambre est pour vous. Je suis obligé de repartir car je suis attendu autre part. Mais je vais demander à ce qu’on vous apporte à manger. -Merci ! répondit Hercule soutenu par un hennissement bienveillant de Pégase. Aladdin sortit de la pièce suivi par Abu. Il avait encore cédé aux exigences de la petite voix. Enfin quelque chose allait le sortir de la monotonie de ces derniers mois. Il subissait les leçons des professeurs pour Jasmine et le Sultan mais dans son for intérieur, la petite voix hurlait et appelait à l’aventure. Mais elle semblait s’être tue, satisfaite de la tournure des évènements. Aladdin soupira un bon coup alors qu’Abu grimpa sur son dos pour arriver sur l’épaule de l’ancien malfrat. -Je crois que ça va devenir très intéressant, Abu. Dans la chambre, Phil descendit de la banquette, alla prendre la dernière orange dans la coupe de fruit et la frotta contre son bras. -Ah, j’ai mené ce gamin de bout en bout ! dit-il tout fier. Hercule n’entendit même pas Phil, il s’était allongé tout du long sur la banquette et commença à s’endormir. Il s’enfonça entre les coussins en soie et plongea dans le sommeil, oubliant les longues nuits glaciales qu’il avait passé dans le désert.
|
| | | Lexias
Âge : 31 Messages : 11 Inscription : 27/08/2013
| Sujet: Re: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Mar 4 Fév 2014 - 21:22 | |
| A peine le chapitre 3 sorti, je vous offre le 4ème ! Tout chaud ! Ce chapitre marque le début véritable de l'intrigue. Les premiers chapitres servaient surtout à croiser les personnages avant de faire véritablement débuter l'intrigue ! J'espère que cela vous plaira !
Bonne lecture !
____________________________________________________________________________ Chapitre 4 – Un si joli nom
- - Chapitre 4 -:
Lorsque Ariel se leva, elle fit attention à ne pas réveiller Éric toujours endormi. A pas de loups, elle alla s’habiller d’une simple robe verte pomme qu’elle gardait dans son sac de voyage. Elle n’avait pas pu la mettre depuis leur départ et ce château semblait être l’endroit idéal pour la porter. Elle enfila des souliers noirs et s’approcha de la fenêtre. Par le petit espace entre les deux volets, elle vit que le temps ne s’était pas amélioré depuis hier soir. Le blizzard n’avait pas perdu en intensité si bien que les rayons du soleil n’arrivaient pas à percer la neige balayée par le vent.
Ariel sortit de la chambre et refit le chemin emprunté hier soir en sens inverse pour retrouver le grand hall. Elle avançait lentement à travers les larges couloirs du château en examinant tout de façon minutieuse. Elle regardait les meubles en bois vernis, les sculptures et les grandes toiles aux murs. Le palais d’Éric n’était pas aussi somptueux que celui-ci. Il n’était pas rempli de tableaux, de statues ou d’un mobilier aussi riche et vaste. Ariel s’émerveillait devant l’immensité de l’édifice. La sirène compara cette demeure au palais sous-marin de son père à Atlantica. Le seigneur de ce château devait être un grand homme tout comme son père, le Roi Triton.
Elle arriva enfin au grand hall et emprunta les escaliers pour atteindre le rez de chaussée. Soudain une porte s’ouvrit à la volée, une femme portant une pile de vêtements en sortit et traversa le hall de long en large. Ariel, s’approcha timidement de la femme alors qu’elle tentait d’ouvrir une porte.
-Excusez-moi….
La femme émit un cri aigu et laissa tomber la pile de vêtements sur le sol.
-Vous m’avez fait peur, mademoiselle.
C’était une femme ronde au visage enfantin, aux grands yeux et aux cheveux châtains. Elle portait une robe verdâtre sur laquelle elle avait enfilé un tablier blanc.
-Pardonnez-moi, déclara Ariel en l’aidant à ramasser les vêtements. Je voulais savoir où je pourrais trouver Lumière et Mme Samovar ?
La femme de chambre eut une soudaine réalisation.
-Vous êtes la jeune fille qui est arrivée hier ! Mme Samovar m’a prévenue de votre arrivée hier soir. Soyez la bienvenue ! Où est l’homme qui vous accompagnait ?
-Merci, je m’appelle Ariel. Mon mari dort toujours.
-Il faut dire que vous avez affronté la tempête et le froid. Ce n’est pas le bon moment pour trainer dehors.
Elles entendirent le vent hurler au dehors et un frisson parcourut leur échine.
-Attendez-moi un instant et je suis à vous. Dit la femme.
Elle entra dans la pièce avec sa pile de vêtements et en ressortit les mains libres. Puis elle prit la rousse par le bras et l’emmena vers une porte en face du hall.
-Vous devez être morte de faim. Nous allons trouver Mme Samovar et elle va vous faire un bon petit déjeuner. Vous pouvez m’appeler Anne ! Je suis femme de chambre, ici au château. C’est un plaisir de vous rencontrer !
-De même, fit Ariel en pensant aux leçons de Grimsby sur la politesse et la bienséance.
Ils entrèrent dans le petit salon où ils avaient soupé la veille pour découvrir Mme Samovar endormie dans un fauteuil au coin de la cheminée où crépitaient quelques braises.
-Oh ! Elle a dû encore veiller tard, dit Anne à mi-voix.
La femme de chambre secoua doucement l’épaule de Samovar.
-Mme Samovar. Mme Samovar …
Les paupières de la gouvernante du château papillonnèrent et elle émit un grognement rauque signifiant que son sommeil n’avait pas assez duré.
-Navré de vous réveiller, Mme Samovar, s’excusa Anne.
-Vous avez bien fait, balbutia Samovar en posant ses mains sur les accoudoirs du fauteuil.
Elle se releva difficilement et s’étira légèrement. Ariel resta en arrière laissant les deux domestiques du château entre elles. Samovar aperçut leur invitée par-dessus l’épaule de la femme de chambre et la salua :
-Bonjour, ma chère. Avez-vous bien dormi ?
-Très bien.
La gouvernante se frotta les yeux et cacha un bâillement avec sa main.
-Je n’ai que trop dormi pour ma part, déclara Samovar suivi d’un ricanement malicieux d’Anne.
Les trois femmes sortirent de la pièce pour déboucher sur le grand hall plus sombre qu’à l’habitude. C’est à ce moment-là qu’une tornade blonde descendit en trombe de l’escalier menant à l’aile ouest. C’était un jeune garçon aux cheveux blonds.
-Maman ! Maman ! S’exclama-t-il lorsqu’il la vit au bas des escaliers. Le docteur attend son petit déjeuner !
-Sacrebleu, pesta Mme Samovar, ça m’apprendra à somnoler. J’ai oublié de le lui faire. Et le maitre ? Et Maurice ?
-Ils n’ont pas faim. Reprit le garcon.
-Bien je vais m’en occuper. Répliqua Samovar.
-Non, laissez-moi faire, insista Anne. Vous devez souffler un peu.
Anne tapota légèrement la main de Samovar tandis et elles s’échangèrent des regards plein de compassion. La femme de chambre les abandonna et passa une porte qui se referma derrière elle. Samovar se retourna vers Ariel avec un sourire affectueux.
-Vous devez avoir faim vous aussi. Venez nous allons vous préparer quelque chose.
Le jeune garçon remarqua Ariel et s’approcha d’elle innocemment :
-C’est vous qui êtes arrivés hier soir ? Comment vous vous appelez ? Moi c’est Zip.
En voyant ce garçon, Ariel ne put s’empêcher de penser à un poisson jaune aux rayures bleues qui devait barboter dans un océan bien loin de ce château et de la tempête de neige qui l’englobait. Elle lui sourit et répondit :
-Oui c’est bien moi. Et je m’appelle Ariel.
Et depuis cet instant, Zip ne la lâcha pas d’une semelle. Lorsqu’ils arrivèrent à la cuisine, elle était vide mais quelques couverts prouvaient qu’Anne avait fait le petit déjeuner du docteur en quatrième vitesse. Mme Samovar laissa Ariel s’assoir à la grande table où mangeaient les domestiques et Zip s’installa face à elle. La gouvernante servit un bol de lait chaud à la jeune fille. Elle donna du pain et du beurre à son fils pour qu’il fasse des tartine à leur invitée. Zip alla chercher un pot de confiture et commença à l’appliquer sur le pain et le beurre devant Ariel intéressée par la substance gélatineuse et orangée. Zip tendit une tartine à Ariel qui fit tourner le morceau de pain dans tous les sens pour observer la confiture d’orange.
-Vous pouvez la tremper dans le lait ou la manger comme ça. Expliqua Mme Samovar en voyant Ariel tourner la tartine dans tous les sens.
-Oui, oui. Dit Ariel en comprenant que son comportement pouvait intrigué ceux de la surface.
-T’es pas normal, toi. Pouffa de rire Zip.
Le visage d’Ariel prit une teinte rouge lorsqu’elle croqua dans le pain. Elle reprit encore trois autres tartines faites par qui Zip en mangea quelques-unes par gourmandise. Une fois qu’ils eurent terminé, Mme Samovar proposa à Ariel de lui faire visiter le château.
Pendant toute la matinée, Ariel parcourut de long en large le château accompagné de Zip et de Mme Samovar. Le château était désert, presque abandonné. Mme Samovar lui précisa que le maitre du château avait renvoyé la plupart des domestiques chez eux dans les villages environnants avant que la tempête n’éclate et qu’elle ne bloque les voies d’accès au château. Ils parcoururent de nombreux escaliers et salons mais les volets fermés et les bougies éteintes rendaient les lieux lugubres et menaçants. Lorsqu’ils arrivèrent à la grande salle de bal, Ariel s’extasia devant l’immensité de la pièce. Elle levait les yeux au ciel et tentait de distinguer la fresque peinte sur le plafond à demi-dissimulée par un gigantesque lustre d’or aux dizaines de bougies.
-Vous devriez voir cette salle lors des grands jours. Elle rayonne …
Ariel entendit Mme Samovar étouffer un sanglot, s’essuyer les yeux avec un mouchoir blanc puis afficher de nouveau une mine enjouée.
La salle des domestiques était vide. La gouvernante expliqua que les quelques domestiques qui étaient restés au château possédaient des quartiers spécifiques, et que le dortoir des domestiques restait désert en attendant la fin de la tempête et l’arrivée de meilleurs jours. A mesure que la visite se poursuivait, les commentaires de Mme Samovar se répétaient comme une triste fatalité : « Vous devriez voir cet endroit lorsque le soleil se lève, ses rayons magnifient la pièce. » ; « Cette salle est un peu poussiéreuse depuis que nous manquons de domestiques pour la nettoyer mais ici, nous organisons de grands festins pour des centaines de personnes lorsque le printemps arrive» ; « Oh ! N’allons pas par ici, cet endroit n’est pas du tout présentable pour une invitée. »
Ariel regretta de ne pas voir ce magnifique château lors des grands évènements. Tout ce qu’elle voyait maintenant était un immense édifice sombre et austère comme les abysses oubliées qui parsemaient le fond des mers. Le ton de Mme Samovar trahissait une certaine mélancolie et une nostalgie de ces grands évènements où cette demeure rayonnait par sa beauté et son luxe. Ces langoureux soupirs sonnaient comme les regrets d’un temps qui avait touché à sa fin et qui ne réapparaitrait plus. Mme Samovar et Zip l’emmenèrent ensuite dans l’Aile Ouest. Cependant, ils n’explorèrent pas un long couloir bordé de statues et d’armures. La gouvernante ne s’expliqua pas et poursuivit son chemin suivi par son jeune fils vers une double porte verte pomme aux poignées d’or.
Ils entrèrent dans une salle obscure, épargnée de toute lumière.
-Je vais tenter de nous éclairer un peu. Dit Samovar en tâtonnant le dessus d’une petite table à la recherche d’un chandelier.
Elle alluma les trois bougies avec une allumette, alla au centre de la pièce et leva haut le chandelier. La lumière se porta sur les murs de la salle qui étaient couverts de rangées de livres et d’immenses étagères et armoires sur lesquels étaient installés de hautes échelles. Au-dessus de leurs têtes, le lustre projetait d’étranges ombres sur un plafond à peine visible.
-C’est l’une des fiertés de ce château, une bibliothèque comprenant des milliers de volumes et ouvrages rassemblés par les différents seigneurs du château.
Ariel n’avait jamais vu autant de livres. A mesure que Mme Samovar parcourait la salle et éclairait les couvertures anciennes alignées sur de grands et longs meubles, Ariel ressentit l’ampleur de la collection de livres du châtelain.
-Il y en a tellement … dit-elle à mi-voix.
-C’est l’endroit préféré de Belle ! Ajouta Zip.
-Belle ? demanda Ariel. Qui-est-ce ?
Mme Samovar se tourna vers la jeune fille. Les bougies éclairaient son visage attristé, dépité.
-Il s’agit de la châtelaine. Elle apprécie énormément lire et elle passait une grande partie de ses journées dans cette bibliothèque.
Depuis son arrivée, Ariel soupçonnait que quelque chose s’était passé pour que le château perde de sa superbe et que ses domestiques broient du noir. A présent, elle commençait à percevoir ce qui tourmentait la gouvernante.
-Où est-elle en ce moment ? demanda Ariel.
Samovar s’assit sur un sofa vert et son fils la rejoignit.
-Elle est malade, terriblement malade, ma chère. Répondit-elle au bord des larmes.
-Je suis désolé …, répondit Ariel, compatissante qui aurait finalement préféré ne pas poser cette question.
-Ne vous excusez pas, vous n’y êtes pour rien, dit Samovar rassurante. Nous tenons énormément à elle. Elle est entrée dans nos vies à une période cruciale de notre existence. Elle est celle qui a redonné un sens à nos vies. Elle est tombée amoureuse du maitre et ils se sont mariés. Le château est redevenu l’endroit de joie et de bonheur que je connaissais autrefois. Puis elle est tombée enceinte, tout le monde se réjouissait de cette nouvelle mais au fur et à mesure que les mois passaient, la santé de Belle déclinait. Elle souffre atrocement depuis et fait tout pour garder le lit. Le maitre a fait venir les médecins les plus réputés du pays mais aucun n’a trouvé la source de ce mal.
-Tous les jours, on espère qu’elle ira mieux … expliqua Zip.
-Mais chaque jour qu’il passe l’affaiblit et nous craignons pour sa vie ainsi que celle de son enfant. Et je redoute que ce moment vienne bientôt.
Mme Samovar baissa la tête et laissa échapper un sanglot alors que Zip tentait de la consoler. Ariel s’approcha de la gouvernante pour essayer de la rassurer.
-Je n’aurais pas dû vous demander ça. Dit-elle.
-Ce n’est rien, reprit la gouvernante en séchant ses larmes. Je dois … rester forte … pour elle.
Soudain un tintement de cloche se fit entendre. Il s’agissait d’une horloge située dans un coin de la pièce et Mme Samovar se releva soutenu par Zip et Ariel.
-Il est déjà midi, soupira-t-elle. Je dois aller préparer le déjeuner. Vous devriez aller voir si votre mari s’est décidé à sortir du lit.
Ariel sortit de la bibliothèque et traversa les couloirs en repensant à ce que venait de lui dire la gouvernante. Elle comprit enfin d’où provenait l’ambiance morbide à l’intérieur du château. Les pensées et inquiétudes des domestiques allaient tous vers la maitresse de ce château. Cette révélation pesait sur son cœur. Elle s’était lié avec Éric, il y a quelques mois et espérait tant fonder une famille. Les maitres de ce château souhaitaient surement la même chose et pourtant leur avenir semblait plus qu’un incertain. Elle repensa au maitre des lieux qu’elle avait croisé la veille. Fatigué, torturé, blessé, son monde s’écroulait sous ses yeux et il ne pouvait rien y faire. Ariel espéra de tout son cœur ne pas à avoir supporté cette peine.
Lorsqu’elle arriva à sa chambre, Éric venait juste de s’habiller. Elle prit quelques instants pour lui raconter ce que venait de lui révéler Mme Samovar dans la bibliothèque. Cela éclaira grandement Eric sur l’angoisse qui régnait au château.
-Que pouvons-nous faire ? S’interrogea Ariel.
-Je n’en ai aucune idée, souffla Éric.
-Vous les humains, vous n’avez pas des sorciers, des enchanteurs ou des guérisseurs qui pourraient la soigner ?
-Nous n’avons que des médecins, Ariel. Je ne sais pas si à Atlantica, la magie est une chose commune. Mais sur terre et sur mer, je n’ai vu aucun sorcier. Et pourtant j’ai voyagé sur de nombreuses mers.
-J’aimerais tant que Père soit là, il pourrait surement nous aider.
Eric prit les mains d’Ariel.
-Il y a des choses qui nous dépassent. Des choses que même le Roi des Mers ne peut résoudre. C’est triste à dire mais nous ne pouvons rien faire.
Ils descendirent alors à la cuisine, accablés par la nouvelle, pour rejoindre les autres. Mme Samovar s’était contentée de préparer une grande marmite de bouillon de légumes avec un peu de poisson. Ariel et Eric s’installèrent côte à côté tandis que face à eux étaient attablés Zip et sa mère. Le repas était plus que silencieux. Seuls les raclements de cuillères au fond des assiettes résonnaient dans la cuisine. L’ambiance devint moins pesante lorsque Zip commença à discuter avec Eric. Le jeune garçon s’intéressa aux nombreuses histoires de voyage en mer du Prince qui resta assez vague sur sa rencontre avec Ariel. Cette dernière et la gouvernante poursuivirent leur repas en écoutant les aventures d’Éric dont Zip buvait les paroles.
Les portes des cuisines s’ouvrirent sur Big Ben et Lumière. Les deux serviteurs semblaient plus que désespérés. A leur entrée, ils ignorèrent totalement Ariel et Eric.
-Voulez-vous manger quelque chose ? demanda Samovar d’une voix douce.
-Nous allons nous débrouiller, Madame, répondit le gentilhomme rondouillard aux moustaches.
Big Ben prit place aux côtés d’Ariel tandis que Lumière s’installa en bout de table après s’être servi un bol de bouillon. Big Ben se tourna tout à coup vers Ariel et lui jeta un œil interloqué :
-Mais qui êtes-vous ? dit-il d’un ton peu poli.
-Il s’agit des visiteurs inattendus d’hier soir, les reconnut Lumière. Avez-vous apprécié votre nuit ici ?
-Vos lits sont bien plus agréables que tous ceux des auberges où nous nous sommes arrêtés sur la route, répliqua Eric.
-Ils sont de la meilleure manufacture, mon brave, se vanta Big Ben. Et je ne crois pas connaitre vos noms.
-Voici Eric et Ariel ! Dit Lumière en roulant les « r ». Ils ont été pris à travers la tempête hier soir.
-Ils ont eu de la chance de tomber sur le château. Ajouta Mme Samovar.
-Nous avons été très bien accueillis, dit Ariel.
-Mais nous ne voulons pas nous imposer, expliqua Eric en prenant compte de la situation au château. Dès que la tempête se sera apaisée, nous comptons reprendre la route.
-Je crois que votre départ sera retardé. Le blizzard s’est intensifié. Le ciel s’est tellement assombri qu’on se croirait en pleine nuit. Indiqua Lumière.
-Vous partirez quand le temps sera revenu à la normale. Mais ne vous inquiétez pas, nous avons suffisamment de place pour recueillir ceux qui fuient le froid.
-Surtout que nous l’avons appris chèrement, grinça à mi-voix Big Ben.
Après le repas, ils se retrouvèrent dans le petit salon autour de la cheminée autour d’un thé préparé par Mme Samovar. Au coin du feu, ils firent plus amplement connaissance avec leurs invités. Eric dut à nouveau poursuivre les récits de ses aventures sur les mers. Big Ben y allait de sa petite anecdote en ajoutant que son grand-père avait été capitaine d’un navire marchand et qu’il avait lui aussi bravé les périples des océans pour faire parvenir ses cargaisons à bon port. Lumière contemplait le feu en fumant sa pipe, prêtant l’oreille aux récits des invités tandis que Zip écoutait sur les genoux de sa mère.
Quelques coups retentirent à la porte et une petite tête émergea dans l’entrebâillement.
-Pardonnez-moi, dit-elle. Puis-je entrer ?
Les domestiques du château se levèrent à l’entente de ces mots et se ruèrent vers la porte.
-Bien sûr, Docteur Moreau, entrez ! dit Lumière.
Le Docteur Moreau était un homme de faible corpulence, il était squelettique et d’une grande stature. Son teint était pâle, presque fantomatique. Rien n’indiquait qu’il était médecin mais il avait tout du malade. D’immenses cernes étaient nichés sous ses yeux absents et ses cheveux gris cachaient difficilement le haut de son crane presque chauve. Il était habillé d’une simple chemise aux manches retroussés et d’un long pantalon noir. Il s’épongeait le front avec un mouchoir blanc car quelques gouttes de sueur perlaient sur ses tempes.
-Que se passe-t-il, Docteur ? S’interrogea Mme Samovar.
-Je suis simplement venu voir si je pouvais manger quelque chose et m’assoir un moment, je suis exténué. Balbutia Moreau.
Lumière lui tendit un fauteuil et le Docteur s’affala dedans en s’essuyant le front.
-Qu’en est-il de l’état de Madame ? Questionna Big Ben.
Ariel et Eric tendirent l’oreille alors que le Docteur soupira longuement.
-Elle s’est stabilisé, un moment … dit-il. Mais nous ne devons pas attendre plus longtemps … Cela vient à son terme.
Big Ben, Lumière et Mme Samovar restèrent figés. Les dires du Docteur avaient eu l’effet d’un couperet sec qui avait mis fin à leurs espoirs.
-Avez-vous tout essayé ? s’indigna Lumière.
-Evidemment, souffla Moreau.
-Et le maitre ? Qu’as-t-il décidé ? reprit Mme Samovar.
-Il est avec le père de la malade, c’est eux qui doivent prendre la décision, déclara Moreau assailli par les questions.
Les idées noires venaient de s’immiscer de nouveau dans le petit salon et dans le cœur des domestiques du château qui s’enfermèrent dans le chagrin. Eric et Ariel ne pouvaient qu’observer et compatissaient à la douleur que pouvait ressentir les serviteurs ainsi que leur maitre.
-Et Belle ? Intervint Mme Samovar. Elle ne s’est pas battue aussi longtemps pour qu’on décide de son sort ou celui de son enfant.
-Elle souhaite sauver l’enfant … dit Moreau. Dans ce cas, elle se condamnerait … Mais nous pourrions tout aussi bien perdre l’enfant en essayant de le sauver …
-Quel malheur, quel malheur … se répéta Big Ben.
-Il y a une possibilité de la sauver, expliqua Moreau. Mais c’est un espoir très mince et l’enfant n’y survivrait pas …
Ariel et Eric restèrent dans un coin assis sur des chaises et attendirent avec les autres. Lumière avait rangé sa pipe et avec Big Ben, ils regardaient le feu crépiter dans l’âtre de la cheminée tandis que Mme Samovar enlaçait son fils, tous deux aux bords des larmes. Le Docteur Moreau somnolait sur son fauteuil, le ventre vide, extenué après une nuit blanche à veiller sur la malade.
Un bruit soudain les sortit de leur torpeur. Une voix profonde se fit entendre dans le grand hall :
-Docteur Moreau ! Docteur Moreau !
Ils sortirent tous du salon et virent le maitre des lieux descendre les escaliers du grand hall en trombe.
-Docteur ! Elle vient d’avoir une nouvelle crise !
Moreau reprit longuement son souffle et s’adressa au seigneur du château :
-Avez-vous … fait votre choix ?
Les yeux bleus du châtelain ne se détachèrent pas du docteur décharné et épuisé. Le ton de sa voix ne variait pas. Il était plein de colère et de peur.
-Vous devez les sauver tous les deux ! Faites tout ce qui est en votre pouvoir ! dit-il.
-Je ne peux pas, il est trop tard. Répondit le docteur. Vous devez choisir l’enfant ou votre épouse.
Le châtelain serra les dents et ses yeux plongèrent vers le sol. Il se sentait basculer sur les marches de l’escalier et plongea sa tête entre ses mains. Ses serviteurs allèrent immédiatement l’épauler.
-Maitre, elle est l’amour que vous avez attendu si longtemps. Il y a une chance de la sauver mais elle est mince, conseilla Big Ben.
-La volonté de Belle est de sauver l’enfant au détriment de sa vie, maitre. Répliqua Mme Samovar les larmes aux yeux. C’est son combat, vous devez respecter son choix !
-Je ne sais que choisir, grogna le maitre.
-Le temps joue contre nous, s’exclama Lumière. Vous devez choisir ou bien vous les perdrez tous les deux !
-Je le sais bien ! Rugit-il.
Ariel et Eric restèrent en retrait. Ce qu’ils voyaient était larmoyant. Même Zip était resté auprès d’eux et sanglotait en serrant très fort la main d’Ariel. D’autres pas précipités se firent entendre et un vieil homme apparut en haut des escaliers, le visage rouge emplit de larmes.
-Docteur ! Aidez-nous ! Aidez-nous ! hurla-t-il.
Le père de Belle fut rejoint par le docteur Moreau qui monta quatre à quatre les marches. Le maitre des lieux entouré de ses serviteurs ruminait son désespoir et sa tourmente.
-L’enfant, il faut le sauver. C’est la dernière volonté de Belle !
-Je ne veux pas la perdre !
-Nous pouvons la sauver ! Mais alors c’est l’enfant qui en paiera le prix !
-Et si elle ne survit pas, tout cela aura été en vain !
-Maitre ! Il faut vous décider !
-Je n’y arrive pas !
-Il le faut !
-Belle ou l’enfant !?
-Le temps presse !
-Assez ! Ça suffit !
Trois coups furent donnés sur la grande porte d’entrée. Cela installa le silence parmi tous. Mme Samovar se tourna vers Zip.
-Vas ouvrir, mon chéri.
Eric fit un signe au jeune garçon et laissa en compagnie d’Ariel alors qu’il se dirigeait vers la porte. Il ouvrit la lourde porte en bois, laissant entrainer le vent et des flocons de neige à l’intérieur. Sur le seuil, il vit une petite silhouette encapuchonné dans une robe de bure verte qui s’appuyait sur un piètre morceau de bois.
- Puis-je obtenir un abri dans cette demeure contre le froid mordant qui fait rage ?
Eric se souvint des paroles de Mme Samovar. Tous ceux qui souhaitaient se réfugier contre le froid étaient les bienvenus ici.
-Entrez, dit-il.
La vieille femme se traina à l’intérieur puis Eric referma la porte derrière elle.
-Pouvez-vous m’aider à marcher jusqu’à l’escalier ? dit-elle.
-Bien sûr…
Elle avait un visage boursoufflé et un œil malade et son sourire sans dents n’émut point Eric qui avait vu pire chez de vieux marins. Il l’amena devant l’escalier où le châtelain n’avait toujours pas décidé du sort de son épouse et de son enfant. La canne de la vieille femme tapa le sol froid du château à chaque pas comme les secondes qui s’écoulaient lentement alors que Belle courait à sa perte. Arrivée au pied de l’escalier, elle remerciât Eric et plaça ses deux mains sur sa canne.
-Tu es plongé dans une profonde détresse, Adam.
A l’entente de son nom et de cette voix, le maitre leva les yeux et dévisagea la vieille femme. Ses grands yeux bleus n’en revenaient pas, il venait de voir une vision du passé. Un passé lointain qu’il préférait oublier mais qui parfois revenait le hanter dans ses cauchemars.
-Toi …
-Il semblerait que les choses ont bien changé depuis notre dernière rencontre … dit-elle en ricanant.
Tous restèrent muets devant cette soudaine apparition. Adam se releva difficilement.
-Tu n’es pas là par hasard … souffla-t-il. Tu peux les sauver, tu peux les sauver !
Adam descendit les escaliers alors que Mme Samovar étouffa un cri en réalisant le lien qui unissait son maitre et la vieille mendiante. Big Ben et Lumière le comprirent également mais ne réagirent pas, pétrifiés par la vieille femme. Ariel et Eric restèrent proches de la porte du salon, ne pouvant détacher leurs yeux de ce qui se déroulait.
-Tu sembles plus enclin à accepter les miséreux dans ton château. Reprit la vieille femme.
-Je t’en supplie, Enchanteresse ! s’écria Adam. Sauve Belle et sauve mon enfant !
-Qu’as-tu à m’offrir ?
Adam se mit à terre, et s’abaissa devant la mendiante. Il ne put retenir ses larmes qui coulèrent le long de ses joues sur le tapis rouge du grand hall.
-Je te donnerai tout pour qu’ils puissent survivre. Je te donnerai tout ce que j’ai ! Je te donnerai ce château ! Je te donnerai de l’or ! Je te donnerai ma vie !!
-Tu me donnerais ta vie ? demanda la mendiante lentement.
-Oui… gémit-il.
Mme Samovar plaça ses mains devant sa bouche alors que Lumière et Big Ben écarquillèrent les yeux stupéfaits.
-Tu te sacrifierais pour eux ?
Adam répondit sans aucune hésitation.
-Oui …
La vieille femme leva lentement sa main décharnée et les serviteurs reculèrent. Zip se cacha derrière les pans de la robe d’Ariel tandis qu’Éric hésita à intervenir. Adam tendit sa tête en guise de soumission alors que la mendiante le dominait du regard.
Sa main s’abattit soudainement telle la lame acérée d’une épée sur la nuque du seigneur. Ariel et Samovar étouffèrent un cri. La main décharnée se posa sur la chevelure d’Adam et la caressa tendrement.
-Tu as bien changé, Adam … souffla l’Enchanteresse.
Il leva les yeux vers la mendiante dont l’horrible visage rayonnait.
-Il y a quelques années, tu t’es mis à genoux pour que j’épargne. Dit-elle avec un rictus. Mais aujourd’hui, tu donnes ta vie pour ceux que tu aimes.
Elle tourna les talons et se dirigea vers la porte sous des yeux hébétés.
-Suis-moi, Adam. Je vais te mener à ce qui va sauver ta femme et ton enfant. Annonça-t-elle à haute voix.
Adam se leva d’un bond et hurla :
-Lumière ! Mes bottes ! Mon manteau !
Le serviteur fila à la vitesse de l’éclair dans une penderie à la recherche de vêtements chauds.
-Mme Samovar ! Allez-vous occuper de Belle ! Je vais revenir bientôt.
La gouvernante ne perdit pas de temps et monta les escaliers rejoindre le docteur Moreau et Maurice au chevet de Belle.
-Maitre ! Je vais avec vous ! s’exclama Big Ben en bombant le torse. J’affronterai tous les blizzards ! Tous les dangers pour que vous puissiez ramener …
-Non, vous resterez ici. Ordonna Adam alors que Lumière l’habillait d’une veste. Veillez sur Belle. Je serais de retour au plus vite.
A cet instant, Eric intervint auprès du maitre des lieux.
-Vous nous avez sauvés du froid, je ferais tout pour vous aider à sauver votre femme. Laissez-moi vous accompagnez.
Adam dévisagea Eric avec ses yeux ronds comme s’il le voyait pour la première fois.
-Votre aide est la bienvenue, dit-il en esquissant un sourire. Lumière ! Allez chercher d’autres vêtements pour …
-Eric ! Maitre ! dit Big Ben. Eric !
-Je viens aussi avec vous, déclara Ariel.
-Nous sommes assez de deux, coupa son époux. Reste avec les autres et va les aider.
La sirène grimaça mais dut se résoudre à accepter à rester ici. Lumière er Big Ben habillèrent les deux hommes pour qu’ils puissent affronter le blizzard qui balayait le château. L’Enchanteresse les attendait à la porte et lorsqu’ils furent prêts, ils ouvrirent la porte puis se jetèrent dans la tempête.
Pendant ce temps, Lumière, Big Ben et Zip guidèrent Ariel jusqu’à l’Aile Ouest où ils empruntèrent le couloir bordé d’armures que Mme Samovar avait évité durant la visite du château. Ils montèrent d’autres escaliers et traversèrent d’autres couloirs où étaient accrochés de grands et fameux tableaux de peintres de renommée. Enfin ils arrivèrent à une grande porte au bout du couloir d’où provenait une grande agitation. Lorsque Lumière ouvrit la porte, Ariel vit une chambre sombre éclairée par quelques bougies et lanternes placées à différents endroits de la pièce. Anne et Mme Samovar orbitaient autour d’un grand lit à baldaquin. Au chevet du lit, Maurice, les larmes aux yeux, conservait son courage et soutenait de tout son cœur sa fille dans ses épreuves. Le Docteur Moreau s’affairait sur une commode à différents mixtures à bases d’herbes qui soulageraient la douleur de la belle.
Ariel s’approcha lentement du lit et put enfin voir la châtelaine adorée par tous les domestiques. Elle était allongée, d’épais draps et couvertures la recouvrait, et Ariel put discerner son ventre rebondi qui émergeait de l’édredon. Ses longs cheveux châtains étaient détachés et ses joues s’étaient creusées suite aux longs mois de convalescence. Son père lui tenait fermement la main alors qu’elle haletait et suait à grosses gouttes. Elle gardait les yeux fermés, émettait de petits cris de souffrance et se tordait sous la douleur. Elle était tellement pâle qu’elle semblait être déjà passée dans l’autre monde.
La sirène alla directement vers Mme Samovar qui trempait et étreignait une serviette dans une bassine. Les contractions avaient commencé et il ne fallait plus tarder.
-Dites-moi en quoi puis-je vous aider.
***
Eric avait bien du mal à s’y retrouver. Le vent lui envoyait sans cesse de la neige dans les yeux et même s’il essayait de se protéger avec son bras, il ne voyait pas où il marchait. Le blizzard hurlait et crachait répandant un enfer gelé sur la forêt. Eric ne distinguait que les silhouettes sombres des arbres alors qu’il avançait au ralenti dans une épaisse poudreuse. A ses côtés, Adam balayait la neige à chacun de ses pas. Il fendait le vent glacial, prêt à tout pour ne quitter la mendiante des yeux. Cette dernière ouvrait la marche mais alors que les deux hommes se frayaient un chemin dans l’épaisse poudre blanche, elle semblait glisser sur la neige. Au détour d’un regard, ils la virent disparaitre derrière un tronc puis quelques instants après, réapparaitre un peu plus loin.
Soudain Eric vit Adam se tourner vers lui pour dire quelque chose. Les hurlements du vent empêchait Eric de distinguer les paroles d’Adam.
-Quoi !? Hurla-t-il.
Les lèvres d’Adam frémirent avec force mais rien ne parvint aux oreilles d’Eric. Tout devint blanc. Sa vision devint floue. Le froid le prit jusqu’aux entrailles. Même Adam disparut dans le tumulte de neige.
-Adam ! S’écria Eric.
Il regarda autour de lui mais tout était blanc. Il avait même perdu de vue la cape verte de l’Enchanteresse.
-Ohé !
Il avança à tâtons à travers le blizzard, cherchant quelque chose auquel se rattacher. Mais ces mains ne touchèrent que le vide. Il fit quelques pas avant d’être brutalement attrapé par le haut de son manteau.
-Attention !
Eric fut tiré en arrière. Adam l’avait agrippé par le col de son manteau et l’empêchait de bouger. A leurs pieds, une ligne se dessina au sol. Le nuage de neige se dissipa un instant et Eric put apercevoir le rebord escarpé de la falaise qu’il était prêt à enjamber.
-Je vous avais prévenu pour la falaise, s’écria Adam en se rapprochant d’Éric. Restez derrière moi, nous ne devons pas perdre la vieille femme.
Eric acquiesça et les deux hommes aperçurent la silhouette voutée de l’Enchanteresse à quelques mètres en suivant le rebord de la falaise. Elle s’était arrêtée sur un promontoire et les attendait immobile sans trembler, insensible au froid. Ils longèrent le précipice en restant à distance du vide puis allèrent enfin la rejoindre. Lorsqu’il arriva au niveau de la mendiante, Adam regarda autour de lui.
-Où nous as-tu emmenés ? S’écria-t-il.
La mendiante resta silencieuse. Son visage s’enfonça sous sa capuche verte et lentement celle-ci s’enleva pour laisser échapper un halo de lumière pure dans les airs. L’apparition prit la forme d’une femme rayonnante à la chevelure d’or et à la robe parsemée d’étoiles. Ses yeux étaient comme minuscules soleils si lumineux qu’Éric et Adam ne purent croiser son regard. L’Enchanteresse lévita au-dessus du précipice et annonça d’une voix sonore venue d’un autre monde :
-Votre quête s’achève.
Elle disparut en un éclat lumineux aveuglant puis ils virent une fine goutte d’or chuter du ciel. Elle tomba sur le sol enneigé à leurs pieds. Soudain, la neige fondit en un instant pour laisser apparaitre une herbe verdoyante et humide d’où poussèrent quelques plants de fleurs. C’était des fleurs violettes qui instantanément s’étaient mis à s’ouvrir comme en plein printemps. Mais la plus grande et la plus belle de toutes était une fleur aux pétales jaunes qui illuminaient la parcelle d’herbe. Eric et Adam ne purent détacher leurs yeux de cette fleur qui resplendissait de mille feux. Un murmure vint à leurs oreilles :
-Voilà ce que tu recherches.
Adam s’approcha lentement de la fleur de peur de l’écraser et tendit sa main vers elle. La fleur flamboyante émanait une chaleur apaisante qui envahit tous ses membres. Il hésita un instant et se saisit délicatement d’elle ainsi que des plants mauves qui l’entouraient. Aussitôt la neige recouvrit la parcelle ou se trouvaient les fleurs et l’hiver reprit ses droits. Cependant le blizzard se dissipa lentement et le vent se stoppa. La plus haute tour du château émergea de la brume au loin et Adam et Eric purent enfin voir le chemin qu’ils avaient parcouru.
-Nos chemins se séparent définitivement. N’oublies jamais, Adam. Murmura le vent. Adieu …
Adam resta quelques instants à contempler la vallée enneigée qui se dévoilait sous ses yeux puis il mit délicatement les fleurs dans la poche de son manteau et repartit suivi par Eric en direction du château.
***
Quelques heures plus tard, les deux hommes se retrouvèrent dans un couloir de l’Aile Ouest à attendre. Adam, assis sur une chaise, ne tenait plus en place. Son pied tapait frénétiquement sur le sol et il grinçait des dents. Eric attendait patiemment en face de lui en croisant les jambes. Ariel était assis à côté de lui, elle n’était plus d’aucune utilité dans la chambre de Belle. Big Ben et Lumière patientaient debout. Le rondouillard ne pouvait s’empêcher de se ronger les ongles alors que l’autre faisait les cent pas. Cela agaçait beaucoup son maitre.
-Lumière, cessez de gesticuler ! Rugit-il.
Sa voix résonna dans tout le château et fit sursauter tout le monde. Face à lui, Ariel et Eric le regardaient avec des yeux ronds. Adam pâlit et se renfonça dans son siège.
-Pardonnez-moi Lumière, je me suis emporté. Marmonna-t-il.
-Ce n’est rien, maitre ! Tout le monde est sur les nerfs ! assura le gentilhomme avec un sourire plein d’espoir.
-Je suis sûr que tout ira bien, dit Ariel en rassemblant son courage.
Adam la dévisagea avec ses yeux bleus pénétrants et soupira :
-J’espère que vous aurez raison.
Il avait confié la fleur d’or au Docteur Moreau qui l’avait regardé stupéfait lorsqu’Adam lui demanda de fabriquer un remède à partir de cette plante. Moreau s’était alors exécuté sans poser de questions. Il était resté en compagnie d’Anne et de Mme Samovar pour soigner Belle et faire venir l’enfant au monde. Et depuis, ils angoissaient dans l’attente de résultats. Une autre heure passa et aucune information ne leur parvint. Zip s’ennuyait dans un gros fauteuil et baillait. Adam avait les nerfs à vif. Il s’était raccroché à ce dernier petit espoir donné par l’Enchanteresse et priait pour que tout cela n’ait pas été fait en vain. Tous l’espéraient ardemment.
Enfin après trois heures d’attente, Mme Samovar alla à leur rencontre. Ses yeux étaient remplis de larme et sa bouche se tordait en un épais sourire.
-Maitre, murmura-t-elle. Ils sont saufs tous les deux …
Adam se rua vers Mme Samovar, la souleva dans les airs et l’embrassa sur la joue avant de filer vers la chambre. Lumière ne pouvait s’empêcher de rire. Zip sautait de joie et Big Ben laissa ruisseler quelques larmes sur ses joues. Ils respiraient enfin après des jours et des mois d’angoisse et de peur. Ariel et Eric ne cachèrent pas leur joie. Mme Samovar prit Ariel dans ses bras tandis qu’Éric reçut l’accolade de Big Ben et Lumière. Le jeune couple fut étonné de la familiarité que prenait les domestiques pour des gens qu’ils ne connaissaient que depuis hier. Mais l’émotion et le soulagement étaient à leur comble.
Ils rejoignirent la chambre où ils retrouvèrent Adam agenouillé auprès du lit. Les domestiques entrèrent dans la chambre tandis qu’Ariel et Eric restèrent dans le couloir car ils se sentirent de trop dans ce tableau de famille. Adam exultait de joie et serrait la main de sa femme. Ses yeux noisette regardaient avec amour Adam, les yeux humides. Le couple se retrouvait enfin après de longues épreuves et de nombreuses frayeurs. Belle respirait lentement, le teint éclairci mais exténué par l’accouchement qui était finalement allé à son terme et dans les meilleures conditions.
-J’ai eu si peur, souffla Adam en posant sa tête sur le lit.
Belle caressa affectueusement la tête de son époux alors qu’Anne arriva auprès du lit avec un paquet enroulé dans un linge blanc dans les bras. Adam regarda Anne avec de grands émerveillés alors que la femme de chambre confia l’enfant à son père. Adam reçut le petit paquet avec inquiétude. Il avait perd de le faire tomber ou de l’écraser dans son étreinte. Il regarda son nouveau-né qui se débattait lentement dans son linge blanc. Ses petits yeux étaient fermés mais de petits cheveux blonds parsemaient le sommet de son crâne.
-Il est si beau … dit-il en souriant.
-Elle … susurra Belle.
Belle sourit à Adam qui ne pouvait plus détacher les yeux de sa fille. Ariel et Eric échangèrent un regard complice. Leur tour viendrait un jour et ils espéraient vivre le même bonheur que le couple de châtelains. Le Docteur Moreau se lavait les mains et réjoui, il s’adressa au maitre du château :
-La fleur que vous m’avez confiée a fait des miracles. Je n’en ai jamais vu de pareilles. Il faudra me dire où vous l’avez trouvé.
Adam amena l’enfant à Belle pour qu’elle se prenne dans ses bras. Elle cajolait la petite qui émit quelques petits cris aigus.
-Avez-pensé à un nom ? demanda Samovar plus qu’heureuse.
Adam et Belle rirent. Ils étaient tellement concernés par la maladie qu’ils n’avaient jamais eu l’idée de parler du nom de leur enfant. Aucun nom ne leur venait à l’esprit tant ils savouraient la joie de former à nouveau une famille.
-Par contre, je ne vois pas à quoi pouvait me servir cette raiponce, dit Moreau en montrant les petites fleurs mauves qu’Adam avait ramenées en même temps que la fleur d’or. Elle n’a rien d’une herbe médicinale …
Adam et Belle échangèrent un regard alors que leur fille entrouvrit ses yeux verts pour voir ses parents pour la première fois. Belle caressa amoureusement la joue de sa fille en concluant :
-Raiponce … C’est un si joli nom …
________________________________________________________________ Bon je ne sais pas si ce choix vous surprend ou vous déplait. Sachez que c'est dans l'interêt de l'intrigue que j'avais de Raiponce, la fille de Belle et d'Adam. Les parents de la blonde n'ont que peu d’intérêt (et aucun dialogue) et je trouvais qu'elle correspondait bien à la Belle et la Bête. Dites moi ce que vous pensez de ce choix. Votre avis est le bienvenu !
A la prochaine pour la suite ! |
| | | Lexias
Âge : 31 Messages : 11 Inscription : 27/08/2013
| Sujet: Re: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Mer 2 Avr 2014 - 17:19 | |
| Voici le cinquième chapitre qui débarque ! C'est un chapitre assez long car il s'y passe beaucoup de choses intéressantes pour la suite ! On retrouve des personnages et on en voit des nouveaux ! J'espère que cela vous plaira ! Bonne lecture !
Chapitre 5 – Le pion, le cavalier et la reine
- Spoiler:
Shang et sa demi-douzaine d’hommes mirent deux jours à atteindre le village. Pendant tout le voyage, le jeune général s’était montré extrêmement prudent. Il avait tout fait pour que son escorte et lui évitent les villages et les grandes routes. Shang avait choisi des hommes originaires des régions traversées. Ils connaissaient d’autres chemins plus discrets, plus sûrs pour les amener à destination. Ils voyageaient dissimulés dans des capes de voyages brunes qui cachaient leurs armures et insignes impériaux. Lorsque le soleil se couchait, ils s’arrêtaient et dormaient à la belle étoile après avoir installés des tours de garde entre eux, avant de repartir sur leurs chevaux dès lors que l’aurore survenait. La mort de Chao hantait toujours l’esprit de Shang. Alors qu’ils traversaient des forêts de bambous, des crevasses étroites ou qu’ils arpentaient des chemins de montagne, il ne pouvait s’empêcher de se sentir observer, épier. Il imaginait qu’une menace planait sur lui. Shang avait de sombres rêves où il se voyait transpercer par de nombreux traits noirs. Shang et ses hommes passèrent à travers les campagnes tels des cavaliers fantômes parce que le général ne voulait pas partager le même sort que son défunt ami. Alors que le soleil du second jour de voyage disparaissait entre deux monts, l’escorte entra dans la vallée. Le village vers lequel ils se dirigeaient était entouré de rizières et de bosquets. Une vingtaine de maisons et leurs toits bruns se voyaient à l’horizon. Les chevaux et leurs cavaliers rejoignirent la grande route et se dirigèrent vers une large arche en bois qui marquait l’entrée principale du village. Lorsqu’ils arrivèrent au niveau de l’arche, deux hommes allèrent à leur rencontre ainsi qu’un cavalier. Les trois étaient armés de grossières lances. Le cavalier était un homme un peu moins âgé que Shang aux épaules robustes. Il avait la carrure d’un fermier. -Halte ! Qui êtes-vous ? Et que venez-vous faire ici ? Shang posa son regard sur les deux hommes à pied qui le toisaient du regard prêt à user de leurs lances. Leurs yeux ne montraient aucune peur mais leurs jambes étaient fébriles. Ils avaient face à eux, sept mystérieux cavaliers avec de hautes montures. Il suffisait à Shang d’ordonner la charge et ils se feraient piétiner sans pitié. Même le jeune homme, sur son destrier mal nourri et affaibli, tenait fermement son arme, prêt à en découdre. -Je suis Li Shang, général de l’Empire du Milieu. Je viens m’entretenir avec Fa Zhou. A l’entente de son titre, les trois gardes écarquillèrent les yeux. Ils s’écartèrent de l’escorte et relevèrent leurs lances. -Navré, Général. Répondit le cavalier. Nous ignorions tout de votre venue. -Nous sommes de passage, mentit Shang. -Je vais vous mener jusqu’au domaine Fa, dit le cavalier. Les lanciers saluèrent le général et ses hommes puis retournèrent à leur poste au pied de l’arche en bois. Les soldats et le fermier à cheval empruntèrent le chemin sous l’arche et entrèrent dans le village. Le bourg était presque désert. La neige, qui était tombé il y a quelques jours, avait peu à peu fondue et il ne restait que quelques tracés blancs çà et là. Les habitants s’étaient réfugiés dans leurs foyers à l’abri du froid. Les villageois qui restaient dans les rues observèrent les cavaliers passer sans rien dire. Certains étaient armés de faux ou de fourches et semblaient surveiller chaque coin de rue. Il y avait des jeunes, des vieillards, mêmes des femmes tout juste sorties de l’adolescence. Certains patrouillaient par deux dans les rues du village et regardèrent avec étonnement le passage des sept cavaliers. -Que s’est-il passé ici pour que vous soyez tous aux aguets ? Demanda Shang. Le cavalier grimaça et son regard s’endurcit. -Il y a trois jours, une bande de brigands s’est infiltrée de nuit dans le village et a tenté de voler dans notre réserve. Depuis nous sommes sur nos gardes. -Y-a-t-il eu des blessés ? demanda Shang. -Chez eux, oui. Déclara le cavalier avec un rictus. Nous les avons chassés comme il se doit. -A ce que je vois, vous êtes bien organisés … -Et vous, Général ? Avez-vous des nouvelles de l’Empereur ? Que compte-t-il faire ? Nous vivons sur les peu de ressources que nous avons amassés cet été. Il faut tout rationner et nos faibles portions sont convoitées par des bandits ou des envieux. Comment l’Empereur peut-il fermer les yeux là-dessus ? Soudain une silhouette passa en trombe devant eux et disparut derrière une maisonnette. -Au voleur ! Au voleur !! Intrus dans le village !! Intrus ! Un homme aux cheveux en catogan arriva devant eux, alerté et paniqué. En voyant les cavaliers, il s’écria : -Vite ! On vient de voler dans notre réserve ! Le fermier frappa les flancs de son cheval qui se mit à la poursuite du voleur suivi par Shang et ses hommes. Ils filèrent sur les traces du voleur qui se faufilait entre les ruelles pour échapper aux habitants du village qui convergeaient vers lui. Les villageois sortirent des maisons et s’agitèrent à chaque coin du village. Soudain, au détour d’une maisonnette, les cavaliers virent un homme de dos qui se dirigeait vers une forêt de bambous située en bordures du village. Les chevaux galopèrent à tout rompre mais il était évident que l’intrus aurait disparu entre les bambous avant qu’ils puissent l’atteindre. Heureusement, filant à tout rompre, une grande silhouette noire s’interposa entre le fuyard et la bambouseraie. D’un simple coup de bâton sur la tête du fuyard, celui-ci chuta et laissa tomber les deux sacs qu’il transportait. Montée sur une jument noire aux traits blancs, une jeune femme aux cheveux sombres toisait le voleur du regard armée d’un long bâton de bois qu’elle tenait comme une lance. Le voleur, hébété, se protégea avec ses bras alors que les cavaliers et des villageois en colère les rejoignirent. Pendant quelques instants, le fuyard se recroquevilla comme une bête apeurée devant les villageois qui semblaient vouloir le punir ardemment pour son forfait. -Pourquoi t’es-tu introduit dans notre village ? dit d’une voix forte la jeune femme aux cheveux courts noirs. Tout le monde s’était alors tut. Même Shang et ses soldats restèrent en retrait, curieux de connaitre ce qui allait se dérouler. -Je … Je … souhaitais simplement trouver un peu de nourriture. Bégaya le voleur. -Tu veux dire voler ! Cracha une femme empoignant une faux. Les villageois protestèrent et hurlèrent alors que l’homme tremblait de tous ses membres, agneau entouré par la meute de loups. -Je suis … désolé … Je suis désolé ! Mais essayez de me comprendre ! J’en ai besoin ! -Ce riz est notre dû, répliqua un vieil homme en montrant les sacs de riz que le voleur avait subtilisé. Nous avons durement travaillé pour l’obtenir afin de nourrir nos familles !! -Et nous devons faire avec le peu que nous avons récolté cet été !! Rajouta un autre villageois. Les protestations assassines des villageois reprirent avant que la cavalière ne les fasse cesser. -Laissez le parler ! Il doit s’expliquer ! dit-elle. Le voleur se tourna vers la jeune femme. Il leva les yeux vers elle comme si elle était son salut. -Vous … vous êtes Fa Mulan ! dit-il en se mettant à genoux. L’héroïne de la Chine ! Khan, la jument à la robe sombre, battit des sabots ce qui l’effraya et le maintint à distance de Mulan. -Pourquoi avez-vous volé ce riz dans notre réserve ? demanda-t-elle d’un ton ferme. Le visage du voleur se tordit en une grimace repoussante et des larmes coulèrent sur ses joues pour se fondre dans sa moustache et sa barbe mal rasée. -J’ai une femme et deux enfants à nourrir mais des brigands ont pris toutes mes réserves pour l’hiver. J’avais vendu mes bêtes pour acheter du riz mais ils ont également pris tout ce que j’avais. Mes fils meurent de faim ! J’ai besoin de ce riz ! Pour ma famille ! Mulan prit quelques instants pour réfléchir tandis que l’homme se frotta les yeux avec sa manche pleine de terre. La foule, toujours remontée, resta insensible aux sanglots du voleur. -Même si tu ramènes ces deux sacs de riz, dit-elle. Qui te dit que des brigands ne viendront pas te les dérober lorsque tu arriveras chez toi ? L’homme n’avait pas pensé à cette éventualité et resta sans voix alors que les villageois soupirèrent d’agacement. -Cependant, j’ai quelque chose à te proposer, dit Mulan d’un ton plus doux. Pourquoi n’amènes tu pas ta famille ici ? Nous pourrons vous protéger et tu pourras bénéficier d’un peu de nos rations pour nourrir ta famille. C’est peu mais c’est tout ce que nous pouvons t’offrir. Les villageois commencèrent à murmurer entre eux alors que le voleur hésita à prendre sa décision en voyant les regards de ces derniers. -Je ne … sais pas, répondit le voleur. Il faudrait que je retourne à ma ferme. Et puis … -Tu peux dormir ici pour la nuit. Poursuivit Mulan. Demain, nous trouverons des personnes pour t’escorter chez toi et ensuite pour ramener ta famille. -Mais si on te reprend à voler durant la nuit. Menaça un villageois trapu. On ne sera pas aussi clément … Le voleur déglutit et murmura : -Très bien … on va faire comme ça … Mulan fit un grand sourire alors que deux villageois relevèrent le fermier voleur toujours avec des yeux emplis de suspicion. Une villageoise s’empara des deux sacs de riz et les tendit à Mulan qui les attacha à la selle de Khan. -Tu es sûre que c’est la bonne solution ? demanda la villageoise à la jeune femme. -Ce n’est pas un bandit, il n’a attaqué personne. Il cherche simplement à nourrir sa famille comme nous tous. Expliqua Mulan. Le regard de l’héroïne de la Chine fut finalement attiré par les cavaliers qui avaient assistés à la scène. Elle reconnut immédiatement leur leader et tira les rênes de Khan pour aller à leur rencontre. -Shang ! Qu’est-ce que tu fais ici ? Le jeune général ne voulait pas s’étendre ici au milieu de cette petite foule et de ces oreilles indiscrètes qui avaient déjà de nombreux soupçons sur sa venue. -Je voudrais te parler à toi et à ton père. Dit-il d’un ton solennel. Le visage de Mulan se renfrogna. Shang n’était pas venu pour de simples retrouvailles. -Je vais te conduire chez moi, dit-elle en lui emboitant le pas. Le fermier qui les avait guidés jusque-là salua le général et ses hommes et accompagna les deux villageois qui escortaient le voleur à l’endroit où il passerait la nuit. Mulan mena le groupe de soldats à travers le village et les mena au domaine Fa. -Ce village a bien changé depuis ma dernière visite. Commença Shang. -C’est ainsi depuis quelques temps. Répondit Mulan. Il faut se défendre contre tout ce qui rôde dehors. Ces terres ne sont plus aussi sûres qu’autrefois. -On m’a raconté que vous aviez chassé une bande de brigands, il y a trois jours. Et sans aucun blessé dans votre camp. C’est surprenant pour de simples civils. Mulan ne put s’empêcher de sourire. -Je les ai entrainés. Les yeux de Shang s’écarquillèrent. -Qu’est-ce que tu veux dire ? -Durant tout l’hiver, nous n’avions rien de mieux à faire que d’attendre des jours meilleurs. Alors j’ai entrainé et formé les villageois pour qu’ils puissent se défendre ainsi que notre village de tous les dangers qui pouvaient le menacer. -D’après ce que j’ai vu, ils ne semblent avoir peur de rien. Tu les as bien formés. Dit-il. -J’ai eu moi aussi un bon instructeur. Termina Mulan en souriant. Les cavaliers arrivèrent en bordure du village proche d’un grand bosquet en bambous où résidaient les Fa. Ils longèrent les murs qui entouraient la propriété et le jardin puis arrivèrent aux épaisses portes de bois. Ils entrèrent dans la cour du domaine entourée par la résidence des Fa et un mur percé par une ouverture en demi-cercle donnant sur les jardins enneigés. Mulan montra les écuries le long des murs et les cavaliers guidèrent leurs chevaux jusqu’au bâtiment en bois. -La nuit va tomber, dit Mulan. Tes hommes peuvent s’installer dans les écuries, nous ne pouvons pas tous vous héberger à l’intérieur. Nous avons une chambre de libre. -Tant que nous sommes à l’abri du froid, répondit Shang. Tout me va. -Allons à la maison, nous serons plus à l’aise pour discuter. Elle se tourna vers les soldats de l’escorte. -Nous avons peu mais nous allons vous offrir quelque chose pour compléter vos rations. Les hommes inclinèrent leurs têtes en signe de respect. -Merci à vous, Fa Mulan, répondit l’un d’eux. Shang et Mulan traversèrent la cour et montèrent les escaliers qui menaient au domaine. Au sommet des escaliers, le chien de la famille, Petit Frère, somnolait. Il devait servir de chien de garde pour le domaine mais l’animal avait l’habitude de gaspiller ses forces à courir après la volaille plutôt que de chasser les éventuels intrus. En passant, devant le cabot, Mulan caressa Petit Frère qui répondit par un couinement sourd. Après avoir fait entrer Shang dans la maison, Mulan le mena dans la salle principale où Grand-Mère Fa buvait une tasse chaude de thé à genoux sur un coussin. A la vue du général, elle recracha une partie de sa boisson puis ses yeux se remplirent de malice : -Général ! dit-elle. Je n’espérais pas vous revoir de sitôt. Grand-Mère Fa avait toujours mis mal à l’aise Shang. Elle avait un air rusé et un œil affuté auquel rien n’échappait. Le général d’empire était intimidé par une vieille femme. Un rire s’échappa de sa bouche édentée alors qu’elle invita le jeune général à s’asseoir à côté d’elle. Le repas allait être servi. Mulan alla prévenir sa mère qu’il faudrait ajouter un couvert en plus alors que Fa-Zhou entra dans la pièce, appuyé sur sa canne en bois. Peu étonné par la venue de Shang, il le salua avec le flegme qui lui était propre et s’installa. Plus tard, Fa-Li et Mulan arrivèrent avec des bols de riz et du thé pour tout le monde. C’était des maigres portions car tout comme le reste du village, ils étaient rationnés. Cependant dans son bol, Shang avait eu comme privilèges d’avoir quelques morceaux de porc. La mère de Mulan lui signifia que c’était la moindre des choses pour un invité de marque. Shang la remercia et ils purent commencer à manger. -Je suis navré que nous n’ayons que ça à offrir. Dit Fa-Li. -Ne vous inquiétez pas, je comprends parfaitement, répliqua Shang. -Les temps sont difficiles pour tout le monde, ajouta Grand-Mère Fa en prenant un grain de riz avec ses baguettes. -Vous êtes obligés de rationner la nourriture et ce à l’échelle du village. Dit Shang. -C’est le seul moyen, expliqua Mulan. Et cela n’empêche que certains villages meurent de faim. -On raconte que dans l’Ouest, des villages se font la guerre pour quelques grains de riz. Expliqua Fa-Zhou d’un ton calme. Tous ces évènements ne font que ressortir les travers et les vices de l’homme. Général. Que compte faire l’Empereur pour enrayer ces malheurs ? Les yeux sombres du patriarche Fa restèrent fixés sur Shang. Le jeune général reposa ses baguettes et prit un air sérieux : -L’Empereur a chargé le général Wei de faire parvenir la majeure partie des réserves de nourriture de la Cité Impériale dans les régions isolées et souffrant de la famine. Sun Wei a avec lui une très grande escorte pour éviter que la nourriture lui soit subtilisée. Il doit aussi débusquer les nombreuses bandes de brigands qui se cachent dans les montagnes et dans les forêts. Le souvenir de Huan Chao traversa son esprit mais il le chassa immédiatement de ses pensées. -Le général Wei est censé approvisionner les régions du Nord de l’Empire avant de redescendre vers l’Ouest puis vers le Sud. Vous recevrez une partie de ces réserves sous peu. -C’est pas trop tôt, grommela la doyenne des Fa que Shang préféra ignorer. -Je me doutais que vous n’étiez pas venu avec des rations de nourriture, général. Dit Fa-Zhou avec un sourire. J’ai vu vos soldats dans la cour. Une simple escorte de cavaliers. Rapide et discrète. Que venez-vous faire ici, Général ? Les Fa se turent et restèrent accrochés aux lèvres du jeune général. -J’agis sur les ordres directs de l’Empire du Milieu, honorable Fa-Zhou. Il m’a chargé d’une mission qui doit rester secrète. Grand-Mère Fa écarquilla les yeux, soudainement très attirée par la conversation. Mulan ne quittait pas Shang des yeux. Fa-Li s’impatientait et jouait avec les baguettes dans ses mains. Fa-Zhou restait imperturbable. -Le général Huan Chao a été tué alors qu’il effectuait des manœuvres dans le Nord. Fa-Li laissa étouffer un cri d’effroi alors que Mulan était tout aussi intriguée. Shang préféra rester évasif sur la mort de son ami et poursuivit : -Avec la mort du général Chao, l’Empire ne compte plus que trois Généraux d’Empire. -Mais la Chine doit toujours avoir quatre généraux impériaux, coupa Fa-Zhou d’un ton solennel, comme cela a toujours été. Shang prit une grande inspiration. -Voilà, la raison de ma venue ici. Grand-Mère Fa et son gendre échangèrent un regard. Ils avaient parfaitement compris où voulait en venir le jeune général qui se tourna vers Mulan. -L’Empereur veut que Mulan devienne un Général d’Empire. La jeune femme écarquilla les yeux, le souffle coupé. Fa-Li semblait tout aussi stupéfaite que sa fille. Fa-Zhou gratta sa barbe tandis que Grand-Mère Fa reprit une rasade dans sa coupe de thé. -Je … je ne peux pas ! s’exclama Mulan. C’est … c’est impossible. -Qu’est-ce que cela signifie ? Souffla Fa Li. L’Empereur n’est pas sérieux. Le général Shang garda son sérieux alors que Mulan le dévisageait en espérant qu’il s’était trompé. -Pourquoi moi ? répliqua-t-elle. Mulan connaissait en partie la réponse. Elle avait sauvé la Chine de la menace des Huns et avait été récompensé pour sa bravoure par l’Empereur lui-même. Mais à l’origine de ses actes héroïques, elle voulait simplement partir à la guerre à la place de son père qui souffrait d’une ancienne blessure. Elle s’était déguisé en homme et avait rejoint l’armée. Elle avait suivi la formation pour devenir soldat et elle avait marché à la bataille comme tous les autres hommes. Mais le destin en avait décidé autrement. Grâce à un coup du sort, elle avait éliminé l’armée de Shan Yu et par la suite sauvé la vie de l’Empereur. Elle était devenue l’héroïne de la Chine. Et elle devait supporter ce titre bien qu’elle s’en serait bien passée. -Tu dois le savoir, répondit simplement Shang. Fa Zhou croisa les bras et ferma les yeux en pleine réflexion. -Mais je n’ai aucune expérience militaire ! Je n’ai qu’une simple formation de soldat ! Comment l’Empereur a-t-il pu penser que je puisse être général ? C’est totalement insensé ! -L’Empereur a spécifié qu’il n’accepterait pas ton refus, déclara Shang. Mulan sentit le piège se refermer sur elle. La jeune resta abasourdie, écrasée par le poids de ces révélations. Le reste de la famille s’était également muré dans le silence. -Et vous, Général ? demanda calmement Fa-Zhou. Que pensez-vous du choix de l’Empereur ? Le père de Mulan conservait toujours son calme olympien et son visage ne décelait aucun trouble. Les visages s’étaient de nouveau tournés vers le jeune général. Mulan et de sa mère étaient pleine détresse alors que la doyenne Fa feignait l’indifférence. -L’idée de l’Empereur est plutôt … étonnante, déclara-t-il d’un ton hésitant. Chaque Général d’Empire est passé par l’Académie Impériale et a suivi le meilleur enseignement concernant la stratégie, la tactique et l’administration militaire. On ne devient pas Général d’Empire du jour au lendemain. Si cela devait rassurer Mulan, on pouvait dire que c’était raté. Le cœur de la jeune femme se serra à la simple pensée des plans et formations militaires qu’elle devrait assimiler et connaitre de tête. -Mais, continua Shang, je ne pense pas que ce soit une mauvaise idée. Mulan s’éclaira soudainement à cette remarque. -L’Empereur ne fait rien à la légère. Chacun de ses actes est contrôlé et pesé. Sa décision de nommer Mulan comme Général Impérial n’est pas irréfléchie. Tu suivras une formation accélérée à la Cité Impériale. Tu auras tous les enseignements nécessaires pour devenir général. Il ne compte pas te lâcher sur un champ de bataille avec une armée d’un million d’hommes. La facétie de Shang n’avait pas totalement détendu la famille Fa. -Mais pourquoi l’Empereur viendrait-il chercher cette pauvre petite pour en faire un militaire haut gradé ? s’indigna Grand-mère. -Ce n’est pas une mesure prise à la légère. Soupira Shang. Le fait est que le peuple est découragé. La famine, la misère et les troubles n’arrangent rien. Mais le choix de Mulan pour cette charge n’est pas anodin. Il veut faire d’elle un Général d’Empire car il est persuadé que cela satisfera le peuple et lui donnera espoir en ces moments difficiles. Les traits du visage de Mulan se durcirent à cette remarque et Grand-Mère Fa se renfrogna. -Alors je ne suis qu’un instrument pour l’Empereur ? Déclara sèchement Mulan. -Ne vois pas cela ainsi, coupa Shang. Tu lui as sauvé la vie, tu as sauvé la Chine. Il ne peut dès lors pas te considérer comme quelqu’un dont il peut disposer. Il a le plus grand respect pour toi. -Et pourtant, il m’impose de quitter ce village qui est toujours sous la menace de la famine et des pillards ! s’indigna-t-elle. -L’Empereur ne te demande pas de faire ça pour lui, coupa Fa-Zhou qui venait de sortir de ses réflexions. Mulan dévisagea son père qui affichait un mince sourire. -L’Empereur veut que tu viennes en aide à la Chine. Elle a besoin d’espoir. Elle a besoin d’un signe que ces épreuves vont bientôt se terminer et que la Chine retrouvera la paix et la prospérité. Shang trouva en Fa-Zhou un soutien inespéré qui le poussa à poursuivre : -Ta bravoure n’a pas été oubliée. Certaines femmes se sont portées volontaires pour entrer dans l’armée. Dans les rues de la Cité Impériale, on voit des filles jouer avec des épées en bois. Tu as changé les choses plus que tu ne le penses. -Et puis, tu seras la première femme à devenir Général d’Empire. Dit Fa-Zhou avec fierté en croisant les bras. C’est un grand honneur. Mulan ne comprenait pas pourquoi son père s’était rallié à l’idée de l’Empereur. Grand-Mère Fa n’avait pas caché son désaccord tandis que Fa-Li semblait toujours bouleversée. Elle soupira longuement et regarda fixement son bol de riz et sa tasse de thé. Elle n’avait plus faim. Cela lui avait coupé l’appétit. Accrochée sur un mur de la salle principale, la lame ébréchée de l’épée de Shan Yu luisait à la lumière des bougies sur la table à manger. Le médaillon de l’Empereur sur lequel était gravé un dragon d’or était enroulé autour de l’arme du Hun et symbolisait le triomphe de la jeune femme. Cette période lui parut encore plus lointaine. -Etant donné que je n’ai pas le choix …, soupira Mulan en signe d’abandon. -Tu ne dois pas t’inquiéter. L’Empereur ne t’aurait jamais choisi s’il savait que tu ne serais pas capable de supporter cette charge. Je crois également que tu en es capable. Mulan ne douta pas de la sincérité de Shang. Il était tout aussi mal à l’aise de demander ça à Mulan. Elle ne l’avait revu que peu de fois depuis qu’elle était retournée dans son village après la guerre. Mais malgré cela, il avait sans aucun doute compris qu’elle souhaitait vivre une vie simple loin des tourments du pouvoir. -Si telle est la volonté de l’Empereur, nous devons croire en sa décision, conclut Fa-Zhou, solennel. Grand-Mère Fa termina son bol de riz avec amertume et lorsque le repas fut terminé, Mulan s’adressa à Shang d’un ton découragé: -Quand devons-nous partir ? -Le plus tôt, demain matin. Dès que le soleil se sera levé. Répondit Shang en toute franchise. Nous ne devons pas perdre de temps en route. Personne ne doit savoir pour quelle raison tu quittes le village. Vous devez conserver ce secret jusqu’à ce que l’Empereur l’annonce officiellement. Quelques instants après que Shang lui ai précisé la durée du voyage et ce qu’elle devrait emmener à la Cité Impériale, Mulan quitta la salle principale en direction de sa chambre. Elle referma la porte derrière elle et s’allongea de tout son long sur son lit. Elle se frotta les yeux et émit un long bâillement. Les journées étaient rudes et longues au village. Il fallait effectuer des patrouilles et des gardes pour empêcher des intrus de s’immiscer dans le village pour subtiliser de la nourriture ou voler des villageois. Elle passait presque sa journée à cheval à chevaucher d’un point à un autre du village. L’entrainement qu’elle avait fait subir aux villageois avait porté ses fruits. Elle s’était souvenue de la formation intensive de Shang lors de son entrée dans l’armée impériale et l’avait appliqué dans son village peuplé d’artisans et de paysans. Les femmes, animées par la fougue de l’héroïne de la Chine, se montrait encore plus rigoureuse dans leur apprentissage. Grand-Mère Fa aimait taquiner sa petite fille sur « son armée ». En effet, les villageois suivaient attentivement à la lettre les ordres et recommandations de Mulan. Celle-ci n’hésitait pas à consulter les nobles ainés du village sur ce qui devait être fait pour protéger le village. Oui, les journées étaient rudes et longues au village. Mais cette routine, Mulan l’appréciait de plus en plus. La requête de l’Empereur avait tout changé. Elle se sentait écrasée par cette nouvelle charge. Cela la dépassait totalement. Mulan s’inquiétait aussi pour son village. Qu’allait-il se passer si elle partait ? Les habitants seraient forcément découragés et ainsi leur vigilance diminuerait ce qui mettrait le village en danger. Des pillards ou des brigands en profiteraient surement pour les attaquer et les détrousser. Elle souffla nerveusement. Tout semblait aller si bien, il y a quelques heures. Elle avait beau se tourmenter l’esprit, elle ne pouvait pas reculer. Elle commença à rassembler quelques affaires qu’elle emmènerait à la Cité Impériale lorsque deux coups frappèrent sur le rebord de sa fenêtre. Mulan se tourna en direction de l’ouverture au-dessus de son lit pour apercevoir une petite forme rouge allongée sur le rebord de la fenêtre. -Heeeeey ! Mulan !! Comment va, ma grande ? La jeune femme retourna à ses affaires sans porter une grande attention au lézard rouge. -Ça pourrait aller mieux, répondit-elle à mi-voix. -Dis-moi, tu n’aurais pas quelque chose à me dire ? demanda Mushu en tombant sur le lit. Le sourire appuyé et insistant qu’affichait Mushu était plus que suspicieux pour Mulan. -Qu’est-ce que je devrais te dire ? demanda-t-elle. -Hé, hé. Eh bien, vois-tu. J’étais installé sur un mur avec mon complice de criquet à profiter du coucher de soleil, le Lorsque je te vois, entrant dans le domaine, en compagnie de ce bon vieux Shaaanng … Le minuscule dragon insista bien sur le nom du général. -Que viendrait faire ce beau mâle dans cet endroit ? demanda Mushu avec un regard inquisiteur. Mulan ne voyait pas pourquoi elle devrait le cacher à Mushu. Après tout, il était son gardien et ils avaient traversé maintes épreuves ensemble. -Shang est venu ici pour m’annoncer que j’allais devenir … -Général d’Empire !! Coupa Mushu. Je sais tout !! J’ai entendu votre conversation !! HA HA HA !! C’est génial !! D’abord on sauve la Chine et maintenant ça !! Le dragon rouge sautilla sur le lit en hurlant de joie. -Je vais être le gardien d’un Général Impérial !! S’exclama-t-il en exécutant une roue sur les draps. C’est démeeennt !! Mulan ne fit pas vraiment attention au dragon et continua de préparer ses affaires en vue du long voyage de demain. Cela n’empêcha pas le dragon de se trémousser à travers la chambre et de laisser exploser sa joie. -Après ça, les ancêtres devront m’ériger une véritable statue. Non ! Un monument à ma gloire !! Ha ha ! J’imagine déjà la tête de certains lorsque je vais leur annoncer. 10 000 ans que j’attendais ça !! Maman serait tellement fière de moi … Le dragon essuya les larmes qui coulèrent de ses joues avec sa queue alors que surgit derrière lui un insecte aux couleurs bleu et mauve pourvues de longues antennes. Cri-Kee émit deux grincements aigus qui déplurent fortement à Mushu. -Ah ! Ne va pas gâcher mon bonheur, le criquet !! C’est un moment exceptionnel que je partage avec Mulan !! Les insectes comme toi ne peuvent pas comprendre l’euphorie de cette situation !! Regardes Mulan comme elle est heure… La mine ravie de Mushu s’effaça lorsqu’il croisa le visage fatigué et accablée de Mulan. -Euh … pourquoi cette tête d’enterrement ? demanda-t-il. -Oh, ce n’est pas grand-chose, mentit Mulan qui ne voulait pas mettre Mushu au courant de ces inquiétudes. Le dragon pouvait se montrer parfois bien trop envahissant aux yeux de la jeune femme. Même lorsqu’on lui faisait des confidences, Mushu avait la fâcheuse manie de tout faire pour arranger la situation en faisant tout pour qu’elle empire. -Tu ne vas pas t’en sortir comme ça, jeune fille !! S’écria Mushu. Je suis bien trop heureux pour nous pour que je te laisse te morfondre. Dis à Tonton Mushu ce qui ne va pas ! C’était trop tard pour essayer de convaincre Mushu que rien ne la tourmentait. Il ne la lâcherait plus de la soirée. Elle laissa ses affaires et s’assit sur le bord du lit. Cri-Kee bondit sur son genou droit en chantonnant. -A vrai dire, j’aimerais vraiment ne pas avoir à devenir Général Impérial. Lâcha-t-elle. Mushu en resta bouche bée, abattu par ce qu’il venait d’entendre. -Co … comment peux-tu dire ça ?! Un Général Impérial ! Tu deviendras l’une des personnes les plus puissantes de l’Empire ! Ça ne se refuse pas !! -Mais ce n’est pas moi qui l’ai voulu, répondit Mulan. On m’impose un titre bien trop grand et trop lourd pour moi. Cri-Kee appuya la jeune femme par un grésillement de défi envers Mushu dont les yeux lançaient des éclairs au criquet. -Tu as pu t’engager dans l’armée, te faire passer pour un homme et sauver la Chine, dit Mushu en essayant de la rassurer. Qu’est ce qui te fait dire que tu n’arriveras pas ? -J’ai comme une mauvaise intuition, j’ai le sentiment que je vais lamentablement échouer. Des militaires comme Shang passent leurs vies à convoiter cette responsabilité et l’Empereur la donne à la première venue sans aucune expérience. -Eh ! S’indigna le dragon. Tu as vu ce que tu as fait à ce village ? Tu as transformer de simples villageois en une petite armée qui ne se laisse pas faire contre les bandits. Ce n’est pas rien. Mushu grimpa sur l’épaule de Mulan et poursuivit. -Etre Général d’Empire, c’est simplement à une plus grande échelle ! C’est vraiment pas grand-chose pour toi, tu vas y arriver ! L’Empereur ne pouvait pas faire un meilleur choix ! Et longtemps après, dans la Cité Impériale, lorsqu’on regardera ta statue jusqu’à côté de la mienne, on dira « Ça valait le coup ! ». Mulan esquissa un sourire devant l’attitude de Mushu. Il aurait tout fait pour la rassurer et la convaincre. -Et puis, on parle de la Cité Impériale !! S’exclama le dragon. La plus grande cité de l’Univers ! La Capitale de l’Empire du Milieu ! Ses grandes avenues ! Ses boutiques et échoppes !! Ses jardins !! Son palais !! Tu seras logé au palais !! On ne peut rêver mieux !! Cri-Kee manifesta sa désapprobation par un grincement strident. -Tu peux dire ce que tu veux, criquet bavard. Pesta Mushu. Mais Mulan et moi, on ira quand même à la Capitale ! -Alors nous parlons bien de « toi et moi » … dit Mulan en haussant un sourcil. -Quoi ?! Tu allais vraiment me laisser ici à moisir dans le sanctuaire aux courants d’air ? Après tout ce qu’on a traversé … Tu me ferais ça … Tu m’abandonnerais … Mushu prit un air de bête battue alors que ces yeux s’humidifièrent pour émouvoir son interlocutrice. Cri-Kee siffla un chant plaintif et agacé. Mulan soupira et répondit avec un sourire. -Je n’ai jamais dit que tu ne m’accompagnerais pas. Après tout, tu es mon gardien, il faut bien que tu me protèges. -Ah !! Là je retrouve la Mulan que je connais !! Sans peur et intrépide !! Mulan la guerrière !! Mulan la Général d’Empiiiirrre !! -Chut ! Mushu ! Tu vas réveiller toute la maison, dit-elle en mettant sa main sur la bouche du dragon. Le dragon retrouva son calme et reprit à mi-voix. -Bon, vu que c’est réglé, il faut que j’aille me préparer pour la Capitale. Je dois rassembler pas mal d’affaires. -Nous partons aux aurores. Alors ne sois pas en retard, conseilla Mulan. -Compte sur moi, fillette ! Allez viens Cri-Kee, on a du pain sur la planche. Mushu bondit sur le rebord de la fenêtre et disparut dans le jardin suivi par le criquet qui chantonnait. Mulan entendit les cris du criquet pendant quelques secondes avant qu’ils disparaissent dans la nuit. Au moins, la soirée s’était bien terminée. *** Dans un coin reculé, aux confins de la Chine, non loin de la prestigieuse Grande Muraille, un rassemblement avait lieu. Dans d’obscures montagnes, au plus profond d’une crevasse sombre, des hommes s’étaient retrouvés pour décider du destin de leurs peuples. Une centaine d’hommes avait installé tentes et yourtes autour de feux de camps où ils tentaient de se réchauffer. Leurs chevaux étaient serrés les uns contre les autres et hennissaient d’agacement. Ça avait été une épreuve de les monter jusqu’à cette cuve naturelle creusée entre les monts acérées. Mais au moins, ils ne souffraient plus du vent mordant qui balayait ces cimes, bien à l’abri entre ces parois escarpées qui les entouraient et les dissimulaient de tous les regards. Deux ethnies s’étaient réunies dans ce lieu secret. Un endroit bien loin de leurs steppes arides et désertes où ces nomades, redoutables archers, montaient leurs chevaux pour se déplacer et aller à la guerre. Ainsi s’étaient rassemblés les Mongols et les Huns. En tout cas, leurs chefs. Les plus grands parmi les grands. Dans l’immense yourte, d’où s’élevait un panache de fumée, les leaders des tribus débattaient sur une importante tâche qu’ils se devaient d’accomplir. Celui qui avait organisé cette rencontre était Tumen, fils de Bumin Khan, le chef suprême des Mongols. Autour de lui s’était rassemblé les fiers leaders des tribus qui avaient fait allégeance à son père par le passé. Certains étaient jeunes, d’autres d’un âge plus avancé, mais ils étaient forts et robustes aux cheveux sombres comme le crin de leurs montures. Face à eux, en nombre inférieur, des hommes affaiblis et vieillissants aux cheveux grisonnants et aux barbes longues représentaient ce qu’il restait des chefs de clan Hun. Leurs fils et leurs frères étaient partis à la guerre aux côtés de Shan Yu, mais ils avaient tous péri lors de la charge menée par le redoutable guerrier contre la Chine. A présent, ils étaient les seuls à pouvoir gouverner en pleurant leurs morts et en ruminant leur vengeance. Le feu au centre de la grande yourte crépitait et illuminait les visages des chefs de tribus d’un halo orangé projetant leurs ombres contre les parois de la tente. Tumen, l’instigateur de la rencontre se tenait entre les deux assemblées, en grand Khan sur son trône. C’était un homme surprenant lorsqu’on connaissait son titre. Il était maigre avec un teint pâle de malade comme s’il n’avait jamais vu le soleil. Il n’avait pas l’allure ni la carrure d’un seigneur de guerre. Ses cheveux bruns broussailleux et son gros nez encadraient des petits yeux avisés. Il se frottait le bouc en regardant tour à tour les deux camps. -Le temps est venu enfin. Commença-t-il. Nous voici réunis après de nombreuses lunes pour enfin mettre en œuvre le projet de nos pères et de nos grands-pères et de tous les chefs de tribus qui nous ont précédés : mettre à bas l’orgueilleux Empire du Milieu. Les chefs Mongols acclamèrent leur Khan avec un râle hurlé à l’unisson tandis que les Huns se murèrent dans le silence. -Le moment que nous attendions depuis tant d’années est venu. Le destin nous est favorable ! -Za ! Hurlèrent les chefs Mongols. -La Chine est gangrénée par la famine et la misère. Nos meilleurs guerriers se sont déjà infiltrés à l’ouest et au nord du pays pour piller les villages et les fermes. Le peuple est faible et désespéré. Il faut mettre fin à l’agonie de la Chine ! -Za ! Tumen s’enfonça dans son siège et parla d’un ton plus posé : -Nous sommes à l’aube de la plus grande conquête de notre peuple. C’est l’accomplissement d’un plan longuement préparé par nos ancêtres. Moi, Tumen, fils de Bumin, j’accomplirais cette tâche, avec les grands chefs qui chevauchaient avec mon père, et je mènerais la charge avec vous, puissants guerriers, sur ce qui fut notre plus orgueilleux adversaire. -Za ! Les Huns restèrent impassibles devant l’engouement belliqueux des Mongols. Et ce fut vers ces vieillards que Tumen se tourna : -Cependant, il reste encore quelques points à régler. Dit-il. Qu’en est-il de vous, chefs Huns ? Marcherez-vous avec nous à la guerre ? Le plus éminent chef parmi ces vieillards, était un homme de moyenne stature. Dans sa jeunesse, il avait été un brillant et redoutable meneur d’hommes. Il était un excellent archer et combattant. Il avait mené maints assauts contre la Chine Impériale et son armée. C’est lors d’un de ces raids qu’il avait perdu un œil gauche et gagné un titre. Ruga le Borgne, un vieil homme aux cheveux blancs avec une fine moustache, dans son armure de guerrier, toisa Tumen avec son œil droit toujours valide. -Nous ne pouvons-nous joindre à cette folle conquête, dit-il plein d’amertume. Parmi les chefs Mongols, des grognements se firent entendre et deux d’entre eux crachèrent au sol. -Nous avions un accord, clama le plus vieux des chefs Mongols. Un accord qui remonte à deux générations ! -Mais cet accord a été violé, déclara Tumen, lorsque Shan Yu a outrepassé les directives de mon père et a décidé de marcher sur la Chine, avec sa horde de meilleurs cavaliers Huns. Les chefs Huns restèrent stoïques, imperturbables. Ruga était le plus fier. Il affrontait les regards mesquins et haineux des Mongols sans flancher. -Shan Yu a toujours été un homme indomptable, enragé, et insensé. Cela nous a couté cher. Nous avons perdu des fils, des petits fils et des frères pour assouvir sa soif de conquête. Répliqua-t-il avec sagesse. Et aujourd’hui, vous comptez suivre ses pas. Sachez que si vous menez une guerre contre la Chine, vous en ressortirez faibles et meurtris tout comme nous. -Nous n’avons pas de conseils à recevoir de vieux fous, rugit un large chef de tribu Mongol. -Paix, stoppa Tumen en levant la main. Le Khan se tourna vers le vieux Ruga avec un sourire charmeur et amical. -Ruga. Vous étiez un grand guerrier autrefois. Un chef redouté et respecté, c’est ainsi que mon père Bumin vous décrivait. Mais aujourd’hui, vous n‘êtes plus cet homme. Votre force vous l’avez perdue mais vous avez grandement gagné en sagesse. Vos conseils sont judicieux mais pour conquérir la Chine, j’ai besoin d’avoir toutes les forces à ma disposition. Si vous marchez avec nous, alors une partie des terres conquises vous sera remise en présent pour tous les Huns tombés au combat durant notre grandiose chevauchée. Le vieux Hun souffla avec dédain ce qui énerva tous les chefs Mongols. -Tu peux déverser toutes les belles paroles qui germent dans ton esprit malin mais nous ne changerons pas d’avis. Nous ne te rejoindrons pas dans ta quête de gloire qui te mènera à ta perte et à celle des tiens. Les Mongols se renfrognèrent tandis que les vieillards Huns restèrent impassibles. Ces derniers avaient repris leur ancienne charge en tant que chef de clan lorsque leurs fils et petit-fils tombèrent au combat contre la Chine. Ce fardeau, en plus de leur peine, était lourd et les exigences des Mongols pesaient sur leurs faibles épaules. Mais comme ils l’avaient convenu entre eux, les Huns ne se joindraient à aucun conflit. Si une guerre devait être menée, les Huns n’y prendraient pas part. Tumen sourit, comme si les paroles du vieux Hun l’avaient simplement effleuré, presque amusé par les remarques de Ruga. -Tu as toujours été aussi direct, Ruga. Mon père aimait te surnommer « Langue sans fourreau ». J’insiste. Vous devez vous joindre à nous. Si tu veux que ton peuple prospère à nouveau, vous devez chevauchez à nos côtés pour envahir la Chine. Les lèvres de Ruga se soudèrent en une grimace et ses yeux lancèrent des éclairs. Il répéta d’une voix ferme. -Les Huns ne chevaucheront pas avec vous. Telle est et restera notre décision. Le feu crépita au centre de la yourte alors que les yeux méprisants des chefs Mongols fusillaient les vieillards Huns. Comparé à eux, ils étaient faibles, séniles pour certains et incapables de se battre. C’était peut-être mieux ainsi, ils n’auraient été que des fardeaux dans cette conquête. Tumen, bien qu’insatisfait par la réponse du chef Hun, dut se résoudre à abandonner. Il s’agita sur son siège et souffla : -Bien, dans ce cas, nous chevaucherons seul vers nos nouveaux territoires et nous en tirerons seul la gloire et les terres. A cet instant, quelques bruits se firent entendre à l’extérieur de la yourte. Il y avait une certaine agitation et des grognements parvinrent aux oreilles des chefs de clan. -Qu’est ce qui se passe au dehors ? marmonna un Mongol. A l’entrée de la grande yourte, deux Mongols montaient la garde et avaient ordre de ne laisser entrer personne hormis les chefs de tribus retardataires. Or tous les chefs avaient été réunis. Pourtant, cinq silhouettes s’étaient avancées dans l’obscurité et essayèrent d’entrer dans la yourte. Les gardes les en empêchèrent. L’une des cinq personnes grogna avec une voix gutturale : -Essaie de nous arrêter, et je te plante mon fer dans tes boyaux ! Les gardes de la yourte furent soudainement pris d’effroi en voyant celui qui menait le groupe. Ils restèrent silencieux et laissèrent passer ces arrivants en n’opposant aucune résistance. Le leader entra dans la yourte suivi par ses comparses. Les chefs de tribu observèrent leur arrivée avec étonnement. Deux des hommes qui accompagnaient ce leader s’apparentaient à des Mongols ou à des Huns. Leur peau était grise et leurs vêtements étaient un patchwork de tissus et d’étoffes aux couleurs ternes. L’un avait les cheveux sombres, longs et gras qui tombaient dans son dos tandis que le second avait une simple touffe au sommet de son crâne et de longues moustaches raides. Ce furent les deux dernières silhouettes qui fermaient la marche qui intriguèrent les chefs Huns et Mongols. L’une d’entre elle était large et imposante mais moins grande que les autres. L’autre était grande et fine aux longs bras noueux. Tout ce que pouvaient distingué les chefs Mongols et Huns de ces êtres, étaient deux paires d’yeux jaunes qui perçaient l’obscurité. Pourtant, c’est bien le leader qui stupéfiât l’assemblée de chefs de tribu. Lorsqu’il arriva à la hauteur du feu qui brulait au centre de la yourte, les flammes éclairèrent son visage. Le sang ne fit qu’un tour dans les veines des seigneurs de guerre nomades. Leurs yeux s’écarquillèrent et leur cœur fut envahi par l’effroi. Même le Roi Tumen s’enfonça dans son trône submergé par la peur. -Comment est-ce possible … ? murmura-t-il. -Il est mort …, se répéta un vieux Hun. Devant eux, se tenait un imposant guerrier habillé à la façon des Huns. Ils le connaissaient tous par ses traits ou sa réputation. Il était l’un des guerriers les plus sanguinaires qui ait chevauché sur les steppes de l’Ouest. Il s’était aventuré dans des contrées lointaines pour y semer pillage et désolation. Il avait été respecté et craint pour ses exploits. En violation des traités passés entre Mongols et Huns, c’est lui qui décida de rassembler les grandes tribus Huns pour mener une invasion massive de l’Empire du Milieu. Il avait franchi et incendié la Grande Muraille puis avait décimé les forces impériales chinoises. Mais c’est au col de Tung Chao qu’il connut une cuisante défaite. Affaibli mais enivré par la colère, il s’était lancé dans un dernier assaut contre la Cité Impériale. Aux portes de la victoire, il avait rencontré un fatal destin face à une jeune chinoise dont il ignorait jusqu’au nom. Revenu d’entre les morts, Shan Yu jaugeait l’assemblée tribale de Mongols et de Huns avec ses yeux jaunes. Avec un rictus sardonique, il parcourut la yourte du regard. -Qu’est-ce que cela signifie ?! S’exclama un chef Mongol. -Tu ne peux être Shan Yu ! s’indigna un guerrier Hun. Shan Yu ne prêta pas attention à ces derniers et maintint un air détaché à tout ce qu’il entourait. La mort de Shan Yu avait été relégué par toutes les tribus notamment grâce aux quelques Huns qui avaient survécu à l’attaque de la Cité Impériale. Ces derniers avaient été ramenés à la frontière et relâchés par les Chinois. Ils avaient affirmé que le chef Hun avait disparu dans une tempête de flammes et qu’on n’avait jamais retrouvé son corps. Le silence régna dans la yourte alors que tous attendaient que se manifeste ce cadavre revenu à la vie. -Alors, c’est ainsi. Gronda Shan Yu. Les chefs de tribus se rassemblent pour mener une guerre féroce à la Chine. Le ton du chef Hun était sarcastique. Ruga le Borgne, tout aussi surpris par le retour de Shan Yu, conserva son calme alors que le revenant s’approcha des chefs Huns. -Pourquoi n’ai-je pas ma place parmi ces honorables vieillards ? grogna-t-il. Parmi ces chefs étriqués ? Ces fossiles séniles ? Moi qui ai fait ployer la Chine, qui l’ai mise à genoux. N’ai-je pas ma place à ce conseil en tant que chef suprême des Huns ? -C’est parce que tu ne l’as jamais été … Le murmure de Ruga parvint aux oreilles de tous. Shan Yu se stoppa devant le vieux chef Hun toujours imperturbable. -Tes paroles ne sont que de la mauvaise herbe qui ne mérite même pas qu’on la regarde lorsqu’on la piétine. Cracha Shan Yu. Ruga était bien trop âgé et trop fatigué pour s’opposer à un homme qui pourrait broyer sa gorge avec une seule main. Tout ce qu’il pourrait dire à ce guerrier ne l’affecterait même pas. Son bras était trop faible et sa langue ne contenait plus assez de venin ou de fougue pour mener de telles batailles. Tout cela le dépassait. -Nous ne vous attendions pas, Seigneur Yu ! Commença Tumen avec peu d’assurance. Je vous en prie. Vous pouvez siégez avec les vôtres. J’espère que vous accéderez à ma requête concernant … -Et toi ? Coupa Shan Yu avec ironie. Le fils de Bumin. Tu t’es assis sur ce trône grâce aux belles paroles qui sortent de ta bouche ? Par quelle manigance t’es-tu octroyé cette place ? Tes hommes aiment-ils autant être guidés par un faible et couard ? Tumen trembla de tout son être alors que Shan Yu avançait vers lui prêt à bondir et à le déchiqueter. -Cela suffit ! Explosa le plus fort des chefs Mongols. Il se leva, prit la hache à ses côtés et s’interposa entre Shan Yu et Tumen. -Tu en as assez dit, Shan Yu. Grogna-t-il. Fantôme ou pas, je vais te renvoyer en enfer. Shan Yu resta immobile levant les yeux vers son adversaire qui faisait deux têtes de plus que lui. Même ses hommes restèrent de marbre à l’entrée de la yourte. Le géant Mongol leva sa hache au-dessus de sa tête. Et en un éclair, il l’abattit sur le Hun. Mais alors qu’il espérait fendre Shan Yu en deux, le géant Mongol vit son geste entravé par la poigne ferme du Hun. Shan Yu avait bloqué, d’une seule main, le bras du colosse avant qu’il n’abatte son arme sur lui. Le géant Mongol usa de sa force pour faire céder Shan Yu mais le Hun maintenait avec une grande facilité son emprise sur le bras du Mongol. Le Hun décida de riposter et serra l’avant-bras du colosse qui hurla de douleur. La main tenant la hache se relâcha et l’arme tomba au sol. Gémissant de douleur, le colosse posa un genou à terre ce qui donne à Shan Yu l’opportunité d’en finir. Il lâcha le bras du géant et enserra la tête du colosse avec ses deux mais. Il saisit son crâne de chaque côté et d’un geste brut, il lui brisa la nuque. Le corps sans vie du Mongol s’étala sur le feu au centre de la yourte. Alors que les flammes le consumaient lentement, tous avaient les yeux rivés sur Shan Yu. Ce dernier, tout puissant, passa au-dessus du corps du colosse pour s’adresser aux chefs Mongols, pétrifiés par sa force. -Vous voulez marcher sur la Chine et la soumettre ? dit-il d’un ton calme. Avec cet incapable à la tête de vos armées ? Tumen détourna le regard. Le Khan plein de confiance s’était transformé en une pauvre bête apeurée. Les chefs Mongols s’apercevaient peu à peu que le successeur de Bumin Khan n’avait jamais été à la hauteur de cette charge. Ils se firent plus attentifs aux propos de Shan Yu qui se tourna vers les chefs Huns. -Préférez-vous crever de faim dans nos steppes alors que la gloire, la richesse et la vengeance nous attendent de l’autre côté des ruines de la Grande Muraille ? Même les chefs Huns étaient peu à peu sortis de leur torpeur. Shan Yu était l’un des leurs. C’était le seul qui avait réussi à faire trembler la Chine et son Empereur. Leur rêve de conquête de l’Empire du Milieu n’était pas mort avec la défaite de Shan Yu. -Je suis passé par les feux de l’enfer ! s’exclama le Hun. J’ai affronté et vaincu les Chinois. Je suis revenu pour terminer mon œuvre ! Pour offrir à nos peuples, les richesses de cet Empire ! -Za ! S’échappa de la bouche de plusieurs Mongols. -J’ai une armée composée de bêtes et de monstres qui sont prêts à déferler sur nos ennemis ! C’est à cet instant que les Mongols et Huns purent voir les deux silhouettes étranges qui accompagnaient Shan Yu. La forme élancée appartenait à un être recouvert d’écailles comme un serpent portant une armure en mailles sombres. Sa tête et son nez allongé le faisait ressembler à un lézard tandis que sa tête nue était recouverte d’un casque. Il portait une épée dans une main et un bouclier dans l’autre. Son compère gras et épais avait la peau tannée et de grands yeux jaunes. Sa bedaine dépassait d’une armure en cuir trop petite. Et un casque recouvrait sa grosse tête sublimée par un groin de cochon. Deux petites défenses s’échappaient de sa bouche d’où coulait un filet de bave. La vue des deux bêtes de foire qui accompagnait Shan Yu surprit plus d’un nomade des steppes. Dans quel genre d’endroit, Shan Yu avait-il trouvé ces monstres ? Le mauvais pressentiment que ressentait Ruga n’avait pas disparu. Il s’était ravivé avec plus d’intensité depuis que Shan Yu était réapparu. Par quel sortilège ou maléfice, Shan Yu avait-il pu revenir d’entre les morts ? Ruga ne le saurait jamais. Il observa avec dépit Shan Yu convaincre toute l’assemblée qui exaltait à l’unisson. -Rassemblons nos troupes pour l’assaut final ! s’exclama Shan Yu. L’invasion qui fera table rase sur l’Empereur et son empire décadent !! -Za ! Scandèrent Huns et Mongols. -Je mènerais nos hordes et nous franchirons à nouveau la Grande Muraille ! Nous incendierons et pillerons tous les villages sur notre route !! Nous amasserons plus de richesses que le plus riche de tous les Khans !! -Za ! Za !! -Puis nous marcherons sur la Cité Impériale ! Là où le destin de la Chine sera scellé à jamais !! Le regard de Shan Yu se perdit dans les flammes du brasier au centre de la yourte alors que les cris et les acclamations autour de lui l’animaient d’une fureur ardente. Il aurait sa vengeance … *** Très éloigné de la Chine ou du Désert d’Arabie, dans un royaume lointain, très lointain, entouré de larges montagnes surmontées de neige éternelle, le peuple était en fête. Dans ces régions du Nord, les hivers étaient rudes et longs, le froid était mordant et mortel pour tous ceux qui n’étaient pas coutumiers à ses régions. Mais, chaque année, les habitants de ces royaumes gelés se soutenaient et affrontaient ensemble l’hiver et ses épreuves. Ces périodes difficiles étaient alors plus supportables pour ces habitants et elles semblaient s’écouler rapidement si bien que l’hiver s’apparentait à un mauvais rêve. Mais aujourd’hui, ce royaume était en fête. Entre le pied d’une montagne et un fjord gelé, le village était en liesse. L’hiver touchait à sa fin. Le Roi et la Reine avaient décidé d’organiser des festivités pour célébrer l’arrivée du printemps. Défiant le souffle glacial qui balayait le fjord, les habitants s’étaient rassemblés sur la grande place du village autour d’un grand brasier. Des friandises étaient vendues aux enfants ainsi que des pains chauds soufflés. On buvait de grosses pintes de bière qui réchauffait le corps et embrouillait l’esprit. Les rires et les chants se répercutaient sur les montagnes créant un écho gargantuesque. Surplombant le village, la demeure en pierre du souverain n’échappait pas à l’euphorie des célébrations. A l’intérieur du somptueux château, le Roi et la Reine avaient invité les monarques des royaumes du Nord à se joindre à eux pour fêter la fin de l’hiver. Les Ducs et Duchesses, les Princes et Princesses, les Comtes et Comtesses, les Barons et les Baronnes, toute l’aristocratie de ces royaumes nordiques étaient réunies entre ces murs. Qu’ils viennent d’une contrée proche comme le fringant Duc de Weselton ou d’un lointain royaume comme le Roi des îles du Sud, personne n’avait refusé l’invitation. Ce dernier avait d’ailleurs profité de cette occasion pour présenter son treizième fils à la noblesse toute entière et comptait bien que son hôte joigne leurs deux familles en envisageant qu’un mariage puisse être possible entre ce treizième héritier et l’une des deux jeunes princesses d’Arendelle. Les danses de salon s’enchainaient dans la grande salle sur un parquet lisse et brillant lequel crissait légèrement sous les pas de danses des souliers de bal et des bottines. Contre un mur de la salle, une estrade, où étaient installés deux trônes, dominait l’assemblée de nobles. Sur ces illustres chaises, le Roi et la Reine observaient leurs invités profiter de la fête. Cependant leur regard se focalisait principalement à quelques mètres devant eux, juste à leurs pieds. Les princesses d’Arendelle, âgées respectivement de trois et six ans, jouaient sous les yeux attentifs de leurs parents. La plus jeune, Anna riait et pouffait aux grimaces de sa sœur ainée aux cheveux blonds argentés, Elsa. Les monarques conviés passaient devant l’estrade pour saluer le maitre des lieux et sa femme et leur attention se posait toujours sur les deux petites filles qui jouaient comme s’il n’y avait personne autour d’eux. Auparavant dans la soirée, elles s’étaient faufilées entre les invités pour aller subtiliser quelques friandises sur une table à l’autre bout de la salle. Elles avaient bousculé quelques jupons de baronnes et de duchesses qui gloussaient au passage des deux furies. Certains nobles aux épaisses moustaches et aux barbes broussailleuses riaient devant l’espièglerie des princesses. Le Roi Harald d’Arendelle était un homme encore jeune, amené à régner durant des années. Son épouse, Sonja, l’était tout autant et leur famille ne pouvait que s’agrandir pour former une lignée forte. Pourtant le Roi et la Reine ne semblaient pas pleinement profiter des célébrations. Durant la soirée quelques petits incidents avaient créé un léger émoi dans la salle de balle. Le grand bol en argent de punch s’était retrouvé mystérieusement gelé, pris dans la glace. Puis lors d’une danse endiablée, le Duc de Weselton avait glissé sur une partie du parquet qui s’était transformé pendant un instant en une fine couche de verglas. Alors qu’Harald, livide, tentait de calmer le Duc qui était furieux, la Reine Sonja avait appelé un valet pour qu’il ramène les deux princesses à l’estrade. Après que tout soit revenu à la normal, Harald et Sonja toisèrent l’ainée Elsa avec des yeux pleins de reproches. La fille aux cheveux d’argent baissa un instant la tête, honteuse, puis son attention se reporta sur la tignasse totalement rousse de sa sœur qui ne pouvait s’empêcher de rire en repenser à la chute du Duc sur le parquet. La fête se poursuivit et les princesses continuaient de jouer sous l’œil attentif de leurs parents. Et alors que la soirée avançait, Harald et Sonja commençait peu à peu se détendre. Il n’y avait pas eu de nouvel incident et tous les invités semblaient s’amuser. En jetant un coup d’œil à leurs filles, ils virent Anna qui somnolait sur place laissant de côté sa poupée et son renne en bois tandis qu’Elsa baillait à gorge déployée. Il faudrait bientôt les envoyer se coucher. Lorsque ce serait fait, Harald et Sonja se sentiraient bien plus rassurés. Pourtant, les portes de la salle du bal s’ouvrirent et un puissant vent glacial s’infiltra dans la pièce. L’assemblée étouffa un cri de surprise alors que des frissons parcouraient leurs échines. Une silhouette noire passa à travers la foule d’invités qui s’était tu. L’étonnement se lut sur les visages de tous les convives. Les lumières de la salle s’étaient atténués sans aucune explication et l’atmosphère était devenue lourde. Une femme de haute stature habillée d’une longue robe noire aux larges manches aux se dirigea lentement vers l’estrade. Elle s’appuyait sur un bâton surmonté d’une sphère de verre. L’assistance était pétrifiée et les convives n’osaient pas se mettre sur le chemin de cette nouvelle arrivante et s’écartèrent à son passage. Harald se leva de son siège alors que ses deux filles prises de peur s’étaient réfugiées auprès de leur père. La femme arriva à la hauteur de l’estrade devant le Roi d’Arendelle. Harald ne sut pas ce qu’il avait en face de lui. A ses yeux, c’était une femme. Elle avait un visage fin et beau ainsi que des lèvres rouges comme le sang mais ses yeux étaient jaunes et son teint pâle semblait virer au vert. Le plus impressionnant était sa coiffe sombre surmontée de deux grandes cornes et l’arrière de l’encolure de son manteau qui semblait fait de fines lames d’acier noir. Harald ne pouvait se détacher de ses yeux jaunes pénétrants qui sondaient le tréfonds de son âme. Il resta quelques instants sans mots tandis que la femme sombre laissa esquisser un sourire. -C’est ainsi que vous accueillez vos invités, Roi Harald ? dit-elle d’une voix solennelle. J’ai entendu de nombreuses choses sur le souverain d’Arendelle mais on ne m’avait jamais dit que vous étiez malpoli même au cœur de votre demeure. Les gardes restèrent de marbre tandis que les convives ne détachèrent pas leur regard de la femme en robe noire qui jurait avec la palette de couleurs rassemblée dans la salle de bal. Harald tenta de former une réponse correcte alors que ses filles agrippaient fermement ses mains, terrorisées : -Pardonnez-moi, mais nous ne vous connaissons pas. Répondit-il. Pas encore … Qui êtes-vous ? Et que venez-vous faire ici ? -Je parcours ces terres depuis fort longtemps. Expliqua-t-elle. J’offre mes services aux splendides monarques et à leurs nations. J’ai été reçu par de nombreux souverains guerriers et érudits. Ils ont trouvés en moi une oreille attentive et une parole avisée. Voici la raison de ma venue dans cette contrée. J’ai ouïe dire que vous étiez un jeune et bon roi, ainsi je souhaite entrer à votre service. Sur ce, elle ploya légèrement pour s’incliner devant le souverain. Un ange passa dans la salle jusqu’à ce que le Duc de Weselton sorte de la foule pour clamer : -Si vous avez servi auprès de tant de monarques, comment se fait-il qu’aucun de nous ne vous conn… La femme sombre n’eut qu’à simplement jeter un coup d’œil au Duc par-dessus son épaule pour que celui-ci ravale ses paroles et se dissimule à nouveau dans la foule, paralysé par la peur. Sonja s’était levée pour rejoindre son époux alors que toute la foule attendait que le souverain d’Arendelle donne sa réponse. -Je suis obligé de refuser … répondit Harald d’un ton poli. Je ne pense pas avoir besoin de conseils. Cependant, vous trouverez peut-être dans cette salle, de nobles gens qui pourraient bénéficier de votre assistance. Le sourire sur le visage de la femme sombre ne disparut pas. Ses yeux perçants passèrent du Roi à ses deux filles toujours tremblantes. Anna détourna le regard et s’agrippa à un pan de la robe de sa mère. Elsa ne pouvait se détacher ses yeux de cette mystérieuse femme qui émanait une aura terrifiante. -Reconsidérez votre offre, votre Majesté, reprit la femme d’une voix envoutante. Au moins si vous refusez de m’avoir comme conseillé, je me propose de devenir la tutrice de vos enfants afin qu’elles bénéficient de la meilleure éducation et instruction. Anna commença à sangloter blottie contre sa mère qui la prit dans ses bras alors qu’Elsa, mal à l’aise, affrontait avec peine le regard jaune de la femme. Harald ne tarda pas à répondre : -Nous devons à nouveau refuser. Nous avons tous les tuteurs que nous voulons en notre royaume. Certaines furent mes professeurs et je ne peux les offenser en les écartant pour une inconnue. La femme ne réagit pas et s’agenouilla pour être au niveau de la petite Elsa qui ne l’a quittait pas des yeux. -Approche mon enfant. Déclara la femme d’une voix douce. Elsa hésita mais poussée par une force supérieure, elle s’écarta de son père et alla vers la femme. Harald et Sonja n’intervinrent pas presque envoutés par ce qu’il se passait sous leurs yeux. La femme tendit une fine main aux longs et étroits ongles. La princesse posa la sienne dans la paume verdâtre de la femme sombre qui lui sourit. Cela déplut amèrement à la petite. -Voyez-vous, Roi Harald, répliqua-t-elle d’un ton froid, je ne suis pas n’importe quelle tutrice … La main de la femme sombre commença à se recouvrir de glace sous les yeux stupéfaits de la petite Elsa et de ses parents. -Et après tout, Elsa n’est pas n’importe quel enfant … La fillette aux cheveux immaculés retira brusquement sa main et se réfugia apeurée auprès de son père en dévisageant la femme sombre. Harald et Sonja furent frappés alors par le sourire sardonique de la mystérieuse invitée. Elle le savait. Ils ignoraient comment elle avait pu le réaliser mais elle avait pris conscience du pouvoir d’Elsa. La petite, pétrifiée, se collait à nouveau à son père, haletante comme si elle venait de se réveiller d’un mauvais rêve. Le Roi et la Reine craignirent que l’un de leurs invités ait vu ce qui venait se dérouler. Ils ne devaient pas savoir. Pas maintenant en tout cas. La main de la femme recouverte de glace disparut aussitôt dans les larges manches de sa tunique noire. La femme se releva presque triomphante, dominant
|
| | | alicia1804
Âge : 27 Messages : 1 Inscription : 22/08/2014
| | | | Invité Invité
| Sujet: Re: [Fan-fiction] - La Dernière Alliance Sam 23 Aoû 2014 - 13:09 | |
| Oulah! Le sujet existe depuis si longtemps et je n'avait encre rien lu? Ben voila qui est fait. C'et vraiment une excellente fanfiction, au début j'étais un peu sceptique vu ce que j'ai l'habitude de lire sur les sites de fanfics, mas là je n'ai pas été déçue, j'ai même été carrément emportée. Le style est très agréable à lire, les personnages correspondent bien à ce dont nous avons l'habitude dans les films...Je ne sais pas quand tu as l'intention de poster la suite, mais un conseil, continue comme ça, je l'attends avec impatience. |
| | | |
Sujets similaires | |
|
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
| |
| |
|